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Faire vivre ses parts sociales de coopératives

Que sont devenues les parts sociales initialement souscrites dans votre coopérative au début de votre activité ? Bien souvent, on n’y prête plus attention et on oublie leur utilité et leur valeur.

Le montant de la part sociale souscrite dépend du volume de grains que l'agriculteur livre à la coopérative.
© L. Debuire

La souscription de parts sociales d’activité représente la porte d’entrée dans la coopérative, explique Romain Dassat, auditeur de coopératives au cabinet Exco FSO(1). Chaque agriculteur travaillant avec sa coop, s’engage à livrer un volume de sa production et doit détenir des parts sociales proportionnelles à cette activité. » Le montant des parts sociales dépend des statuts de la coopérative. « Pour que le statut légal de la part sociale soit validé, il est indispensable que son montant soit proportionnel à l’activité de l’agriculteur, précise Lionel Lavocat, consultant agricole au cabinet Exco FSO. Dans certaines coopératives céréalières, l’activité d’un adhérent est ainsi déterminée en effectuant la moyenne de ses livraisons de grains sur les trois dernières années. » La durée de l’engagement varie selon les coopératives. En général, elle n’excède pas les sept ans. L'engagement est ensuite reconduit tacitement pour cinq ans maximum. En contrepartie, la coopérative s’engage à commercialiser la totalité des produits livrés par le coopérateur en obtenant la meilleure valorisation possible, quelle que soit la qualité.

Sécuriser les activités de l'agriculteur et de la coopérative

Les parts sociales caractérisent le fonctionnement des coopératives. Elles permettent à ces entreprises d’avoir un capital garanti et d’investir en ayant davantage de sécurité. « En souscrivant des parts sociales d’activité, l’agriculteur devient associé à la coopérative, explique Muriel Tina, juriste adjointe à la direction des affaires juridiques et fiscales chez Coop de France. En plus de l’engagement de travailler ensemble, ce qui sécurise leurs activités respectives, l’agriculteur s’engage à utiliser les services et à acheter les intrants que propose la coopérative à la hauteur de son activité. » L’engagement peut être total ou partiel, tout dépend de ce que permettent les statuts de la coop et de ce que désire l’agriculteur. Si un adhérent ne respecte pas son engagement, il peut être obligé de payer des pénalités. « Selon les décisions du conseil d’administration, l’agriculteur va devoir rembourser les charges fixes proportionnelles au volume qu'il aurait dû livrer, signale la juriste. Ces pénalités sont appliquées afin de ne pas pénaliser les autres adhérents en leur faisant payer ces charges. » Toutefois, selon les statuts des coopératives, un agriculteur peut travailler avec une coopérative en tant que tiers, sans être adhérent donc. Les conditions de vente des productions ne seront pas les mêmes. L’activité d'une coopérative avec des tiers ne doit pas dépasser 20 % de son activité totale. « Cela lui permet d’avoir davantage de souplesse et de complèter ses engagements afin de rentabiliser au maximum ses investissements », ajoute Muriel Tina.

Une rémunération pas toujours au rendez-vous

Selon le résultat de la coopérative et la décision de l'assemblée générale, le bénéfice peut être réinvesti dans l’entreprise ou distribué aux adhérents sous forme d’intérêts aux parts. Le taux de rémunération est proposé par le conseil d’administration. Il est tout de même plafonné par la Loi Sapin 2 et revu tous les six mois. En 2017, le taux maximal était de 3,22 %. Ces intérêts aux parts passent souvent inaperçus car ils peuvent être versés sous forme de ristournes selon le volume livré. On retrouve leur montant sur la facture envoyée à l’adhérent lorsque la vente est réalisée. « Il arrive que ces dividendes soient utilisées pour souscrire de nouvelles parts sociales, dites d’épargne, reconnaît Lionel Lavocat. L’agriculteur capitalise alors sans vraiment le vouloir, car c’est une décision collective de l'assemblée générale. » Posséder des parts sociales dans une coopérative permet toutefois à l’agriculteur de participer à la vie de celle-ci et donc d'influer sur ce type de décisions. «L’adhérent obtient ainsi un droit de regard et peut au besoin remettre en cause les choix du conseil d’administration, explique la juriste. Peu importe le montant des parts, lors de l’assemblée générale, un homme équivaut à une voix. Malheureusement, on constate de moins en moins de participation à ces réunions. Or c’est un moment important dans une coopérative. On y décide notamment l’affectation du résultat. »

