Comme un air de déjà-vu
Un air de déjà-vu : cette semaine, l’annonce concomitante de la liquidation judiciaire de Doux et celle du redressement judiciaire de Tilly-Sabco a quelque peu rappelé de mauvais souvenirs aux filières bretonnes. Il y a cinq ans, c’est le gouvernement de Jean-Marc Ayrault qui avait dû gérer cette situation très délicate pour l’emploi dans la Région. Cette fois-ci, c’est à Édouard Philippe et Emmanuel Macron que revient le devoir de limiter la casse. Pourtant, même les syndicats de salariés semblent résignés, espérant que les dossiers seront vite bouclés. Certes, ces annonces ne sont pas vraiment une surprise : le fait que les repreneurs (Terrena et l’industriel néerlandais Wegdam) n’ont pas eu le temps ni les moyens de transformer le modèle économique fragile de ces ex-fleurons de l’agroalimentaire breton est un secret de Polichinelle. On pourra toujours se « rassurer » en disant qu’il s’agit de la suite logique d’une mauvaise stratégie prise il y a plusieurs années par ces deux sociétés qui avaient parié sur le poulet export, dopé aux aides européennes, et donc deux cas isolés dans l’agroalimentaire. Pourtant, les derniers chiffres publiés par l’Ania confirment qu’année après année l’industrie agroalimentaire se montre de moins en moins résiliente. Si les indicateurs montrent quelques signes de redressement, le secteur s’améliore moins vite que le reste de l’industrie. La pression de la grande distribution sur les produits alimentaires, qui s’est encore fait sentir cette année, y est certes pour quelque chose. Selon l’Ania, elle aurait conduit à une perte de valeur de près de 4 milliards d’euros depuis 2014. Mais la fragilité de l’agroalimentaire réside aussi dans le poids de la matière première qui reste très élevé dans le chiffre d’affaires des entreprises (55 % et même 77 % pour certaines industries de la 1re transformation, contre 36 % dans le reste de l’industrie). Pour sortir de cette situation, les entreprises n’auront que peu de solutions : créer de la valeur ajoutée tout en se positionnant sur des segments porteurs et mieux sécuriser le prix des achats de matières premières (par des contrats pluriannuels par exemple).