Comment bien vinifier une vendange flétrie et sèche ?
Cette année, des viticulteurs du sud de la France se retrouvent à vendanger des grappes partiellement séchées. Voici comment les vinifier.
Cette année, des viticulteurs du sud de la France se retrouvent à vendanger des grappes partiellement séchées. Voici comment les vinifier.
Que ce soit suite à un échaudage ou à un stress hydrique, il n’est pas rare cette année de se retrouver avec de la vendange partiellement sèche ou flétrie. Ce qui amène à revoir ses habitudes et repères.
La première difficulté réside dans le choix de la date de récolte. « Le plus simple reste la dégustation des baies, observe Martina Widmer, œnologue conseil chez Vinolis, à Cheval-Blanc, dans le Vaucluse. Souvent, seul l’extérieur de la grappe a séché et l’intérieur est préservé. Cela fait une bonne moyenne. »
Vendanger à la fraîche pour limiter l'oxydation
En blancs et rosés, les œnologues recommandent de récolter à la fraîche, afin d’éviter de rentrer des raisins trop chauds. Car ces baies à moitié sèches auront tendance à s’oxyder encore plus facilement que les autres. Dans ce même ordre d’idée, Daniel Péraldi, œnologue fondateur d’Œnolyse, à Meyreuil, dans les Bouches-du-Rhône, conseille de « triturer le moins possible les baies ». Ce qui plaide en faveur de la récolte manuelle.
De son côté, Martina Widmer insiste sur la protection du raisin, avec un sulfitage dès la benne ou la machine à vendanger, « même si la vendange paraît belle et saine ». De même, l’ajout de levures de bioprotection peut être utile, afin d’éviter tout départ intempestif en FA. Autre point important : le tri de la vendange, si elle est abîmée, ne doit pas être occulté. « Il faut absolument éviter les oxydases provoquées par le botrytis », pointe Martina Widmer. En revanche, elle juge inutile d’éliminer les baies sèches.
Pressurage séquentiel et débourbage autour de 200 NTU
De son côté, le pressurage devra si possible être séquentiel, afin de travailler chaque jus de manière séparée et avec un débourbage adapté. Ce qui implique un volume de cuverie disponible conséquent. Les deux œnologues préconisent ensuite un bon débourbage, pour arriver à un jus aux alentours de 200 NTU.
Derrière, la fermentation alcoolique devra être maîtrisée et réalisée — pour Martina Wadmer — aux environs de 19 ou 20 °C, afin « d’accompagner le côté aromatique confite ». Les deux œnologues recommandent d’ensemencer avec les levures habituelles. Pour les opérateurs travaillant en indigène, il faudra veiller à avoir un pied de cuve prêt au moment de la vendange, afin de pouvoir ensemencer rapidement.
Martina Widmer déconseille par ailleurs de mélanger des cuves en cours de FA afin d’éviter tout arrêt fermentaire. « Ce sont des vins déséquilibrés, il faut à tout prix que la fermentation aille au bout » martèle-t-elle. Au-delà de 15 % vol., il peut être intéressant de supplémenter le milieu en nutriments et oxygène.
Des itinéraires respectueux du raisin sur rouge
Sur rouges, un itinéraire « doux » semble de mise. Ainsi, Daniel Péraldi recommande un foulage modéré et une macération carbonique, ou une infusion s’il y a suffisamment de jus, quand Martina Widmer préconise des extractions légères et des cuvaisons courtes.
Pour résumer
Vendanger à la fraîche sans triturer
Presser en séquentiel
Débourber à 200 NTU
Fermenter autour de 19-20 °C
Ne pas hésiter à assembler
Témoignage : Éric Plumet, vigneron du Domaine La Cabotte, à Mondragon dans le Vaucluse
« Nous préférons ne pas trop extraire »
Sur rouges, nous avons vendangé une parcelle de syrah à la machine, car elle peut passer plus tôt le matin, mais sur grenache, nous sommes restés sur du manuel. Nous avons ensuite passé toute la récolte par l’égrappoir car pour le moment, les rafles ne sont pas totalement mûres. Et nous avons réglé la machine pour qu’elle éjecte les raisins "confits". Cela fait moins de volume en cuve, mais on reste sur des arômes de fruits frais. Nous avons aussi raccourci le temps de cuvaison, toujours dans l’objectif d’éviter les arômes « raisin de corinthe ». Nous venons d’écouler la première cuve, après huit jours de cuvaison, contre quinze jours à un mois habituellement. Nous avions une belle couleur, du fruit frais, de la matière, donc on a décidé de décuver. Nous nous gardons aussi la possibilité d’assembler les presses plus tard, si elles ne goûtent pas bien. »