Salomon et Angélique
Le ministre de l’Économie a encore une fois réussi son coup. Les mesures qu’il a proposées à l’issue de la table ronde sur les prix ont été accueillies avec enthousiasme par la distribution, optimisme par les industriels et sans réticence affichée de la part du commerce de proximité. Une vraie performance. Il faut dire que les propositions de Bercy ont de quoi satisfaire la majorité : la baisse des prix des grandes marques, sur laquelle tout le monde s’accorde ; la simplification des possibilités d’extension des grandes surfaces, que les GMS réclamaient à cors et à cris ; le plafonnement des marges arrière, auxquels applaudissent les industriels, surtout les plus modestes. L’arbitrage opéré par Nicolas Sarkozy -répartir la baisse des prix à 50 %/50% entre distributeurs et grandes marques- a même été comparé à un « jugement de Salomon ». C’est flatteur, même si l’on ne peut s’empêcher de rappeler que cet épisode biblique a bien failli mal tourner. Attendons donc, avant de juger, de voir comment les participants vont pouvoir régler -en 15 jours !- des dispositions techniques alambiquées. Qui, en particulier, jugera que les mètres linéaires nouveaux ont bien été réservés « aux PME et aux produits régionaux », qu’il faudrait d’abord définir ? A voir la trouille que nombre de fournisseurs éprouvent encore lorsqu’il s’agit de décrire la nature de leurs différends avec les GMS, on doute de les voir jamais réclamer leur dû. Il leur faudrait pour cela s’inspirer du courage affiché par la présidente des producteurs de légumes. Cette semaine, la bien nommée Angélique Delahaye fut la seule chef d’entreprise à oser publiquement pourfendre, tel Saint Michel le dragon, des pratiques commerciales indignes dont d’autres PME préfèrent souffrir en silence.