Aller au contenu principal

Cotisations interprofessionnelles et aides d’État : la fin d’une controverse

Par un arrêt très clair du 30 mai dernier, la Cour de justice de l’Union européenne a mis fin au débat sur la qualification des cotisations interprofessionnelles. Explication de texte.

La question de savoir si les cotisations interprofessionnelles volontaires étendues (ndlr : communément appelées cotisations volontaires obligatoires – CVO) devaient être considérées comme relevant du régime des aides d’État, du fait de l’intervention de celui-ci pour les rendre obligatoires, agite les milieux interprofessionnels, les administrations et les commentateurs depuis que les interprofessions existent. Fondamentale pour évaluer le degré d’autonomie de ces organisations par rapport aux pouvoirs publics et à la Commission européenne, elle a en outre suscité de nombreux contentieux, encore en cours1.
En l’espèce, deux sociétés du groupe Doux avaient demandé devant le Conseil d’État l’annulation de la décision d’extension de l’avenant fixant le montant de la cotisation interprofessionnelle prélevée auprès des membres des professions représentées au sein du Cidef (Comité interprofessionnel de la dinde française), au motif qu’aucune notification préalable n’avait été effectuée à la Commission. En effet, l’article 107 du Traité sur le fonctionnement de l’Union déclare incompatibles avec le marché intérieur, dès lors qu’elles affectent les échanges entre États membres, « les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ». L’article 108 soumet à l’approbation préalable de la Commission tout projet tendant à instituer ou modifier de telles aides, et ce, sous peine de nullité.
Le Conseil d’État avait alors saisi la Cour de justice de l’Union, afin qu’elle tranche la question et mette fin au débat.
Dans l’arrêt rendu le 30 mai 2013, la Cour souligne que, pour qu’il y ait aide d’État incompatible, il faut cumulativement : une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État ; susceptible d’affecter les échanges entre États membres ; accordant un avantage à son bénéficiaire ; et faussant ou menaçant de fausser la concurrence.

Aucun transfert de ressources d’État

Se concentrant sur la première condition, elle souligne que le financement au moyen de ressources d’État, élément constitutif de la notion d’aide d’État, n’est pas caractérisé : le mécanisme des cotisations volontaires étendues n’implique aucun transfert direct ou indirect de ressources d’État, les fonds ne transitant pas par l’État ou une entité publique et l’État ne renonçant à aucune ressource : « ces cotisations conservent leur caractère privé pendant tout leur parcours [...] » et, « en cas de défaut de paiement, l’organisation interprofessionnelle [...] ne dispose d’aucune prérogative étatique ». La Cour souligne encore : « les organisations interprofessionnelles sont des associations de droit privé et ne font pas partie de l’administration publique ».
Elle juge en conséquence que « la décision d’une autorité nationale étendant à l’ensemble des professionnels d’une filière agricole un accord, établi dans le cadre de l’organisation interprofessionnelle reconnue de cette filière, qui institue une cotisation volontaire obligatoire, ne constitue pas un élément d’une aide d’État ».

Une décision sans recours

Cette décision, émanant de la plus haute juridiction communautaire et insusceptible de recours, s’impose à l’ensemble des juridictions du territoire de l’Union européenne. Toutes les procédures qui avaient été suspendues dans son attente vont pouvoir reprendre, et tous les arguments découlant de la qualification d’aide d’État devront alors, à défaut d’autres éléments spécifiques, être rejetés.
La vigilance s’impose toutefois : toute volonté de l’État de maîtriser les organisations ou leurs actions serait de nature à remettre en cause la solution adoptée, et les discussions actuelles sur la réforme de l’OCM ne doivent pas aboutir à une « revanche » de la Commission, dont la thèse est écartée par la Cour et qui voit, de ce fait, son pouvoir de contrôle amoindri.

1 Voir notre chronique « les interprofessions agricoles dans l’incertitude juridique », LMH n° 9 du 7 mai 2009

Rédaction Réussir

Les plus lus

poules pondeuses en élevage au sol
Prix des poules pondeuses – Cotation réalisée le 14 août 2025

La CPP (Cotation poule pondeuse) est publiée dans Les Marchés le lundi reflète les prix de la semaine précédente. La CPR (…

petit veau dans sa niche
Prix des petits veaux : après une courte baisse cet été, la tension revient

Les prix des petits veaux se sont tassés au mois d’août, tout en restant à des niveaux inédits pour la période. Mais la baisse…

Chargement d'un camion de pomme de terre. Acheminement sur un tapis.
Pourquoi les prix des pommes de terre industrie ont-ils tant plongé cet été ?

Les volumes de pomme de terre primeurs pour l’industrie qui ne sont pas contractualisés ne trouvent actuellement pas preneurs…

poule rousse dans un champ vu de prés
Prix des poules pondeuses – Cotation réalisée le 08 août 2025

La CPP (Cotation poule pondeuse) est publiée dans Les Marchés le lundi reflète les prix de la semaine précédente. La CPR (…

une silhouette de vache laitière dans laquelle on voit le drapeau allemand
L’Allemagne a perdu 90 000 vaches laitières en un an

Le nombre de vaches laitières continue de reculer en Allemagne, quoique à un rythme un peu ralenti.

brebis en bergerie
« En trois ans, on a perdu 617 000 agneaux ! » : comment la filière ovine veut enrayer la baisse de production

Les abattages d’agneaux reculent depuis 4 ans, mais la filière croit au potentiel et pousse à travailler au cœur de chaque…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Les Marchés
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez vos publications numériques Les Marchés hebdo, le quotidien Les Marchés, Laiteries Mag’ et Viande Mag’
Recevez toutes les informations du Bio avec la newsletter Les Marchés Bio