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Réemploi des bouteilles de vin : le mode d’emploi

Manque de disponibilité des bouteilles en verre et objectifs de réduction d’émissions carbone incitent à explorer la piste du réemploi. Une démarche encore compliquée mais qui tend à se structurer. Voici les étapes à suivre.

Pour répondre aux besoins croissants de la filière du réemploi du verre, des usines de lavage se mettent en place comme celle de Bout' à Bout' à Carquefou, près de ...
Pour répondre aux besoins croissants de la filière du réemploi du verre, des usines de lavage se mettent en place comme celle de Bout' à Bout' à Carquefou, près de Nantes. Elle sera opérationnelle au second semestre 2023.
© Bout' à Bout'

Définir ses objectifs en matière de réemploi

« Pour un producteur qui souhaite s’investir dans la consigne, ça n’est pas totalement simple », prévient Clémence Richeux, coordinatrice du collectif France Consigne. Bien définir ses motivations est un préalable indispensable. Elles peuvent être multiples : conviction pour l’économie circulaire, objectifs environnementaux et RSE, sécurisation de l’approvisionnement en bouteilles, fidélisation des clients, anticipation d’une législation contraignante avec notamment la loi Agec…

Selon l’Ademe, le réemploi d’une bouteille économise 79 % d’énergie, 51 % d’eau et 76 % d’émission de CO2 par rapport au recyclage. Ce moindre impact environnemental a fortement incité le Château Beaubois, au sud des Costières-de-Nîmes, à passer à l’acte. S’y est ajouté l’aspect économique : « le prix du verre a doublé en dix-huit mois », témoigne Fanny Boyer, copropriétaire. Un constat largement partagé.

Identifier l’opérateur de collecte de sa région

Pour être guidé dans sa démarche, la première étape est de se rapprocher des opérateurs territoriaux de la consigne, réunis au sein de France Consigne.

Cette structure a pour mission de standardiser les processus et de diffuser les bonnes pratiques. « Nous accompagnons les domaines, notamment s’ils n’ont pas d’opérateurs de consigne sur leur territoire », indique Clémence Richeux, elle-même à la tête de l’association Ma bouteille s’appelle reviens, implantée en Auvergne-Rhône-Alpes.

Le Château Beaubois a pour sa part signé un contrat avec Oc’Consigne. À charge pour le domaine d’utiliser des bouteilles réemployables. De son côté, l’organisme récupère des bouteilles consignées dans des points de collecte, les lave, les repalettise et les revend pour se financer.

Dédier des gammes ou cuvées au réemploi

Le Château Beaubois a choisi d’initier sa démarche de réemploi en lançant deux nouvelles cuvées : Cinso Bistro sur 4 000 bouteilles et Un amour de syrah sur 50 000 bouteilles, toutes deux en biodynamie et vendues au consommateur à 6,80 euros. Autre tactique pour Maison Ravoire, négociant spécialiste de vins de la vallée du Rhône et de Provence. Il a décidé d’adapter l’emballage d’une gamme existante en rendant le changement imperceptible pour le consommateur.

Choisir le bon modèle de bouteille

Aujourd’hui, il existe deux formats (bourgogne, bordeaux) en deux teintes (clair, foncé) validés par France Consigne. Le réemploi exclut les bouteilles allégées. « Un poids de 530 g garantit 35 cycles », souligne Thomas Lemasle, cofondateur de la marque Oé, l’une des pionnières de la relance du réemploi des bouteilles de vin. « La résistance dépend aussi de la méthode de fabrication », mentionne toutefois Clémence Richeux.

Hier plus chère que la bouteille neuve, la bouteille issue du réemploi devient compétitive. Alexandra Parfus, directrice marketing de Maison Ravoire, cite un écart de 8 centimes en sa faveur. En outre, « la consigne permet une relative stabilité du prix de la bouteille », pointe la coordonnatrice de France Consigne.

La disponibilité des bouteilles aptes au réemploi est néanmoins un frein majeur souligné par de nombreux acteurs. Les trois verriers qui les fabriquent sont lourdement soupçonnés de ne pas jouer le jeu. Maximiser les taux de collecte est donc un enjeu d’autant plus fort.

Il n’est pas impossible de garder une bouteille spécifique ou syndicale mais dans ce cas, il s’agira d’un lavage à façon. Le metteur en marché devra organiser sa collecte.

Adapter ses choix d'habillage

La colle mais aussi le papier, les effets d’impression et la taille de l’étiquette vont influencer sa capacité à se décoller plus ou moins facilement lors du lavage. Et donc limiter la quantité d’eau et d’énergie nécessaire. Tout n’est pas proscrit. Il peut y avoir de la dorure par exemple mais à certaines conditions. Une batterie de tests est à prévoir. « Les solutions existent. Avant il y avait un coût. Aujourd’hui certains imprimeurs arrivent à avoir un prix équivalent », encourage Clémence Richeux. Autre changement à intégrer, la gravure du numéro de lot sur la bouteille n’est plus possible.

France Consigne incite à se passer de capsule. Mais ce n’est pas une obligation. À l’étape du lavage, une machine peut l’enlever. Il est suggéré à ceux qui rapportent les bouteilles de l’ôter eux-mêmes.

Intégrer le pictogramme national

La présence du pictogramme national « Rapportez-moi pour réemploi » sur l’étiquetage informe le consommateur final. Ensuite, à lui d’identifier les points de collecte proches. Seuls les metteurs en marché ayant un certificat de réemployabilité validé par France Consigne peuvent apposer ce logo sur leurs cuvées.

Pour mieux sensibiliser les consommateurs, le Château Beaubois a choisi pour l’instant de le rajouter en sticker, même si c’est un ajout de matière sèche.

S’appuyer sur les distributeurs

Le point de collecte est en général le lieu d’achat. Vu le fort engagement nécessaire de ce maillon de la chaîne, la plupart des projets intègrent le distributeur, comme par exemple le réseau Biocoop dont 300 magasins collectent des bouteilles. L'enseigne a aussi testé la vente de vin en vrac mais l'a abandonnée en 2020 pour se mobiliser entièrement sur le réemploi.

Certaines enseignes de grande distribution mettent aussi en place des initiatives localement ou avec des start-up comme Loop. À mi-mars, France Consigne faisait état de 1 000 points de collecte en France. Reste à motiver les consommateurs.

Nicolas Dauve, chargé de recherche & développement emballage chez Biocoop, avance un taux de retour pour les bouteilles consignées de 50 %, sachant que sa clientèle est assez sensibilisée sur le réemploi. A ce jour, 10 à 15 % de l'offre du rayon vin de l'enseigne est apte à la consigne. Il y a donc encore une large marge de progression. Il estime qu'il y a encore beaucoup de zones dépourvues d'opérateurs locaux du réemploi, ce qui freine l'essor de la filière.

Dans le réseau des cafés, hôtels et restaurants (CHR) où la consigne est encore pratiquée pour d’autres boissons, le vin doit aussi recréer une boucle vertueuse.

Voir plus loin

Adelphe à lancé le 28 mars un appel à projets de 4 millions d’euros dédié aux projets de réemploi portés par ses entreprises clientes. Il se termine le 1er novembre 2023. D’ici 2029, l’enveloppe totale dédiée à ces projets devrait atteindre 28 millions d’euros. Plus d’infos sur www.adelphe.fr/reemploi

 

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