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Matières sèches dans le vin: l'écoconception à tous les étages

Il suffit d’un tour dans les allées du Sitevi pour en faire le constat : l’écoconception a le vent en poupe. Tour d’horizon des matières sèches qui se veulent chaque année plus responsables.

C’est un fait, l’écologie est entrée dans le top 5 des préoccupations des Français (voir Réussir vigne n° 266). Dans la lignée des efforts fournis à la vigne et au chai, de nombreux producteurs recherchent des solutions d’habillage des vins les plus responsables possible. C’est là qu’intervient l’écoconception, que le ministère de la Transition écologique et solidaire définit comme le fait « d’intégrer la protection de l’environnement dès la conception des biens ou services ». Lors des derniers rendez-vous Techniloire en novembre, Constance Rérolle, vigneronne dans le Languedoc et directrice vin et spiritueux d’Adelphe (organisme à but non lucratif chargé du recyclage des emballages), a explicité en quoi cela consiste dans la filière vin. Selon l’experte, l’écoconception repose sur trois piliers : alléger les matériaux, améliorer la recyclabilité des produits et sensibiliser le consommateur au geste de tri. « Le taux national de recyclage des emballages est de 70 %, soit une économie de 2,1 millions de tonnes de CO2 », a-t-elle indiqué. Pas si mal, mais toutefois insuffisant au regard de l’urgence climatique.

Optimiser le poids des composants pour réduire les émissions de GES

Retour dans les allées du Sitevi où l’on constate une émergence de solutions pour cadrer avec les deux premiers piliers de l’écoconception. À commencer par les bouteilles, qui d’après les estimations faites dans le cadre du plan climat 2020 des vins de Bordeaux, représenteraient 15 à 20 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) du cycle produit. Une solution consiste à les alléger, à l’instar de la gamme Ecova de Verallia. En Champagne, une étude menée par le CIVC montre qu’une réduction de 65 grammes du poids des bouteilles n’altère pas les qualités techniques et permet d’économiser 8000 tonnes de C02 par an. La start-up toulousaine Green Gen Technologies a de son côté mis au point une bouteille constituée de fibre de lin et de résine de pin. Pour le moment, l’intérieur est tapissé d’un film alimentaire en plastique, mais à terme il sera remplacé par du PLA, du plastique biodégradable produit à partir de maïs ou de canne à sucre. Seul hic : le prix. Elle est actuellement vendue à 3,50 € l’unité. Des essais sur vin doivent par ailleurs être menés pour attester de la capacité du contenant à préserver les qualités du produit qu’il contient. Patience donc. Pour gagner encore (un peu) de poids, les producteurs de bulles peuvent utiliser le muselet à 3 pattes Yo de la Maison Melan Moutet, récompensé au Viteff dernier. Le fabricant assure que Yo serait 15 à 20 % plus léger qu’un muselet classique.

Le biosourcing, une solution pour améliorer la recyclabilité

La piste des matériaux biosourcés, c’est-à-dire produits à partir de biomasse d’origine animale ou végétale, est de plus en plus prisée par les fabricants. Les capsules de la gamme Absolute Green Line de Rivercap sont fabriquées à partir de polyéthylène issu de canne à sucre et d’encres à l’eau. Également produits à partir de canne à sucre, les bouchons synthétiques Green Line de Nomacorc, propriété du groupe Vinventions et labellisés OK Biobased, qui atteste de sa neutralité carbone. Souvent décrié à cause de son sourcing au Brésil, Vinventions travaille actuellement à la création d’une gamme élaborée à partir de marc de raisin nommée Grappe Line. « Nous cherchons des partenaires en France afin de développer une économie circulaire », expose Caroline Thomas, responsable marketing. La société belge a également créé un nouveau procédé permettant de fabriquer des bouchons à partir de plastique recyclé, aboutissant à la gamme Blue Line commercialisée sous la marque Syntek. Chez Diam, les bouchons Origine primés au dernier Simei sont élaborés à partir de liège micro-aggloméré grâce à l’huile de ricin et à des microbilles de cire d’abeille. Une version similaire à base de cire d’abeille existe chez le bouchonnier italien Labrenta dans une gamme prénommée Sughera.

