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Atelier complémentaire : « Caprins et bovins s’accordent pour exploiter pleinement la ressource en herbe »

Sébastien et Vanessa Vétil, en Ille-et-Vilaine, tirent le plein parti de leurs prairies avec leurs troupeaux de vaches armoricaines et de chèvres angoras. Via ces deux ateliers, ils s’épanouissent dans leur travail grâce à la diversité des activités et la vente directe.

La complémentarité entre les bovins et les caprins a convaincu Vanessa et Sébastien Vétil, installés en 2012 en bio à Guipry-Messac en Ille-et-Vilaine, de faire de l’élevage bovin un atelier à part entière. « Notre première installation, en 2006 dans le Finistère, comptait trois vaches pour diminuer la pression parasitaire sur le troupeau caprin », retracent-ils. Se sont alors révélées d’autres complémentarités de ces deux ateliers, tant pour valoriser l’herbe que pour amortir le matériel. « Nous avons donc déménagé pour trouver les surfaces nécessaires à l’augmentation du cheptel bovin », affirment-ils.

Casser les cycles parasitaires

L’alternance des deux espèces au pâturage permet de casser les cycles parasitaires. C’est d’ailleurs la raison principale qui a motivé le choix des ateliers. Depuis leur déménagement à Guipry-Messac, les deux ex-Finistériens ont pratiquement arrêté les vermifuges. Le suivi par prises de sang régulières montre que les vaches n’ont pas de problème de parasitisme. Seules les chevrettes sont vermifugées à leur première sortie. Les chèvres ont un temps de retour sur les parcelles long, de trois à quatre mois, pendant lesquels les bovins pâtureront au moins une fois la parcelle. « Si nous n’avions que les chèvres, une quinzaine d’hectares suffiraient, mais les temps de retour seraient beaucoup plus courts et la pression du parasitisme serait d’autant plus difficile à gérer », souligne Vanessa. Les bovins font monter l’exploitation à 66 hectares et 52 UGB, ce qui leur permet de toucher les aides de la PAC, dont la mesures agroenvironnementale et climatique (Maec) dite « herbivore » (la SFP représente plus de 70 % de la SAU). « Les aides représentent une part non négligeable de notre revenu : les vaches participent de cette manière à la viabilité économique de l’atelier laine », indique Sébastien.

« Les vaches broutent, les chèvres cueillent »

« Les vaches et les chèvres ont des comportements alimentaires très différents », explique Vanessa : « la chèvre mange la tête en l’air ». Cueilleuse, « elle s’attaque volontiers au rumex en graines ou encore aux chardons. Les chèvres ne pâturent que 5 hectares par an, mais globalement, elles aident à gérer les adventices », apprécie Sébastien. Très sélectifs, les caprins laissent cependant beaucoup de refus. Ceux-ci sont pâturés ensuite par les bovins. L’hiver, les refus à l’auge (20 à 30 % du fourrage) des caprins seront aussi valorisés par les bovins. « Je les distribue en priorité à la vingtaine de jeunes en croissance, que je garde en bâtiment l’hiver. Les vaches sont conduites en plein air intégral, mais je leur distribue aussi du fourrage, dont les refus, sous la clôture », complète Sébastien. Les fourrages sont triés, les meilleures coupes allant en priorité à l’atelier caprin et aux bovins en croissance. Les 58 hectares de prairies permettent ainsi d’assurer l’autonomie alimentaire de l’exploitation, associés à 1 à 2 hectares de céréales en mélange pour la complémentation des caprins. Les bovins ne reçoivent pas de complémentation.

Depuis quatre ans, 10 à 12 hectares de blé panifiable et d’orge brassicole permettent également d’atteindre l’autonomie en paille. « À notre arrivée, nous avons retourné les cultures en place et tout semé en prairies pour convertir le terrain en agriculture biologique. Sept ans plus tard, lorsque nous avons commencé à casser nos prairies les plus fatiguées, nous avons décidé d’en profiter pour produire des céréales pour l’alimentation humaine, plutôt que de tout ressemer en herbe », explique Vanessa. « Nous manquons un peu de fertilisation, reconnaissent les éleveurs, car le fumier de chèvre est très sec, et la quasi-totalité des bovins sont élevés en plein air, donc sans stockage d’effluents ». Les céréales sont vendues à des boulangers et brasseurs locaux. La production annuelle de 40 à 50 bottes de paille permet à l’exploitation d’être autonome en litière.

