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[Covid 19] Quand l'éleveur François Garrivier prend la plume et dénonce l’attitude des acteurs de l’aval de la filière viande

Eleveur de Charolaises dans la Loire, François Garrivier dénonce le double discours des acteurs de l’aval de la filière viande dans l’actuel contexte de marché, bouleversé par l’arrivée du coronavirus. Un comportement qu’il juge honteux.

© F. d'Alteroche

Confinés chez eux depuis bientôt trois semaines, les Français prennent désormais la quasi-totalité de leurs repas à domicile. Cela se traduit par des reports de consommation. Ce qui n’est plus consommé dans les restaurants et cantines de la Restauration Hors Foyer l’est désormais à la maison à partir d’aliments pour une bonne partie achetés dans les linéaires des différentes enseignes de la grande distribution. Ces dernières communiquent désormais abondamment sur leur rôle pour soutenir l’écoulement des différents produits issus de l’agriculture française.

Dans la mesure où 24% de la viande bovine consommée en France en 2017 l’avait été dans les différents créneaux de la Restauration Hors Foyer, cela laisse à penser que les tonnages de viande bovine achetés ces trois dernières semaines dans les linéaires de la grande distribution ont été confortés par cette obligation de préparer la quasi-totalité des repas à domicile. Pour autant, sur le terrain, les éleveurs ne bénéficient pas vraiment de cet accroissement de la demande. Les tarifs qui leur sont proposés pour leurs animaux évoluaient même plutôt à la baisse lors de la dernière semaine de mars qui était aussi la première semaine d’avril. De quoi inciter certains d’entre eux à prendre la plume pour manifester leur colère et surtout leur dégoût envers des acteurs de la filière bien peu responsables.

Voici le billet d’humeur de François Garrivier, éleveur de Charolaises dans la Loire que nous publions in extenso.

"Solidarité dans les filières agro-alimentaires Françaises : Que l’on fasse diminuer les prix chez les producteurs …… UNE HONTE !"

L’épidémie du covid 19, n’épargne pas les agriculteurs, et malgré, que ceux-ci soient au travail tous les jours depuis le début du confinement, la solidarité prônée par tous, est une vaste supercherie.

Eleveur de viande bovine, je devrais pour couvrir mes coûts de production vendre mes animaux 4.90 € le kilo de carcasse lorsqu’ils quittent mon exploitation. Avant la crise du covid 19 je les vendais 3.50 € le kilo, soit un manque à gagner de 670 € par animal, ce qui est déjà énorme. Depuis les mesures de confinements, les prix grâce à cette formidable solidarité au sein de notre filière ont encore baissé de 30 centimes d’euros soit une rémunération à 3,20€ et un manque à gagner de 816 € par animal….

Mais dans quel monde vit-on ?  Nous les éleveurs qui nourrissons l’ensemble de la population, voilà les remerciements que nous recevons ! On nous traite comme des miséreux, des pestiférés, des chiens !

Quand on évoque le sujet, on nous répond : les cantines sont fermées, les restaurants sont fermés, les rayons coupe dans les magasins sont fermés, donc moins de commandes, donc nous devons baisser les prix !

Que l’on m’explique ! On est en train de me dire que si les opérateurs commerciaux achètent moins chers les animaux chez les éleveurs, cela va faire ré-ouvrir les cantines, les restaurants, et les rayons dans les magasins ! Rien que de le dire, c’est comprendre que ces arguments sont totalement fallacieux et dénués de bon sens.

La vérité est bien plus abjecte que cela, et la voici.

La grande distribution engendre les profits et les marges en faisant croire qu’elle sauve le monde agricole. Elle en est tellement persuadée que des pages entières de journaux sont achetées pour expliquer que Michel Edouard Leclerc et consorts sauvent les agriculteurs. La vérité est que les sociétés d’abattage, coopératives ou privées, sont plus préoccupées par le devenir de leurs collaborateurs, que par le devenir de leurs producteurs, pourtant fournisseurs de leur activité. Ces entreprises scient la branche sur laquelle elles sont assises, mais cela ne les émeut guère !

Alors HONTE à vous, Leclerc, Carrefour, Système U, Auchan, Intermarché, et tous les autres distributeurs de viande bovine. Plus que jamais vous êtes les fossoyeurs des éleveurs, et mon sentiment de dégoût à votre encontre est aujourd’hui immense !

Alors HONTE à vous, les industriels abatteurs, qui nous méprisez, alors que c’est nous et nos productions qui font vivre vos outils et vos collaborateurs, je ne peux comprendre que vous ne mesurez pas que sans nous vous n’existez pas. Vous comprendrez sans doute mieux quand vous fermerez vos outils, mais il sera trop tard !

Quant aux responsables politiques, entendez ce message. « Le jour d’après ne sera pas le même que le jour d’avant" si ce mépris à l’encontre des éleveurs continue.

Le jour d’après, les enseignes de la grande distribution seront plus riches que le jour d’avant.

Le jour d’après, les éleveurs seront plus pauvres que le jour d’avant.

Le jour d’après, la production Française sera moins importante que le jour d’avant.

Le jour d’après, il faudra faire plus d’importations que le jour d’avant.

Le jour d’après, les éleveurs comprendront moins le sens de leur métier que le jour d’avant.

Le jour d’après, les éleveurs seront plus désabusés que le jour d’avant.

Le jour d’après, les enfants d’éleveurs pleureront plus que le jour d’avant, en voyant la misère qui rythme la vie de leurs parents.

                                                            ET POURTANT,

Le jour d’après, l’approvisionnement français en produits alimentaires sera considéré comme un enjeu stratégique, et un enjeu de sureté nationale.

Le jour d’après, tous les citoyens considéreront que manger est le premier élément vital à chaque personne sur cette planète.

Le jour d’après, tout le monde comprendra la noblesse de notre métier, et l’importance de celui-ci.

                                                           ALORS, POUR QUE,

Le jour d’après ne soit pas celui d’aujourd’hui ou j’écris ces lignes le cœur rempli d’amertume et de désespoir, il n’y a qu’une seule solution. TOUS, reconnaissez la valeur de notre métier, et engagez vous TOUS à faire ce qu’il faut pour qu’enfin nos produits soient achetés à un juste prix, sinon le jour d’après sera le jour de trop !

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