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Apurement des comptes : lourde addition pour la France

Cette année, Bruxelles pourrait réclamer près de 2 milliards d'euros à la France au titre d'aides indûment versées par l'Union européenne dans le cadre de la politique agricole commune (Pac). Situation assez périlleuse.

Comme chaque année, dans le cadre du processus d'apurement des comptes, des discussions ont lieu entre Bruxelles et Paris sur le montant des aides agricoles indûment perçues par la France. Mais cette fois, le montant exigé par Bruxelles est inhabituellement élevé. C'est le règlement (CE) n° 1290/2005 qui prévoit le financement « en gestion partagée » de la Pac, et précise les conditions selon lesquelles la Commission organise l'exécution du budget général.

La Commission est ainsi chargée de veiller au respect de la bonne gestion financière des fonds alloués par l'Union européenne, par le biais d'une procédure d'apurement comptable et d'apurement de conformité. Le règlement (CE) no 2988/95 préconise des contrôles homogènes dans les États membres de l'Union européenne et détermine les sanctions applicables aux irrégularités.

Position critiquable du ministère de l'Agriculture

Les États membres sont donc tenus de veiller à ce que leurs organismes payeurs nationaux effectuent un contrôle rigoureux concernant les aides délivrées par les fonds de l'Union européenne. Ils doivent mettre en place un système intégré de gestion et de contrôle, ce qui peut les obliger, par exemple, à recourir à la photographie aérienne et/ou satellite pour définir de façon exacte les zones agricoles pouvant bénéficier de ces aides. C'est cette technologie, pas assez précise sur la taille des parcelles, qui est mise en cause dans la dette de la France.

Si la Commission estime que les procédures de contrôle interne d'un État membre ne sont pas conformes, elle demande le remboursement des sommes indûment versées. Cette correction financière peut être fixée à 2 % ou à 5 %, en cas de répétition du manquement ou de l'irrégularité des dépenses en question, et peut même aller jusqu'à 10 % à 25 % en cas de manquement caractérisé. Selon le rapport de la Cour des comptes française pour le budget 2013, « le refus d'apurement communautaire sera au moins de 406,7 millions d'euros en 2014 ». La Cour ajoute : « En sus de ce montant, les sommes encore en discussion avec la Commission et susceptibles d'avoir un impact budgétaire sur l'exercice 2014 s'élèvent à 1,4 milliard d'euros. » La France pourrait ainsi avoir à rembourser près de 2 milliards au budget de l'Union européenne pour des dépenses irrégulières effectuées au titre de la Pac, notamment pour des manquements liés à l'identification des parcelles pouvant bénéficier des aides entre 2008 et 2012.

Cependant, le projet de loi de Finances rectificatives pour 2014, présenté le 11 juin dernier, n'indiquait pas de surcoût de dépenses concernant l'apurement des comptes. La question se pose de savoir si les crédits mis en réserve pour l'année 2014 suffiront à absorber les apurements conséquents de la France. Le fait que Stéphane Le Foll ait déclaré le 4 juin dernier : « Nous ne sommes pas d'accord avec le niveau des sanctions : ils nous ont appliqué un forfait d'erreur de 5 % sur la totalité des surfaces, mais nous avons refait des calculs précis et des relevés aériens qui nous amènent à une marge de 0,5 à 0,6 % d'erreur », n'est pas suffisant pour éteindre une telle dette.

LE CABINET FIELD FISHER WATERHOUSE

Field Fisher Waterhouse (www.ffw.com) est un cabinet d'avocats européens qui offre des services dans de nombreux domaines du droit, et en particulier en droit de la concurrence, propriété intellectuelle et droit réglementaire européen.

Katia Merten-Lentz est associée dans le département concurrence et droit réglementaire européen : elle est en charge de toutes les questions agroalimentaires, européennes et nationales, toutes filières confondues. Elle intervient tant en conseil qu'en contentieux auprès des industries de l'agroalimentaire.

Réduction des déficits

Par ailleurs, les tentatives du ministre pour rassurer les agriculteurs, en soutenant qu'ils n'auraient pas à rembourser les sommes indûment versées, sont louables mais critiquables. La France, comme tout État membre, a l'obligation de recouvrer auprès des bénéficiaires les montants d'aides attribuées de façon irrégulière. De surcroît, depuis 2006, si les États membres mettent plus de 4 ans à recouvrer ces créances une pénalité supplémentaire de 50 % du montant est mise à leur charge. Le processus d'apurement des comptes intervient alors que la Commission européenne des budgets rédige déjà la position du Parlement européen sur la proposition de budget pour 2015 (vote en session plénière prévu fin octobre), et que les priorités semblent être axées sur la réduction des déficits de paiements.

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