« Nous confions nos brebis laitières à un éleveur-berger en estive en Savoie »
Au Gaec Bergerie des 2 Savoie, à Flumet (Savoie), Amélina Mattel et Nicolas Rechon-Reguet ont su établir une répartition des tâches claire et efficace : elle supervise la transformation et la vente, lui gère l’élevage et l’affinage. Quant au troupeau en alpage, un éleveur-berger s’en charge pendant l’estive.
Au Gaec Bergerie des 2 Savoie, à Flumet (Savoie), Amélina Mattel et Nicolas Rechon-Reguet ont su établir une répartition des tâches claire et efficace : elle supervise la transformation et la vente, lui gère l’élevage et l’affinage. Quant au troupeau en alpage, un éleveur-berger s’en charge pendant l’estive.


Après une licence professionnelle en produits laitiers, Amélina Mattel commence sa carrière dans un grand groupe laitier en Normandie. Mais l’univers industriel ne lui correspond pas. Originaire des Contamines-Montjoie, en Haute-Savoie, et fille d’agriculteurs, elle choisit de revenir à un modèle plus en phase avec ses valeurs.
Elle rejoint alors la coopérative de Flumet, en Savoie, où elle contribue au lancement d’une gamme de produits frais entre 2014 et 2016. C’est là qu’elle rencontre Nicolas Rechon-Reguet, fromager depuis dix ans dans la structure.
Retour aux sources et ancrage local
En 2017, Amélina Mattel et Nicolas Rechon-Reguet s’installent ensemble à Flumet et créent le Gaec Bergerie des 2 Savoie. Une bergerie, un atelier de transformation et un magasin de vente directe sortent de terre.
L’exploitation repose sur 18 hectares en grande partie hérités de la famille de Nicolas, utilisés pour la fauche et le pâturage des brebis restant sur site toute l’année. Ils disposent également de 150 hectares d’alpage pour l’autre moitié du troupeau. L’alimentation des brebis en hiver est assurée par des fourrages de qualité, avec une autonomie en foin limitée à 30 %, le reste étant complété par l'achat de foin de Crau et de luzerne.
Du lait toute l’année

Le troupeau, essentiellement en race lacaune, se compose de 160 brebis laitières et le renouvellement est assuré par l’achat d’une trentaine d’agnelles chaque année. Des béliers de race bouchère sont utilisés pour valoriser les agneaux, vendus à un engraisseur en Seine-et-Marne.
La gestion du troupeau repose sur une planification rigoureuse des cycles de reproduction et de lactation. La moitié des brebis met bas en automne et est tarie en été, tandis que les 80 autres mettent bas au printemps, garantissant ainsi une production de lait toute l’année.
Trois associés, un saisonnier pour l’estive
Avec une production de lait continue et une vente en direct tout au long de l’année, il faut maintenir la cadence. Pour y parvenir, les tâches sont judicieusement réparties : Amélina supervise la transformation et la vente, épaulée par sa mère, également associée du Gaec, tandis que Nicolas se charge de l’élevage, de la fabrication des tommes et de leur affinage en cave.

Cette organisation bien huilée devient cruciale lors des périodes de pointe, notamment au printemps, lorsque les cycles de lactation se chevauchent. « Au pic de production, avec près de 160 brebis en lactation, nous fabriquons de la tomme tous les jours, que nous vendons en été et en automne, quand la production de lait est plus faible », précise Nicolas.
"Un berger autonome et de confiance est indispensable dans notre système"
À cette organisation déjà bien remplie s’ajoute une charge administrative croissante, chronophage et souvent décourageante. En optimisant l’organisation de leur travail, le couple assure des rentrées d’argent régulières, indispensables pour rembourser les investissements réalisés lors de leur installation.
Un éleveur-berger pour gérer l’alpage
Depuis 2018, le lot de brebis qui met bas à l’automne est conduit en alpage dans la réserve naturelle des Contamines-Montjoie. Le site présente plusieurs contraintes : altitude élevée, enneigement tardif et surtout une forte pression touristique – jusqu’à 60 000 passages annuels sur le Tour du Mont-Blanc et le double certains week-ends autour des lacs Jovet, où pâture le troupeau. L’alpage, qui s’étend sur 150 hectares, exige une gestion fine du pâturage et le choix du berger s’avère donc déterminant.

« Nous avions embauché plusieurs salariés pour l’estive, en gérant aussi des brebis en pension l’été, mais chaque année était une nouvelle expérience, avec son lot d’aléas », témoigne Amélina Mattel.
En 2022, les éleveurs trouvent un équilibre durable et un vrai confort de travail en recrutant, via les réseaux sociaux, un éleveur-berger expérimenté originaire du Vaucluse. Celui-ci assure la garde de ses 400 brebis allaitantes en parallèle de la petite centaine de brebis lacaune du Gaec. Un arrangement gagnant-gagnant : en contrepartie, la pension de ses propres animaux et leur transport jusqu'à l'alpage sont pris en charge.
Une embauche saisonnière que le couple considère comme indispensable. « L’été, le travail en fromagerie est très soutenu, avec beaucoup de produits à sortir et de marchés à faire en plus de l’accueil de vacanciers sur la ferme par le biais de visite. Il nous fallait quelqu’un de pleinement autonome, en qui nous pouvions avoir toute confiance », ajoute-t-elle.
Une gamme diversifiée et une qualité reconnue

Sur place, le lait est transformé en yaourts, fromages lactiques et tommes, tandis que les brebis réformées sont valorisées en saucissons et merguez. Les produits de la ferme sont principalement commercialisés en circuit court, 50% via le magasin de la ferme, le reste sur les marchés et dans les magasins de coopératives.
La stratégie de vente repose sur une offre diversifiée et une présence continue pour fidéliser la clientèle tout au long de l’année. Souvent récompensés lors de concours départementaux, leurs produits ont même reçu plusieurs médailles au Concours général agricole du Salon de l'agriculture depuis 2019.
Chiffres clés
160 brebis laitières (lacaune et Thônes et Marthod)
168 ha de SAU (dont 150 ha d’alpage)
3,3 UTH (3 associés et un saisonnier)
45 000 l de lait par an