Vins AOC : les élus viticoles ont pris leurs responsabilités
« Il faut saluer la responsabilité des représentants professionnels dont les décisions vont conduire à une bonne maîtrise de la vendange plutôt qu'à une production excessive. Et à part quelques marginaux de Saône-et-Loire, globalement la baisse des rendements est quand même bien comprise», estime Philippe Mauguin, directeur de l'Inao, revenant pour Les Marchés sur la décision prise jeudi dernier par le comité national vin et eaux-de-vie de réduire significativement les rendements des appellations d'origine par rapport à 2004 (lire LM du 12 septembre). Cette décision politique a été fortement poussée par le ministère de l'Agriculture comme le confirme le communiqué émis dès le lendemain par la rue de Varenne. « Répondant à l'appel de Dominique Bussereau, toutes les régions viticoles ont contribué à cet effort partagé afin de diminuer les excédents actuels sur le marché des AOC et d'améliorer les conditions de déroulement de la campagne 2005», écrit le ministère. Et c'est bien ce que reprochent les 150 vignerons qui ont saccagé le bureau régional de l'Inao de Mâcon, jeudi dans la soirée. Le centre a porté plainte dès le lendemain et Philippe Mauguin s'étonne de cette réaction excessive : « c'est quand même très paradoxal qu'il y ait eu des réactions à Mâcon alors que la baisse a été très modérée sur une zone qui compte parmi les rendements les plus élevés de France et qui a des surstocks». En Mâcon blanc, les rendements ont été baissés de seulement 2 hl (à 70 hl/ha contre 72 l'an passé), en Mâcon rouge le rendement est en retrait de 3 hl (63 contre 60 hl/ha en 2004), contre -5 hl dans le Muscadet, - 6 hl en Alsace, -6 hl en Gaillac et - 5 hl en Beaujolais et Beaujolais village.
Renforcement des contrôles
Globalement le comité vins et eaux-de-vie de l'Inao a décidé de se rapprocher des rendements de base définis dans les décrets d'appellation, voire passer en dessous dans certains cas. « Dans les appellations régionales, quand on a un rendement décalé par rapport au marché, cela entraîne des surstocks, une durée de vie trop longue et une dégradation de la qualité. Et quand on a des vins d'appellations bradés à des prix de vins de table, ça dégrade la notoriété des appellations », justifie Philippe Mauguin.
En Côtes du Rhône, alors que le rendement de base est de 51 hl/ha, le rendement pour le millésime 2005 a été fixé à 45 hl contre 48 l'an passé. Pour les appellations Bordeaux où le rendement de base est à 55 hl/ha, le rendement pour le millésime 2005 a été fixé à 54 hl contre 58 l'an passé (la profession souhaitait 55). Cet effort demandé à un bassin qui a peu souscrit à la distillation de crise devrait réduire de 115 000 hl la quantité commercialisée en rouge par rapport à 2004, alors que le surstock est estimé à 900 000 hl. Dans l'ensemble, l'Inao estime que les mesures prises sur les rendements devraient abaisser de 1 à 1,5 M hl le volume d'appellations commercialisé cette année par rapport à l’an passé.
Pour éviter le développement d'un marché parallèle d'appellations au-delà des rendements autorisés, l'Inao a d'ores et déjà demandé aux services des fraudes et aux douanes de renforcer les contrôles. Pour les appellations dont le rendement a été fixé en dessous du rendement de base, un volume substituable individuel (VSI) pourra en outre être accordé à condition qu'un volume équivalent de la récolte précédente soit détruit. Ce VSI est par exemple de 6 hl/ha en Côtes du Rhône. Enfin, l'Inao propose qu'un volume de 5 hl/ha de dépassement soit autorisé à Bordeaux notamment pour faire du moût concentré rectifié.