Des étiquettes écoresponsables, avec un peu moins de folie

Enfin côté étiquettes, les solutions sont nombreuses et variées. Le papier est désormais produit à partir de fibres recyclées, de déchets de pommes ou de raisin, de bagasse (de canne à sucre), de fibres de chanvre et de lin ou encore de pâte certifiée FSC (norme attestant de la gestion durable des forêts). Chez IPE, la gamme écodurable comprend également un adhésif biodégradable et les encres de basses migrations sont compostables selon la norme euPIA. « Évidemment on ne peut pas faire d’étiquettes vernies ou avec dorures à chaud », précise le commercial France. Chez Concept méditerranéen d’étiquettes (CME), les encres végétales utilisées permettent toutes les folies, sauf le fluo. « Considérer vos fournisseurs comme des partenaires d’optimisation c’est bien, mais ce n’est pas suffisant. Car pour eux l’intérêt est financier avant d’être environnemental », avertit Catherine Moriau, experte Adelphe lors de la conférence Techniloire. Mention spéciale toutefois au fabricant, Creap Étiquettes qui, sur son stand au Sitevi, a su utiliser un support original pour communiquer sur ses activités. Les prospectus étaient imprimés sur du papier ensemencé fabriqué par la société Papier fleur. 100 % biodégradable grâce aux encres à eau, le papier est ensemencé de graines de fleurs sauvages, herbes aromatiques ou légumes. Une fois la lecture terminée, il suffit de laisser tremper le papier une nuit dans l’eau et de le planter sous une fine couche de terreau pour que les graines germent. Une idée à reprendre, par exemple pour communiquer sur son domaine ou ses tarifs lors de salons. 

En champagne, le recyclage est une affaire collective

Le projet Epsyvin rassemble « les entreprises vitivinicoles et les entreprises connexes au champagne » de l’agglomération d’Épernay dans le but d’organiser « une démarche collective d’écologie industrielle ». L’amélioration de la compétitivité des entreprises, le développement de nouveaux modèles économiques, l’utilisation optimisée des ressources, la réduction de l’impact environnemental… et « l’excellence du champagne et de sa filière », sont en jeu, souligne le Comité Champagne, qui porte ce programme. 600 établissements situés dans 47 communes rurales viticoles et une vingtaine de zones d’activités sont concernés.

Le liège, de la dégustation à l’isolation

La Jeune chambre économique d’Épernay et l’Esat Les Ateliers de la Vallée, à Mardeuil, ont lancé en 2014 l’action « Bouchons-nous pour la planète », visant à sensibiliser les citoyens à la collecte, au tri et au recyclage des bouchons usagés. Mais la valorisation de ce liège jeté n’était pas aisée.

Avec l’arrivée d’Epsyvin, la « dynamique de collecte a été relancée », souligne Jean-Marie Mergem, directeur adjoint de l’Esat. L’établissement a aussi bénéficié de financements pour acquérir un broyeur : après séparation des parties métalliques éventuellement détectées, les bouchons récupérés auprès des professionnels – environ 40 t/an – sont réduits sous forme de broyat vendu en Bourgogne à 350 €/t, transport compris. Ce liège recyclé sera alors intégré à des assemblages de matériaux isolants. Les maisons et les vignerons sont incités à déposer leurs rebuts auprès de leurs fournisseurs. 13 bouchonniers et 6 distributeurs pratiquent la reprise des bouchons usagés lors des livraisons ou acceptent un apport à l’usine, et en magasin.

Recycler les glassines, ces supports souvent ignorés

Les Américains d’Avery Dennison, spécialistes des produits autoadhésifs, ont estimé que les glassines généraient 43 000 t de déchets chaque année en France, dont seulement 5 % sont recyclés. L’entreprise s’est fixée comme objectif d’en recycler 70 % d’ici 2025. « La Champagne a été choisie en 2017 comme zone pilote pour la promotion de son programme de recyclage », rappelle Avery Dennison. Les grandes maisons et les coopératives ont été abordées en priorité. Les imprimeries sont elles aussi sensibilisées à cet enjeu. Depuis l’été 2018, Autajon, Billet et Effervescence, partenaires d’Avery Dennison, proposent de récupérer gratuitement auprès des vignerons leurs glassines en vue de les stocker, avant une valorisation finale des fibres pour la production de papier recyclé, racheté par l’entreprise américaine. 95 % du déchet est réutilisé, et les 5 % restants font l’objet d’études complémentaires pour atteindre cet objectif « d’économie circulaire ».

Guillaume Perrin

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