Tropicaux

Peruzzo veut fédérer l’avocat de Sicile

Lancée en 2019 avec le melon puis la clémentine de Calabre, la marque Bo & Bon** du groupe Peruzzo* s’est élargie à de nombreux fruits et légumes. Ce sont désormais 12 références distribuées en GMS (melons, tomates, courgettes, aubergines, raisins, abricots, pêches, citrons, oranges, clémentines, pommes de terre et cerises). Dès cet automne, elle en comptera trois de plus : pommes, poires et avocats. Pour FLD, Tony Saglietto, directeur du groupe, revient sur les ambitions de Peruzzo pour l’avocat.

*Le groupe Peruzzo, basé à Chateaurenard, s’est spécialisé à la base dans l’import et la distribution de produits italiens sur le marché français.

**Qu’est-ce que le label Bo & Bon garantit ? Des f&l cueillis à maturité, riches en sucre, de saison, d’une « qualité gustative supérieure à coût accessible » ; des emballages carton / bois / barquettes éco-responsables ; des méthodes de production optimisées (raisonnée, bio) et des circuits courts.

Peruzzo propose déjà, de manière confidentielle, depuis deux ans, l’avocat de Sicile de ses producteurs partenaires (zone de Palerme). Deux producteurs partenaires ont actuellement 20 ha en production. Une trentaine de tonnes (« 4 à 5 palettes par semaine sur trois mois ») ont été commercialisées la saison dernière vers les grossistes français clients de Peruzzo. Pour cette saison, les conditions ayant été bonnes, le groupe Peruzzo s’attend à 50 t et commercialisera donc sur son réseau GMS.

Peruzzo veut aller plus loin et développer ce produit. Outre un partenariat commercial avec un producteur corse, Perruzo veut développer la Sicile :

• en propre (zone de Scoglitti, au sud de l’île) ;
• avec des partenariats avec les producteurs siciliens de la zone de Palerme.

Revendiquer une bonne image de l’avocat

Il est vrai que dans un contexte de changement climatique et de forte appétence des consommateurs pour ce produit, l’intérêt de cette culture n’est plus à démontrer [Lire aussi le dossier Exotiques de FLD MAG de décembre 2021].

« Le potentiel économique de cette culture pour le producteur et pour le consommateur est certain. L’avocat est encore bien valorisé, entre un coût à produire autour de 0,80 € et des prix grossiste ou GMS à 3-4 €/kg », estime Tony Saglietto.

Côté consommateur, il a une très bonne image nutritionnelle et bien-être. En revanche, aujourd’hui l’offre est encore principalement importée du Pérou en contre-saison ou d’origine Espagne, ce qui ne satisfait pas le consommateur. « L’image de l’avocat est desservie par les problématiques d’eau et de bilan carbone. Nous, nous arrivons sur le marché avec un produit cultivé en Sicile, donc plus proche. Et nous n’avons pas de problème d’eau car nous sommes implantés à côté d’une rivière qui se jette deux kilomètres plus loin dans la mer », précise le directeur du groupe.

Attentes de la GMS : se démarquer avec un avocat bio dont le sourcing est maîtrisé de A à Z

Peruzzo proposera l’avocat de Sicile (le sien et celui de ses producteurs partenaires) sous sa marque Bo&Bon. Cultivé totalement en bio, il sera commercialisé autant que faire se peut sous ce label.

Le marché de l’avocat, en pleine croissance, attire toujours plus d’acteurs. Pour autant Tony Saglietto ne doute pas de réussir à s’implanter en GMS. « On maîtrise toute la chaîne, ce qui facilite la mise en place de programmes de promotion, ce genre de chose. Et surtout, nos clients ont une appétence pour l’origine sicilienne plutôt qu’espagnole. » En fruits et légumes, la GMS française plébiscite ainsi en priorité l’origine France (donc corse) puis italienne (donc sicilienne). L’Espagne et le Maroc ne viennent qu’après.

