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"Nos vaches sont finies à l'enrubannage très précoce et sans correcteur azoté"

Dans le sud de l’Indre, Claude et David Yvernault finissent depuis trois ans leurs vaches de réforme avec une ration basée sur un enrubannage de qualité complémenté par 5 kg de céréales. Avec à la clé une économie conséquente en céréales, et sans tourteau de colza.

Claude et David Yvernault. " On a eu la volonté de faire de la viande avec de l’herbe. Aujourd’hui nos 60 femelles de réforme sont finies avec une ration à base de fourrages."
Claude et David Yvernault. " On a eu la volonté de faire de la viande avec de l’herbe. Aujourd’hui nos 60 femelles de réforme sont finies avec une ration à base de fourrages."
© F. d'Alteroche

À Sazeray aux confins de l’Indre et de la Creuse, Claude et David Yvernault du Gaec de Sèvres conduisent leurs 200 mères charolaises en vêlages groupés. Ils se déroulent sur seulement six semaines en début d’automne. « Chez nous toute la conduite d’élevage, l’alimentation et la gestion du système fourrager découlent de ce choix de réduire le plus possible la période des mises bas. Tout faire vêler en six semaines répond aussi un objectif de simplification. De la fin de l’été au début de l’automne, on est à 100 % dans les vêlages (jusqu’à 17 par jour !), puis on passe à autre chose. »

À ces vêlages très groupés font forcément suite un sevrage lui aussi groupé et une mise à l’engraissement simultanée pour les deux principales catégories de bétail fini que sont les vaches et les JB. Au 20 avril, quand les génisses de renouvellement et les vaches diagnostiquées pleines ont rejoint les pâtures, les deux lots de broutards et vaches de réforme démarrent la période d’engraissement dans les bâtiments d’hivernage et les auront de toute façon libérés avant la rentrée à l’étable qui suivra. « Les lots qui ressortent utilisent les moins bonnes prairies et les autres sont réservées à la fauche », précise David Yvernault.

 

 

Côté ration d’engraissement, jusqu’en 2019, toutes les vaches étaient finies en ration sèche avec un classique mélange 2/3 céréale et 1/3 tourteau colza distribué à raison de 12 kg/vache/jour, associé à un bon foin en libre-service. Comme 100 % de la SAU est occupée par l’herbe, toutes les céréales et tourteaux nécessaires à la finition des mâles ou des femelles sont achetés à l’extérieur.

Bilan technique et comptable

« Chaque année, on fait un bilan technique et un bilan comptable approfondi. Il s’avérait que tous les ans, notre point faible était le poste alimentation », souligne David Yvernault. Pas question pour autant de remettre en question la finition, mais les deux frères s’interrogeaient pour savoir s’il était envisageable de rendre cette activité moins dépendante des achats extérieurs. Pour améliorer l’autonomie de la ration d’engraissement, leur crainte était qu’il soit nécessaire de passer beaucoup de temps à labourer, semer et récolter des céréales, méteils et protéagineux. « Avec en permanence pratiquement 650 à 700 têtes à gérer, nous ne voulons pas remettre en question ce choix du tout herbe. Nous n’avons ni le temps, ni l’envie de mettre en place des cultures. »

C’est sur les conseils de Claude Vincent qui suit leur élevage depuis plus de vingt ans dans le cadre des réseaux d’élevage Inosys et de Jean-Baptiste Quillet, spécialiste des fourrages à la chambre d’agriculture que la ration de finition des réformes a été radicalement modifiée. Depuis 2020 elle se compose d’enrubannage d’herbe de très bonne qualité proposé à volonté, complété par 5 kg de céréales/tête/jour.

Pour simplifier la conduite et être compatible avec le temps de travail des deux frères et de leur salarié employé à mi-temps, les quelque 60 vaches réformées chaque année continuent à être finies en bâtiment où elles sont scindées en trois lots. Après avoir nourri leur veau tout au long de l’hiver au cours duquel leur ration se compose d’une association foin et enrubannage, elles sont globalement en bon état en début d’engraissement. Elles sont finies entre 100 et 140 jours avec des départs qui s’échelonnent dans le temps dans la mesure où elles sont destinées à approvisionner les rayons viande d’une GMS de proximité.

