Bruxelles veut améliorer la vie des cochons
Ca discute âprement en coulisse. Dans le cadre du plan d’action pour le bien-être des animaux sur la période 2006-2010, la Commission européenne prépare de nouveaux règlements, notamment pour relever les normes principales, introduire des indicateurs de bien-être, ou encore mieux informer professionnels et grand public. Dans le viseur de Bruxelles : la production porcine, comme souvent accusée de bien des maux.
C’est le branle-bas de combat dans toute la filière, qui a confié le dossier à un seul homme, l’éleveur Henri de Thoré, vice-président de la coopérative Léon-Tréguier dans le Finistère (lire son interview ci-dessous). Autant le dire tout de suite : il a du pain sur la planche. Car les producteurs ne sont pas les seuls à se faire entendre auprès de la Commission européenne et du Parlement de Strasbourg, codécisionnaire. Du côté des associations de défense des animaux, « l’axe anglo-néerlandais est très actif et très entendu dans l’Union européenne, y compris auprès des scientifiques », relève l’éleveur breton.
Plusieurs directives européennes encadrent déjà l’élevage de porcs. La directive 91/630/CE fixe les surfaces minimales par porc charcutier et par verrat. Deux directives de 2001 imposent le logement en groupe pour les truies en gestation (toutes les exploitations à partir du 1 er janvier 2013), donnent des recommandations sur la formulation de l’alimentation des truies gestantes, interdisent la castration des porcelets au-delà de 7 jours, etc. Le respect de ces normes par l’éleveur conditionne l’accès aux aides de la Politique agricole commune.
Animaux castrés ou entiers
Mais Bruxelles veut aller encore plus loin. Le dossier le plus sensible actuellement concerne le traitement de la douleur des porcelets lors de la castration. Il y a trois pistes possibles : l’anesthésie avant castration, l’immuno-castration (ndlr : vaccination un mois avant l’abattage pour limiter le développement des testicules), la production d’animaux entiers. « Le Brésil pratique déjà l’immuno-castration, tandis qu’en Europe, l’Allemagne et les Pays-Bas privilégient l’anesthésie », explique Michel Bloc’h, éleveur de porcs et président de l’Union des groupements de producteurs de viande de Bretagne (UGPVB).
Sur ce sujet, abatteurs et salaisonniers ont également leur mot à dire, car « les performances zootechniques peuvent être modifiées », poursuit Michel Bloc’h. L’immuno-castration pratiquée en fin de croissance réduit la formation de gras sur la carcasse et augmente la proportion de muscles. Des carcasses très prisées par l’industrie, dont la production pourrait s’avérer plus rémunératrice pour les éleveurs. Un premier médicament vient de bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché européen. Mais quelle sera la réaction du consommateur ? C’est toute la question.
Il y a une autre solution : ne fournir à l’industrie que des animaux entiers, mâles ou femelles. De la sorte, plus de castration ni de résidus médicamenteux. « Aux Pays-Bas, les distributeurs Aldi et Lidl ne veulent plus de viande d’animaux castrés dans leurs rayons, explique Henri de Thoré. Du coup, Tönnies ne leur fournit plus que des animaux entiers ». Mais les viandes de porcs mâles non castrés exhalent une odeur caractéristique que d’aucuns jugent déplaisante.
Le bien-être des porcs comprend encore d’autres dossiers, parmi lesquels la densité dans les élevages, la nature des sols, le transport – surface dans les camions et durée –, etc. Mais pour l’heure, aucune date n’a été donnée quant à la publication de nouvelles directives.