Des parts sociales transmissibles

Comme l’entrée d’un adhérent dans une coopérative, sa sortie est conditionnée par l'aval du conseil d’administration. Elle est possible au moment où l’engagement arrive à son terme. Il suffit d’envoyer un courrier avec accusé de réception au conseil d’administration, trois mois avant la fin de la période d'engagement. Celui-ci donne son accord ou non. « L’acceptation dépend du motif de départ mais aussi du capital engagé et des conséquences économiques pour la coopérative, précise Lionel Lavocat. Des pénalités peuvent être appliquées selon les statuts de la coopérative. Surtout si l’adhérent n’a pas respecté ses engagements. » En cas d’accord, le montant des parts sociales est rendu à l’agriculteur. Il équivaut à celui de l’achat, la valeur des parts étant considérée comme nominale. Attention, leur remboursement n’est pas immédiat : la coopérative a cinq ans pour redonner le capital social. Le conseil d’administration a d'ailleurs lui aussi un delai pour se prononcer. Il est bon de préciser qu’un départ n’implique pas un remboursement automatique, il faut en faire la démarche. Toutefois, « il faut relativiser, estime Romain Dassat. En règle générale, le montant de ce capital n’excède pas les 2 000 ou 3 000 euros ». En cas de cession d’exploitation, l’adhérent s’engage à proposer à son repreneur la transmission de ses parts sociales. Si ce dernier accepte, il rachète les parts sociales au cédant à la valeur nominale. S’il refuse, le cédant doit avertir sa coopérative de l’arrêt de son activité avec les conséquences vues précédemment. Pour les experts, une chose est sûre, il est important que l’agriculteur prenne bien connaissance des conditions d’adhésion à la coopérative, et aille jusqu’à regarder les statuts car c'est un vrai engagement.

(1) Exco FSO est un cabinet d’expertise, de comptabilité, d’audit et de conseil agricole. Des agences sont réparties sur tout le Sud-Ouest. Exco FSO est membre d’AgirAgri.

Un document unique pour davantage de transparence

« Les coopératives cherchent à améliorer la transparence avec leurs adhérents, constate Muriel Tina, juriste adjointe à la direction des affaires juridiques et fiscales chez Coop de France. Depuis 2014 et la Loi d'avenir, la réalisation et la diffusion d’un document unique est obligatoire. » Celui-ci donne ainsi accès aux informations telles que la durée et la nature de son engagement, la composition du capital social de la coopérative et les modalités de détermination du prix et des moyens de paiement du produit vendu. Avant, l’adhérent n’avait accès à ces informations que lors de la souscription de parts sociales. Certaines coopératives remettaient alors un bulletin d’engagement à l’adhérent.

Placer ses économies dans sa coop

Un agriculteur souhaitant capitaliser dans sa coopérative peut souscrire plus de parts sociales que celles à laquelle son activité lui donne droit. Elles peuvent être vues comme un placement. Le conseil d’administration peut également choisir de capitaliser les intérêts aux parts en créant de nouvelles parts sociales. Elles ne sont donc plus en lien avec l’activité de l’adhérent, on les appelle des parts sociales d’épargne. "Ces nouvelles parts sont bloquées selon la durée d’engagement mais rien n’empêche l’adhérent de demander le remboursement à la fin de cette période », explique Muriel Tina, juriste chez Coop de France. D’autres, appelées parts sociales à avantage particulier permettent une rémunération plus importante. « Les avantages particuliers sont définis par chaque coopérative et la rémunération peut atteindre un taux avoisinant celui des actions d'entreprises privées », estime Romain Dassat, du cabinet Exco FSO. Un bon placement a priori puisque le remboursement de ces parts peut être effectué à tout moment. Un dernier cas existe, quand l’adhérent n’a pas réclamé son dû en quittant sa coopérative. Les parts sociales sont alors appelées des parts sociales d’associés non-coopérateur.

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