A priori, l’avocat Bo&Bon sera commercialisé en barquette carton recyclable. « Les volumes étant limités, dans un premier temps il s’agira d’une nouvelle référence en rayon plutôt que d’un remplacement de l’origine Espagne, il faut donc le distinguer du vrac cœur de gamme. »

Tester une nouvelle culture dans un contexte de changement climatique

Conscient des enjeux de changement climatique, Tony Saglietto analyse : « Les climats européens sont en train de changer. On le voit bien en Sicile où nous sommes déjà bien implantés avec les agrumes et le raisin. Nous passons d’un climat méditerranéen à un climat tropical, à deux saisons -sèche et humide- qui se prête bien à des cultures comme l’avocat, la mangue, le fruit de la passion… »

En Corse, le groupe producteur les Domaines de la Taste s’étendent sur 110 ha dans la plaine orientale de Pianiccia. Leurs clémentines et pomelos étaient déjà en partie commercialisées par le Groupe Peruzzo. « En 2019, ils ont planté une vingtaine d’avocatiers pour tester cette culture. C’est donc naturellement que nous nous sommes associés à leur projet pour la commercialisation. »

En Sicile, via son entreprise agricole l’Agricola Peruzzo, Peruzzo a planté en septembre 2020 une dizaine d’hectares dans la zone de Scoglitti (sud de la Sicile). Les premiers avocats pour la commercialisation devraient être disponibles fin 2024. Il s’agit de Hass majoritairement (70%), « le reste étant du Maluna, une variété qui ressemble au Hass mais avec des fruits légèrement plus gros, ce qui permet un rendement à l’hectare plus important, et avec une tolérance à certaines maladies comme le phytophthora ».

A date, le bilan semble satisfaisant, selon Tony Saglietto : « Nous sommes dans la deuxième année, les arbres se portent bien. Nous avons de bonnes terres, assez humides mais sans eaux stagnantes, et nous sommes dans une zone sans épisodes de gel. »

Les ambitions de Peruzzo : fédérer une filière sicilienne Avocat…

Pour conclure, quels sont les objectifs de Peruzzo pour l’avocat ? Alors qu’en kiwi, le groupe a basé sa stratégie sur le développement de la production en propre, l’avocat en propre, lui, devrait rester limité et « servir de vitrine » pour « montrer aux producteurs siciliens que ça fonctionne et les pousser à se lancer ». Car la réelle ambition pour Peruzzo est de fédérer une filière naissance sicilienne pour être plus fort sur le marché français face à l’Espagne.

« Ça fait déjà 7 ans que de nos partenaires siciliens sont dans l’avocat, ils ont prouvé que la zone de Palerme fonctionne. Nous testons la zone de Scoglitti. Nous voulons trouver le bon itinéraire technique adapté au climat. Si ça fonctionne, nous voulons accompagner les producteurs siciliens -avec des aides techniques voire financières à la plantation- pour qu’ils se lancent dans l’avocat. Et nous Peruzzo, avons l’ambition de fédérer l’offre de ces producteurs siciliens pour la commercialiser sur le marché français, et ceci afin d’être plus forts face à l’offre espagnole, qui est bien établie avec des marques fortes. Il me semble que De La Taste à la même ambition pour la production corse. »

…Vers un avocat origine France ? Un test sous serre photovoltaïque

Et pour voir si l’origine France serait développable, Peruzzo prévoit de tester l’avocat sous serre photovoltaïque l’année prochaine. Pour le kiwi, une serre photovoltaïque de 2,5 ha devrait voir le jour (a priori dans la région de Chateaurenard) et une petite surface sera réservée au test de la culture d’avocat. La mangue et le fruit de la passion sont aussi au programme. « Ce sont des tropicaux présentant la plus grande consommation donc le plus grand potentiel, les plus “faciles” et qui nous plaisent à produire », confirme Tony Saglietto.  

Et pour l’origine sicilienne, d’ores et déjà 3 000 m2 sous serre pleine terre de manguiers sont en test en propre en Sicile ; et les fruits de la passion le seront « dès que j’aurai trouvé la bonne variété ».