Cornichons, si vous saviez…
Je suis touché de plein fouet par ce titre des Marchés du 22 octobre annonçant la fin des cornichons d’Appoigny, dans l’Yonne. J’ai grandi dans ce village, à côté de l’usine qui était alors celle de la marque Grey-Poupon. Certes, en saison, les remugles de vinaigre n’étaient pas très agréables, mais la cueillette des cornichons et leur traitement à l’usine drainaient des dizaines de jeunes filles venues des environs. Le conserveur leur procurait un emploi saisonnier et nous autres, jeunes coqs du village, des amourettes qui ne l’étaient pas moins. Dans mon souvenir, tout le monde y trouvait son compte, et les godelureaux des villages voisins nous enviaient cet exceptionnel déséquilibre de la population locale. Je ne sais pas si avec des cornichons polonais, malgaches ou indiens, les sorties d’usines auront autant de vivacité et d’œillades, et si l’odeur du vinaigre sur la peau des filles aura toujours le même effet sur les jeunes gens. J’ai bien peur que oui : je ne me lamente en ce moment que sur le petit cornichon que j’étais alors, et que je serais bien resté…