De nouveaux enjeux de bien-être à anticiper pour les accouveurs
Les probables évolutions réglementaires en matière de bien-être animal vont avoir des répercussions sur la filière accouvage. Le SNA, Syndicat national des accouveurs, se penche dores et déjà sur la question.

des poulets, expérimentée
en Europe du Nord, est un indicateur
de bien-être sur lequel va se
pencher la Commission européenne.
En 2015, au plus tôt, devrait commencer la révision de la réglementation européenne sur le bien-être animal. Elle s’articule autour de plusieurs axes dont l’emploi d’indicateurs de bien-être, en plus de favoriser l’information du consommateur, de définir des compétences pour le personnel manipulant les animaux, voire de définir une norme ISO. « Un nouveau principe régit l’évaluation du bien-être animal, qui se base sur des indicateurs mesurés sur les animaux plutôt que des règles d’élevage, relève Claude Toudic, d’Hubbard, président de la commission bien-être animal du SNA, le Syndicat national des accouveurs. On s’oriente vers une obligation de résultats plutôt que de moyens. » La commission se sert des exemples mis en œuvre dans des États membres pour les généraliser à toute l’Europe. « Par exemple, l’expérience des Pays-Bas, de la Suède et du Danemark sur la mesure des pododermatites en poulet sera regardée de très près », estime-t-il.
Les vitesses de croissance en ligne de mire
Pour être force de propositions et éviter de se voir imposer des indicateurs qui ne leur semblent pas adéquats, les filières françaises s’impliquent actuellement dans le projet Ebene. Coordonné par l’Itavi et le SNA, il vise à déterminer des indicateurs « pratiques et partagés de tous ».
Parallèlement, la directive poulet de 2007 prévoit d’étudier l’effet de la sélection sur le bien-être en élevage. Un rapport de l’Efsa publié en 2010 soulignait que les préoccupations majeures en matière de bien-être étaient liées aux rapides vitesses de croissance.
Des avis d’experts publiés en 2012 et 2013 recommandaient là aussi de mettre en place des indicateurs en élevage et en abattoir et d’encourager toutes les parties de la chaîne de production du poulet de chair à améliorer le bien-être. L’assemblée générale du SNA a d’ailleurs donné l’occasion de présenter des modes de production à croissance plus lente comme le label rouge en France qui existe depuis plus de cinquante ans ou les démarches plus récentes aux Pays-Bas (Chicken of tomorrow) ou au Royaume-Uni (concept Freedom food).
Vers une interdiction des traitements au couvoir
Concernant le maillon reproduction-accouvage, Claude Toudic a listé les dossiers en cours mais « ne faisant pas forcément l’objet d’une réglementation ». Il cite le logement des reproducteurs en cage (en situation précaire depuis la directive ponte de 1999), le rationnement des parentales ou encore l’élimination des frères de pondeuses en Gallus ponte, dont la « procédure est encadrée mais qui est la cible constante d’ONG ».
Les traitements au couvoir (débecquage, dégriffage…), toutes espèces et générations confondues, pourraient également être remis en cause. Dans certains États membres, le débecquage est déjà interdit (Finlande, Suède, Royaume-Uni) ou le sera prochainement (aux Pays-Bas et en Allemagne en 2018). « En filière ponte, a souligné Benoît Pelé, d’Hendrix Genetics, les sociétés de sélection investissent des moyens importants pour faire évoluer la forme du bec, pour limiter le picage afin de ne plus avoir à épointer le bec à moyen terme. »
Avec Joël Audefray de Lohmann, également membre de la commission ponte du SNA, il a listé les autres enjeux pour la filière ponte : l’interdiction de la cage demandée par certaines ONG, l’élargissement possible de l’élevage bio aux futures pondeuses ou la recherche de solutions alternatives à l’élimination des coquelets ponte. « Des réponses sont à apporter pour répondre aux attentes sociétales. À ce titre, une réflexion est en cours dans le cadre de l’étude Prospective de la filière œufs à 2030 en France." Initiée par le CNPO et sous la tutelle de l’Itavi, elle réunit autour de la table les administrations, instituts techniques, professionnels de la filière et certaines ONG. L’objectif est de trouver un mode d’élevage qui fasse consensus.
Le projet Ebene démarre
« Le projet Ebene marque la volonté de la profession d’être force de propositions et de construire une réglementation européenne plus adaptée aux attentes françaises », a souligné Anne Richard, directrice de l’Itavi qui coordonne le projet. Il s’inscrit dans la future loi-cadre sur le bien-être animal dont l’un des objectifs est de déterminer des indicateurs partagés avec les pouvoirs publics, la profession et les ONG. Cinq groupes de travail ont été mis en place au sein de la filière pour définir des indicateurs qui fassent consensus au sein de la profession (chair, gras, ponte, reproducteurs et lapin). Ils seront ensuite soumis aux pouvoirs publics, en concertation avec certaines ONG avant d’être proposés à la Commission européenne.