Travailler ensemble en gardant son indépendance

La présence des deux ateliers permet à Vanessa et Sébastien de travailler ensemble, tout en gardant leur indépendance. Les pics de travail se succèdent : dès janvier, la tonte et le tri de la laine occupent Vanessa un mois et demi, puis la surveillance des chevrotages en février. En mars, elle refait les parcs pour la mise à l’herbe des chèvres. D’avril à juin, Sébastien fauche les prairies en enrubannage et foin. « Avoir deux ateliers ruminants permet de limiter les achats de matériel : le même matériel sert aux deux ateliers, cela limite les coûts et le temps de travail », précise-t-il. La moisson a lieu en juillet. Arrive ensuite la deuxième tonte, de fin juillet à mi-août. Enfin, à partir de septembre et jusqu’aux fêtes de fin d’année, Vanessa dédie deux à trois jours par semaine à la vente de la laine. « Cette période représente 90 % du chiffre d’affaires de l’atelier laine », estime l’éleveuse. Quant aux vêlages, répartis sur deux périodes (septembre-octobre et février-mars), Sébastien ne les considère pas comme un pic de travail : « je surveille bien sûr les vaches, mais l’armoricaine vêle très facilement, j’ai donc rarement besoin d’intervenir ». L’alternance des périodes plus chargées permet à Vanessa et Sébastien de s’entraider, et de dégager du temps pour la vente et les collectifs auprès desquels ils sont engagés. « C’est un réel atout pour le Gaec, mais un inconvénient pour notre vie de famille, car l’un de nous deux a toujours quelque chose à faire : il est parfois difficile de partir en vacances », admettent-ils.

Dégager du temps pour les circuits courts

Le Gaec de Brantadé commercialise la totalité de sa production en circuits courts. Pour les bovins, cela représente environ une bête par mois, commercialisée au magasin de producteurs Brin d’Herbe, et sur la plateforme de vente en ligne Le Goût d’Ici, via laquelle les consommateurs achètent des produits qu’ils récupèrent à la ferme, et dont Vanessa est la présidente. Sébastien fournit également, depuis le mois de mai, une demi-carcasse de veau à un restaurateur local. La laine est commercialisée dans un magasin à la ferme, et sur les marchés en fin d’année. « Souvent, les clients laine découvrent notre atelier viande et souhaitent en acheter. Cela crée des opportunités, même si les disponibilités en viande ne permettent pas de satisfaire toutes les demandes », note Sébastien.

« Les circuits courts demandent beaucoup de temps et d’implication », donc commercialiser les produits des deux ateliers sur les mêmes voies de commercialisation revêt un intérêt pratique, permettant de se répartir à deux les permanences au magasin ou les réunions du collectif. « Mais cela permet aussi d’avoir un lien social et évite l’isolement », soulignent les éleveurs. Outre les circuits courts, ils sont également impliqués dans deux Cuma et deux banques de travail, ainsi que dans le syndicalisme agricole de leur département. « Une bonne moitié de notre temps est passée en dehors de l’exploitation », estime Vanessa.

L’Armoricaine, une race rustique bretonne adaptée au plein air intégral

L'armoricaine, race bovine bretonne à petit effectif, a dépassé, en 2023, la barre des 1 000 individus grâce à un programme de conservation.
Cette race bretonne à petit effectif a dépassé, en 2023, la barre des 1 000 individus grâce à un programme de conservation. © A.-L. Galon

Avec ses 35 mères armoricaines, Sébastien Vétil détient l’un des plus grands troupeaux de vaches armoricaines au monde. Cette race bretonne à petit effectif a dépassé, en 2023, la barre des 1 000 individus grâce à un programme de conservation. « Leur rusticité permet une conduite en plein air intégral, nous n’avons donc pas eu besoin d’investir dans un bâtiment pour les bovins. Un énorme avantage pour notre installation hors cadre familial, explique Sébastien. Les génisses vêlent entre 24 et 28 mois, et les vêlages ne nécessitent que très peu d’interventions. Quant à l’alimentation, je finis les animaux à l’herbe, sans aucune complémentation ! ». À l’abattage, les bœufs de 3 ans à 3 ans et demi donnent en moyenne 380 kg de carcasse (conformation R- à O +, note engraissement de 3) avec un rendement carcasse entre 50 et 60 %. Les veaux, de 5 à 5 mois et demi font 115 kg de carcasse. « L’armoricaine produit de la viande persillée, qui n’est pas bien valorisée par les grilles actuelles », indique Sébastien. En vente directe, le persillé ne le désavantage pas : « les clients apprécient le goût de la viande, que le persillé développe ». En raison du statut de conservation de la race, les accouplements de renouvellement se choisissent pour limiter la consanguinité, et non sur des critères de sélection.

Chiffres clés :

  • 66 ha dont 58 ha de prairies, 12 ha de blé et orge, 2 ha de céréales autoconsommées en mélange
  • 35 vaches armoricaines
  • 70 caprins angoras
Rédaction Réussir

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