Enrubannage de prairies le 30 mars

« Pour arriver à obtenir de bons résultats avec ce type de ration, il est indispensable de disposer d’un enrubannage de toute première qualité, récolté tôt avec d’excellentes valeurs alimentaires », souligne Jean-Baptiste Quillet. Et pour cela les frères Yvernault n’hésitent plus à sortir la faucheuse et l’enrubanneuse au plus tôt, le plus souvent avant que leurs premiers lots de vaches pleines aient rejoint les pâtures.

« On s’est remis en question et depuis on fait des premières coupes d’enrubannage très précoces. En 2021, on a enrubanné nos premières bottes le 30 mars. D’après les analyses la teneur en matières azotées totales était de 14 %. C’est ce qui a permis de faire de réelles économies sur les achats de tourteaux et céréales. Comparativement à l’année précédente, pour les seules rations d’engraissement des vaches de réforme, cela s’est traduit par une économie de 22 tonnes de tourteau colza et 20 tonnes de céréales », souligne David Yvernault.

Même si récolter une forte proportion d’enrubannage a forcément un coût comparativement à du foin, cela représente quand même de sacrées économies. Le poids moyen de carcasse de ces vaches de réforme a en revanche reculé d’une vingtaine de kilos. Il est passé de 494 kg en 2020 à 472 en 2021 alors que le potentiel des animaux est très similaire. « On ne va plus forcément chercher les derniers kilos sur une vache en fin d’engraissement. Il faut davantage analyser la marge nette que le produit brut et ces derniers kilos sont les plus coûteux à faire prendre dans la mesure où les GMQ diminuent au fur et à mesure que la vache prend de l’état. » Pour autant le débouché de proximité fait qu’il est parfois nécessaire de retarder légèrement le départ de certains animaux.

250 hectares fauchés par an

Désormais l’objectif est de continuer à récolter des enrubannages à haute valeur alimentaire pour avoir des rations qui limitent le plus possible les achats, mais la portance des sols en début de printemps est souvent un facteur limitant.

Le fait de récolter très tôt se traduit par des tonnages ramenés à l’hectare qui n’excèdent parfois guère les 3 tonnes de matière sèche mais avec des valeurs alimentaires qui permettent à ces enrubannages d’être plus proches d’un concentré que d’un fourrage grossier. « Désormais on fauche pour récolter en enrubannage ou en foin autour de 250 hectares par an en incluant dans ce chiffre des secondes et troisièmes coupes », explique Claude Yvernault. L’autre impact positif de ce changement de stratégie pour les dates de récolte est la propreté des parcelles. « On ne broie plus rien. Ces fauches ont eu un impact bénéfique sur la qualité de la flore. »

Jean-Baptiste Quillet, chambre d’agriculture de l’Indre 

"Faire des UF et protéines par la qualité des fourrages"

"Dans l’Indre, un nombre croissant d’éleveurs évoluent dans cette direction pour finir leurs femelles et choisissent d’avoir des fourrages récoltés très tôt, le plus souvent et selon la précocité du printemps dès la première quinzaine d’avril, pour maximiser leur valeur alimentaire et limiter le recours aux céréales et tourteaux pour finir des femelles. Avec des prairies de bonne qualité ils arrivent en fauche précoce à récolter des enrubannages à plus de 15 % de protéine. Le choix de ce type de ration demande en revanche de ne pas faire d’impasses sur les analyses de fourrages pour connaître précisément la quantité de céréales ou de tourteaux à apporter en complément. Cela nécessite d’avoir des animaux à forte capacité d’ingestion qui sont les mieux à même de valoriser ce type de ration avec un minimum d’organisation au moment du stockage des fourrages pour savoir où seront entreposées les bottes à distribuer pour les femelles en finition."

L’exploitation en bref

Sur 299 ha entièrement consacrés à l’herbe à 420 mètres d’altitude, Claude et David Yvernault conduisent un troupeau de 200 vaches charolaises en système naisseur engraisseur. Le parcellaire est à un peu plus de 420 mètres d’altitude et la totalité des besoins en céréales, correcteurs azotés et paille sont achetés à l’extérieur.

 

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