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Cahors : le « vin noir » construit sa montée en gamme

Le poids des coopératives de cahors « entrée de gamme » a diminué de moitié en quinze ans.
Si le cahors achoppe toujours sur la réécriture des décrets, l’appellation semble avoir trouvé un consensus en matière de hiérarchisation. Le cahors va désormais monter en gamme et communiquer au travers du cépage malbec et du vin noir.

à Cahors, la réforme de l’agrément et la modification du cahier des charges de l’AOC n’en finissent pas de créer la polémique. Les nouvelles règles devraient désormais permettre la mécanisation mais la limite des rendements, la hausse des cotisations et les procédures de contrôle ne cessent d’échauffer les esprits et de faire valser les présidents du syndicat des vignerons. Le dernier en date, Fabrice Durou, n’a été élu que depuis quelques semaines. C’est déjà à propos de la hiérarchisation qu’un autre président (de l’interprofession), Alain-Dominique Perrin, avait claqué la porte de l’interprofession cadurcienne en 2002. Son confrère Jean-Marie Sigaud, président de l’union interprofessionnelle, tente depuis longtemps, avec plus de diplomatie, de faire avancer le dossier et de gérer le plan de crise, notamment avec l’aide du conseil général. Il faut reconnaître que le Lot a mis la main à la poche avec largesse pour soutenir la filière, finançant un pôle vitivinicole ultramoderne qui fera office de centre de recherches, de laboratoire et de siège du syndicat.

Cahors, au nom de cette hiérarchisation, a également choisi de renoncer à jouer la carte du Sud-Ouest. « Nous n’avons pas besoin de la synthèse économique régionale pour avoir des chiffres mais nous devons, en revanche, mobiliser tous nos moyens aujourd’hui pour un plan malbec efficace, réaffirme Jean-Marie Sigaud. En temps de crise, nous avons besoin aussi d’une plus grande proximité avec nos producteurs pour mieux les aider ».

Le marché américain par le cépage

L’appellation a donc tout misé sur une nouvelle hiérarchisation avec le malbec comme socle régional, en particulier le rosé pour le marché hexagonal, associé à Cahors pour monter en gamme avec une bouteille interprofessionnelle cahors malbec pour les marchés étrangers. Jérémy Arnaud, le bouillant directeur marketing de l’interprofession, a ainsi décidé de se servir de la mondialisation plutôt que d’en pâtir. « Puisque le malbec était déjà réputé outre-Atlantique et que Cahors est la patrie du Malbec, nous allons jouer le cépage avec les Argentins et avec un programme ambitieux en particulier aux États-Unis déjà deuxième marché de cahors en valeur ». Avec 4 000 hectares, Cahors pèse encore léger au regard des 25 000 hectares argentins, mais il s’agit de mettre en commun des recherches techniques, des formations et surtout « une communication décuplée sur le cépage en l’associant à l’AOC marque Cahors comme valeur ajoutée et au savoir-faire made in France », précise Jérémy Arnaud. « Sur les entrées de gamme, nous ne sommes pas dans la course, ni en prix ni en concentration d’arômes, reconnaît Olivier Pieron chez Reteunauer, l’un des plus gros négociants de la région. Mais sur le moyenne gamme autour de 13-18 dollars, nous pouvons jouer, en complément du cépage, l’image traditionnelle du terroir et de la France à étiquette classique (avec un château et des vignes), très demandée par les consommateurs nord-américains, Canada et USA étant les deux premiers marchés export de l’appellation ». Une grande dégustation va d’ailleurs avoir lieu à New York à la mi-mai sur « The Original Malbec », avec présentation d’une nouvelle bouteille gravée cahors malbec.

Valorisation à court terme

Si, à l’export, l’appellation parie sur le malbec et le marketing, reste à gérer le cahors entrée de gamme et les vins de pays. Le poids des coopératives, qui a diminué de moitié en une quinzaine d’années (en 2008, moins d’un quart des volumes), a contribué à réduire les volumes de vrac mais le Carte noire, qui a fait tant de mal à l’appellation, pèse toujours plusieurs millions de bouteilles (et plus de 40 % des volumes à moins de 2 euros), commercialisées par une demi-douzaine d’opérateurs. L’appellation d’origine contrôlée compte encore 60 % de vins commercialisés en vrac. « Nous devons gérer la transition entre l’augmentation des contraintes du cahier des charges et l’écoulement des volumes du Carte noire, explique Fabrice Durou. Il faut trouver une solution intermédiaire pour renforcer un cœur de gamme à plus de 4 euros et permettre aux vignerons de survivre en attendant que le négoce, très présent ici, construise la nouvelle segmentation et la valorise ». C’est d’ailleurs le véritable enjeu de la stratégie de reconquête car « il n’y a pas actuellement de demande hors premiers prix et marques dédiées en grande et moyenne surfaces, châteaux connus en CHR, estime pour sa part Fabrice Conche, directeur général de Rigal (groupe Jeanjean). Au-delà de la forte implantation locale, l’enjeu est de développer les ventes nationales et surtout parisiennes notamment par des marques ».

Et le cahors grand cru dont tout le monde rêve ne pourra se faire sans une révision de l’aire, toujours explosive mais sur laquelle l’Institut national de l'origine et de la qualité ne transigera pas. Jérémy Arnaud a donc proposé de déposer, pour le haut de gamme, une mention « vin noir », en cours d’examen. Une mention, donc pas monopolistique, mais dont l’appellation Cahors se voudrait le fer de lance avec des vins haut de gamme, à faibles rendements – mais non contractuels –, destinés plutôt à une clientèle de restaurants étoilés, de cavistes et commercialisés en vente directe. Le potentiel est estimé à 20-25 000 hectolitres qui pourraient aussi bénéficier d’une bouteille spécifique gravée « cahors vin noir ».

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