Viande biologique : des profils de consommateurs disparates
49 % de consommateurs exclusifs convaincus
La moitié des consommateurs de viande bio est constituée d’exclusifs convaincus. Ils se caractérisent par un fort attachement aux produits bio, qu’ils consommaient déjà bien avant la première crise ESB en 1996. Ils ont tendance à les idéaliser. Ainsi, en terme de motivation, ces individus vont évoquer l’aspect gustatif et leur santé, mais aussi le respect de l’environnement, des animaux, des hommes et de la tradition. Ils ont une perception négative de la viande en général, qui selon eux, peut même être néfaste pour la santé. Toute la viande qu’ils achètent est bio, mais ils en consomment en faible quantité, seulement une à trois fois par mois. Leur perception des produits industriels et de la technologie est négative. On peut les qualifier de « Néophobes ». Ils sont caractérisés par un fort engagement écologique et adoptent plutôt une position de protection envers la nature. Pour eux, les animaux sont égaux aux hommes. On peut parler d’anthropomorphisation des animaux. Ces individus sont à la recherche d’une certaine proximité en ce qui concerne les circuits d’information et de distribution. Ils achètent principalement la viande bio en vente directe et rejettent fortement l’achat en grandes surfaces. De la même façon, ils se réfèrent plus amplement aux informations locales et à ce que leur dit le producteur plutôt qu’aux étiquettes. Ce sont plutôt des « sarcophages », de ce fait, ils préfèrent la viande blanche, qui est neutre, à la viande rouge, qui fait référence, par sa couleur, à l’animal et surtout à sa mort. Ils rejettent certains morceaux qui rappellent trop l’animal (têtes, abats…). La mort animale leur pose problème et rend la consommation de viande angoissante, ils ne peuvent en aucun cas manger un animal qu’on a tué devant eux et encore moins tuer un animal pour le manger. Ce sont plutôt des individus aisés. Selon eux, le prix de la viande biologique est très bien comme il est. Ils sont d’origine urbaine, âgés de 35 à 44 ans et sont caractérisés par un niveau d’étude élevé (bac +4 et plus). Ils sont très impliqués dans la société que ce soit au niveau associatif, religieux (pratiquants) ou politique (militants).
19 % de consommateurs occasionnels méfiants
Autre profil, les consommateurs occasionnels méfiants (19 %), qui se positionne à l’opposé du premier. Ils ne développent aucune motivation particulière et sont très méfiants à l’égard de la qualité de la viande bio. Pour eux, elle n’est pas meilleure d’un point de vue sanitaire ou gustatif et n’est pas plus respectueuse de l’environnement, des animaux, ou même des hommes. Ces individus ont un faible attachement au bio, de plus, ce sont plutôt des consommateurs récents. Ainsi, ils ont tendance à ne pas consommer d’autres produits bio et se contentent juste de la viande qu’ils consomment depuis la seconde crise de la vache folle en 2000.
Ils ont une perception positive de la viande et en consomment en grandes quantités (à tous les repas ou 1 fois par jour) mais seulement moins de 25 % de la viande qu’ils consomment est bio. On peut les qualifier de Néophiles, car ils ont une perception positive des produits industriels et de la technologie et une perception négative de la tradition. Ils adoptent une position par rapport à la nature plus dominante, pour eux, il faut la gérer voire même la maîtriser. Idem pour ce qui est des animaux qu’ils considèrent comme inférieurs aux hommes. Ils ne sont engagés dans aucune association écologique.
En ce qui concerne les circuits de distribution et d’information, ces consommateurs privilégient les circuits plutôt longs. Ils achètent leur viande bio en grandes surfaces et accordent plus amplement leur confiance aux informations d’origine européenne ou même mondiale, aux étiquettes et aux organismes de contrôle. Ce sont plutôt des zoophages, de ce fait, ils marquent une nette préférence pour la viande rouge, qui symbolise l’animal et ils rejettent les viandes blanches. Pour ces individus, la viande est synonyme de vie, ainsi, la mort de l’animal ne les gêne pas, ils peuvent manger un animal qu’on a tué devant eux ou qu’ils ont tué eux-mêmes.
Ce sont plutôt des individus aisés d’origine rurale, âgés de 45 à 54 ans. Ils vivent le plus souvent en couple avec des enfants. Ils se caractérisent par une implication dans la société très faible voire nulle, que ce soit au niveau associatif, religieux ou politique. Ils ont tendance à percevoir la viande bio comme beaucoup trop chère.
32 % de consommateurs moyens, inquiets pour leur santé
Un tiers de l’ensemble est constitué de consommateurs moyens, inquiets pour leur santé. Ces individus consomment de la viande bio essentiellement pour ses effets supposés bénéfiques sur la santé. Elle est perçue comme meilleure d’un point de vue nutritionnel et plus sûr par rapport aux risques d’intoxication. Ces individus sont très sensibles aux crises alimentaires et c’est en réaction à la seconde crise ESB, qu’ils ont commencé à consommer de la viande bio.
Ils ont une perception positive de la viande, qui selon eux, est indispensable pour un bon équilibre alimentaire. Ce sont des consommateurs moyens de viande, ils en consomment 1 à 2 fois par semaine. En revanche, la part de viande bio est très faible, moins de 25 % du total consommé. Ils ont un attachement moyen aux produits bio. Ils consomment en plus de la viande, d’autres produits biologiques, mais depuis moins de 4 ans. Le respect de l’environnement et des animaux n’arrivent quand deuxième et troisième position dans leurs motivations. Ces individus sont préoccupés par l’aspect écologique, mais de façon bien moins marquée que pour les consommateurs fidèles et ils ont tendance à rejeter toute appartenance à une associative écologique. On peut les qualifier de « néophobes », car ils ont une perception négative de la technologie. Ils n’adoptent pas pour autant de position particulière à l’égard de la tradition.
En ce qui concerne les circuits de distribution, ces consommateurs sont très méfiants, ils disent ne faire vraiment confiance à aucun des distributeurs et rejettent fortement les circuits d’approvisionnement courts (vente directe) et longs (grandes surfaces). Leur approvisionnement se ferait plus amplement dans les magasins spécialisés. En ce qui concerne le meurtre alimentaire, ils adoptent plutôt une position intermédiaire entre la « sarcophagie » et la « zoophagie ». L’image de l’animal les gêne lorsqu’ils consomment de la viande, mais de façon bien moins marquée que pour les consommateurs convaincus. Pour ce qui est de la mort animale, celle-ci ne les dérange pas tant qu’elle est perpétrée par les autres. Ce qui les différencie des consommateurs occasionnels méfiants, c’est le passage à l’acte, ils ne peuvent pas tuer eux-mêmes un animal pour le manger mais ils peuvent manger un animal qu’on a tué devant eux.
Ce sont plutôt des célibataires urbains, âgés de 25 à 34 ans, d’origine sociale modeste. Ils considèrent le prix de la viande biologique comme trop élevé, ce qui limite leur consommation. Ces individus rejettent toute appartenance associative, religieuse ou politique.