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En Bourgogne, Nicolas Bourdon s’est installé à tout prix en poulet 

À Sergines, près de Sens dans l’Yonne, Nicolas Bourdon a mis presque six ans pour concrétiser un projet de 1 800 m² de poulailler, avec l’objectif de renforcer une exploitation de grandes cultures.

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Nicolas Bourdon a réussi à aller au bout de son projet et peut être fier du résultat !
© P. Le Douarin

Depuis fin octobre 2024, Nicolas Bourdon est un homme plus heureux : 39 600 poulets standard ont enfin foulé le béton frais de son bâtiment de 1800 m² après six ans d’un parcours semé d’embûches. « J’ai commencé mes premières démarches en décembre 2018, se remémore le jeune homme de 29 ans. En bac pro, j’avais fait un stage chez un éleveur Duc et j’avais trouvé que c’était un bon métier pour se diversifier. »

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Sol et panneaux verticaux en béton, ventilation bilatérale et longitudinale Skov, pipettes Lubing, assiettes Landmeco. © P. Le Douarin

Son intention initiale était de s’installer avec du poulet, avant de prendre la suite de son père Éric qui arrêtera son activité agricole cette année. L’exploitation familiale compte 120 hectares de cultures, ce qui est juste suffisant pour en vivre correctement. « Il s’agissait aussi d’avoir une activité stable avec un revenu régulier qui compenserait les aléas de la météo et des prix des grains », détaille Nicolas Bourdon.

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Cette année, Éric, le père de Nicolas Bourdon, prévoit de transmettre à son fils l'exploitation de 120 hectares de cultures. © P. Le Douarin

Un premier « business plan » bien ficelé

En 2019, le jeune homme rencontre Duc et des éleveurs, pour finalement porter son choix sur un grand bâtiment de 1 800 m² tout en béton, concept assez courant dans le nord et l’est de la France.

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Le poulailler en béton a été construit et équipé par la société ardennaise SL2E. © P. Le Douarin

Mais en mars 2020, le Covid retarde l’avancée du projet et ce n’est qu’en décembre qu’il obtient un premier devis de 584 000 euros, sachant qu’il devait y ajouter l’aménagement de la parcelle (terrassement et raccordements). L’étude prévisionnelle, établie avec la société Duc, prévoyait qu’il dégagerait un excédent brut d’exploitation de 65 000 euros (36 euros par mètre carré). L’annuité du bâtiment aurait atteint 43 000 euros. Nicolas prévoyait de le financer par un prêt de 500 000 euros, complété par la DJA (1) (30 000 euros), l’aide de Duc (54 000 euros) et celle de la région Bourgogne-Franche-Comté et du Feader (67 000 euros budgétés).

En 2021, les démarches suivent leur cours. Le permis de construire est obtenu fin novembre. La demande d’autorisation d’ICPE (2) est déposée en février 2022. La préfecture lance une consultation publique en mai, l’élevage ne dépassant pas les 40 000 places de poulets. Malgré les nombreuses contestations, le préfet autorise le poulailler en septembre 2022.

Ne jamais abandonner la partie

« J’ai décidé de me déclarer comme agriculteur auprès de la MSA et j’ai créé mon EARL en novembre 2022, poursuit Nicolas qui a encore subi un retard dans la concrétisation du projet. N’étant pas propriétaire du terrain en 2021, j’ai commis l’erreur de demander le permis de construire au nom de l’EARL de mon père », reconnaît-il. Pour obtenir le prêt, il a dû transférer le permis de construire à son EARL, puis caler les travaux dans le planning du constructeur. D’où ce délai supplémentaire. La construction s’est finalement déroulée de mi-juin à mi-octobre 2024.

Nicolas n’a jamais voulu abandonner son projet perturbé par le Covid, par les contestations et les conséquences de la guerre en Ukraine. « Depuis 2022, les tarifs de construction ont enflé et beaucoup de candidats ont jeté l’éponge, regrette-t-il. Mon devis est passé de 584 000 à 697 000 euros, ce qui fait que le projet global va approcher des 800 000 euros, avec un taux d’emprunt à 3,8 % sur quinze ans. »

Pour ne pas briser sa dynamique de développement dans ce contexte économique jugé « compliqué », Duc a décidé de prendre en charge la moitié de l’investissement des nouveaux poulaillers.

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Damien Calandre, directeur de Duc-Plukon, soutient fortement les nouveaux projets pour alimenter l'abattoir de Chailley. © P. Le Douarin

Ce que confirme Damien Calandre, directeur général de Duc. « Nous prenons nos responsabilités vis-à-vis de Nicolas Bourdon. Nous soutenons le développement des projets qui permettent aux éleveurs d’en vivre et de travailler dans de bonnes conditions. » Le parcours de Nicolas Bourdon n’est pas tout à fait terminé. Il lui reste à toucher les 30 000 euros de DJA et l’aide région-Feader du programme 2023-2027.

(1) Dotation jeunes agriculteurs
(2) Installation classée pour la protection de l’environnement

Une consultation publique sous tensions

La consultation publique de mai 2022 a recueilli plus de 40 000 avis négatifs dématérialisés alors que le projet concernait les 1 300 habitants de Sergines.

Ce poulailler de 1 800 m² a cristallisé les contestations locales. Il a d’abord déplu au maire d’une commune voisine où sera épandu en partie le fumier. « Cet élu a cru qu’on allait polluer l’air et les sols et qu’on allait épuiser la nappe phréatique avec un prélèvement de 2 200 m3 par an ! », détaille l’éleveur qui ne l’a jamais rencontré pour s’expliquer.

La contestation a été amplifiée par l’association Sergines à contrevent, initialement constituée contre un projet d’éoliennes soutenu par le maire de Sergines. La pétition lancée sur Change.org a réuni plus de 40 000 signatures, issues de toute la France.

Alertés par l’agitation, les médias locaux et nationaux ont relayé les craintes récurrentes exprimées sur la « certitude » de subir des pollutions, des odeurs, des mouches, des rats, d’atteinte au bien-être animal et à la biodiversité, de ronde incessante de camions…

Le soufflet médiatique a fini par retomber et aucun recours n’a été déposé contre le projet autorisé en septembre 2022.

Le poulet bourguignon oublié des aides régionales

En Bourgogne-Franche-Comté, les agriculteurs peuvent prétendre à 40 % d’aides au titre de la « modernisation et de l’adaptation au dérèglement climatique », (majorables jusqu’à 55 ou 60 % dans certains cas) avec un plafond de dépenses éligibles à 100 000 euros, dans le cadre du dispositif des aides européennes du second pilier de la PAC 2023-2027 (Feader) transitant par la région. L’enveloppe globale de ce volet est de 66,4 millions d’euros et représente 26 % des aides Feader distribuées.

Mais, les ateliers de volailles et de porcs conventionnels en sont exclus, contrairement au programme précédent. Aucun élevage avicole n’a obtenu d’aide en 2023 et 2024, car aucun dossier avicole n’a atteint le score minimal de 30 points. Pour qu’un dossier hors-sol ait des chances être retenu, il faudrait réviser la grille de sélection commune à toutes les productions animales et la faire adopter par les élus du conseil régional. Ce qui est encore loin d’être acquis.

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