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À la reconquête de l’engraissement des chevreaux

Après trois années d’essais et d’échanges pour une meilleure valorisation de la viande de chevreau, le projet ValCabri a présenté l’ensemble de ses résultats lors d’un séminaire final.

Lancé en janvier 2019, le projet ValCabri a permis de capitaliser de nombreuses références allant de l’itinéraire d’engraissement des chevreaux jusqu’à la découpe de la viande. Le séminaire final de ce programme conduit sur trois ans s’est tenu le 25 octobre à Paris, en présence des acteurs de la filière et d’éleveurs acquis ou curieux.

Les éleveurs doivent se réapproprier le devenir des chevreaux, en filière longue comme en circuit court

« En France, la production de viande caprine est considérée comme un coproduit du lait de chèvre, a rappelé en introduction Franck Moreau, administrateur de la Fnec et président de la section caprine d’Interbev. De nombreux éleveurs rencontrent des difficultés pour valoriser leurs chevreaux, faute d’organisation du ramassage et de l’abattage. Les attentes techniques, économiques et sociétales sont fortes. »

Travail sur les conformations avec des croisements

« Les éleveurs doivent se réapproprier le devenir des chevreaux, a-t-il souligné. En perturbant le fonctionnement de la filière, la période covid a mis en exergue la fragilité de la filière chevreaux, avec une situation de plus en plus difficile dans les équilibres économiques. » Et malgré le retour à la normale des marchés, le prix du petit chevreau n’a pas évolué au cours des derniers mois, le prix d’achat étant affecté par la forte hausse du prix de la poudre de lait.

La Fnec, l’Institut de l’élevage, Inrae, Capgènes, Cap’Pradel ont travaillé autour de quatre actions techniques : comparaison des types génétiques pour la production de viande de chevreaux ; organisation des itinéraires techniques d’engraissement ; développement de l’offre en viande à destination des consommateurs ; intérêt économique de la valorisation des chevreaux en ferme. Les résultats complets seront présentés dans le dossier du prochain numéro de la revue.

La présence d’abattoirs de proximité, frein majeur

Plusieurs réunions avec des éleveurs engraissant ou non à la ferme ont été organisées en début de projet afin d’identifier leurs motivations et freins. Au sein de la population des éleveurs engraisseurs, certains vendent à l’un des trois abatteurs spécialisés, on parle alors de filière longue, d’autres vont jusqu’à la commercialisation de leurs chevreaux en vente directe, en circuit court.

Parmi les motivations citées, on retrouve la meilleure valorisation, l’éthique, l’utilisation du lait non commercialisable et d’atouts tels qu’un bâtiment, de la main-d’œuvre disponible et un abattoir à proximité. L’amortissement d’un bâtiment chevrette ou l’atteinte d’un effectif suffisant pour faire fonctionner une louve font partie des arguments en faveur de l’engraissement à la ferme. Parfois aussi, les éleveurs n’ont pas d’autres solutions pour valoriser les chevreaux. Les producteurs fermiers ont également mentionné des motivations spécifiques, telles que la diversification de gamme, répondre à la demande de leurs clients et dans certains cas, une solution de report de lait au pic de lactation.

Place en bâtiment et main-d’œuvre disponible

Côté freins, la logistique est le plus importante. L’absence d’abattoirs de proximité et d’ateliers de découpe est très limitante. La rentabilité est aussi mise en avant. « En circuit court, on a en effet des éleveurs qui vendent à un prix qu’ils jugent acceptable pour le consommateur, au détriment de la rentabilité de l’activité, et d’autres qui calculent leur prix de revient et parviennent à commercialiser à un prix élevé », explique Nicole Bossis du service économie de l’Idele. Le manque de place en bâtiment et de main-d’œuvre est également ressorti de ces entretiens, ainsi que le risque sanitaire.

Le volet abattage est revenu très souvent dans les échanges au cours de la journée, avec la nécessité de pérenniser et développer l’offre dans les abattoirs de proximité. « À partir de 80 km de l’abattoir, on change de législation sur le transport des animaux. Et si l’abattoir et l’atelier de découpe sont à deux endroits différents, cela grève fortement la rentabilité entre le temps de transport et le carburant. Il existe des partenariats entre abattoir et atelier, avec des navettes collectives. Il faut construire des initiatives à l’échelle régionale, encourage Jean-Philippe Bonnefoy, éleveur en Bourgogne. La moitié des éleveurs caprins sont producteurs fermiers, au contact de la clientèle. On bute vraiment sur la partie abattage. »

Importance du dialogue à l’échelle locale

Pour faire avancer ce volet, le travail de recensement des besoins à l’échelle locale est primordial : répertorier la demande, mettre en relation, donner de la visibilité, organiser les plannings avec les prestataires. Ces derniers ont des règles strictes à appliquer, notamment sur la contention, avec des outils spécifiques.

Le travail mené par Interbev dans le cadre du plan de filière rejoint celui réalisé dans le projet ValCabri. « La filière chevreau a l’ambition d’une filière structurée diversifiée et qualitative, a présenté François Frette d’Interbev. Le développement de l’engraissement à la ferme, en circuit long ou court, avec des chevreaux lourds et une reconnaissance qualitative comme c’est le cas avec le travail sur le chevreau label Rouge lancé en Région Aura, est une voie de valorisation intéressante et complémentaire. » Quatre actions clés vont être réalisées en 2023 pour un budget de 102 000 euros : le déploiement de la charte de bonnes pratiques en élevage, transport et engraissement ; l’incitation à l’engraissement à la ferme ; le développement des prestataires d’abattage-découpe pour les chevreaux ; une étude sur les acheteurs de viande caprine de moins de 50 ans.

De nouveaux essais vont être conduits dans les mois à venir dans le cadre du projet Pepit Top Cabri, dans l’objectif d’appuyer la création d’une filière chevreau label Rouge. Ils viendront enrichir les références acquises grâce au programme Casdar ValCabri.

Reste maintenant à convaincre les éleveurs de franchir le pas et à recruter de nouveaux consommateurs.

Coté web

Toutes les fiches réalisées dans le cadre du programme Casdar ValCabri sont à retrouver sur idele.fr/valcabri et quatre webinaires sont proposés en janvier, abordant les étapes clefs et les résultats du projet ValCabri. Renseignements et inscription sur idele.fr.

Une viande de qualité

Des analyses ont été réalisées sur la noix des côtes filets de 70 chevreaux issus des essais d’engraissement conduit dans le cadre du projet ValCabri. Elles fournissent des informations sur la qualité nutritionnelle du chevreau français.

Riche en protéines, la noix de côtelette est particulièrement maigre. Elle est une importante source de vitamine B12 et de zinc. Ses apports en fer et sélénium sont également intéressants. Ses bénéfices pour la santé varient en fonction du type de chevreau et de son alimentation. 100 g de viande de chevreau couvrent ainsi 41 % des apports quotidiens de référence en protéines, et 36 % des apports en vitamine B12 ainsi que du fer sous sa forme la plus assimilable. Ils fournissent un quart des apports de référence en zinc et 12 % des apports en sélénium.

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