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Maïs : comment choisir des variétés irréprochables de la levée à la récolte ?

Alsace, vallée du Rhône, Sud-Ouest, Centre Ouest : d’une région à l’autre, la hiérarchie des critères prioritaires pour choisir ses variétés varie. État des lieux.

En France, les agriculteurs bénéficient d’une large palette de variétés dans différents créneaux de précocité. Le changement climatique conduit à des semis de plus en plus précoces, ce qui comporte quelques risques.

Une bonne vigueur de départ pour démarrer du bon pied

Avec ses sols froids, ce caractère concerne davantage les régions du Nord-Ouest (Bretagne, Pays de la Loire) que les zones continentales. « Les agriculteurs désirant semer précocement ont intérêt à choisir des variétés avec une bonne vigueur de départ. Ce n’est pas un critère de choix systématique mais on le met en avant lorsque c’est un point fort d’une variété, signale Jean-Louis Moynier, ingénieur régional Poitou-Charentes à Arvalis. C’est un critère regardé de près en agriculture de conservation des sols ou quand il y a eu un couvert d’interculture avant le semis, situations dans lesquelles les sols se réchauffent moins vite. »

« Dans notre région, nous sommes très embêtés par des attaques de corvidés, sans compter les ravageurs du sol, observe Emmanuel Hédon, référent agronomique sur le dossier semences à Oxyane. Il faut qu’une variété puisse démarrer très tôt dans son cycle pour passer au plus vite les stades où elle se montre vulnérable. Si un maïs 'rame' au démarrage, la parcelle a de grands risques de devoir être ressemée. C’est en outre un caractère très important quand on avance la date de semis. » Selon le spécialiste d’Oxyane, certaines génétiques affichent une meilleure vigueur de démarrage. « C’est le cas des variétés Pioneer. P9234 démarre très fort, et aussi P9889 dans une moindre mesure. Les variétés Dekalb sont beaucoup plus lentes mais il y a quelques obtentions qui fonctionnent bien comme DKC4115. »

 

 

 

« Une plante qui démarre plus vite s’en sortira également mieux face aux risques de gelées pouvant survenir jusqu’en mai dans nos régions, ajoute Justine Sourisseau, du GRCeta SFA dans les Landes. Par ailleurs, nous subissons de plus en plus des vents de sable capables de détruire les plants au début de leur développement. Un maïs qui arrivera rapidement au stade 4-5 feuilles sera moins sensible à ce phénomène. » La spécialiste du GRCeta note que les producteurs bio regardent de près ce caractère car les variétés les plus vigoureuses couvrent plus vite le rang, freinant le développement des adventices. « P0725 est une variété iconique en matière de vigueur de départ et le maïs SY Carioca montre également un démarrage rapide. »

Certaines variétés montrent en outre des problèmes de levée assez récurrents avec des pertes de pieds anormalement élevées. « Mais on ne sait pas trop si c’est lié à leur génétique ou à une production de semences difficile », remarque Justine Sourisseau.

Intégrer la tolérance aux stress climatiques

Variétés Stressless Dry, Aquamax, Optim’eau… Les semenciers présentent des maïs tolérants au stress hydrique. Simple déclinaison marketing ou réalité de terrain ? « Les agriculteurs demandent des variétés tolérantes à la sécheresse, mais c’est difficile à étudier dans les essais et compliqué à caractériser. Déjà, une régularité de rendement souligne la capacité de la variété à encaisser des stress, considère Jean-Louis Moynier. Selon la période à laquelle la sécheresse se produit, les variétés se comporteront différemment. Il y a des maïs de type cigale et de type fourmi. Les premiers continuent à produire en sec : ils résistent bien à condition que la sécheresse ne soit que passagère. Les seconds engagent des mécanismes de tolérance dès le premier stress hydrique. Si celui-ci perdure, ces variétés fourmis résisteront mieux dans la durée. »

Selon Emmanuel Hédon, des génétiques répondent clairement mieux que d’autres au manque d’eau. « Nous avons tout un réseau de testage en conditions agriculteurs où l’on voit bien les réponses au stress hydrique, ce qui permet d’orienter les choix. En fin de groupe 400, la variété RGT Urbanixx est assez époustouflante sur cette tolérance en assurant son potentiel même avec peu d’irrigation. Nous avons remarqué aussi que des variétés ne supportaient absolument pas la moindre carence en irrigation. » La rusticité en matière d’alimentation hydrique peut-elle évoluer dans le temps ? « La variété DKC4670 était bien placée il y a trois ans mais on ne retrouve plus ce bon fonctionnement dans nos derniers essais. C’est difficile à expliquer, mais cela peut dépendre du moment où arrive le stress hydrique dans le cycle de la variété. »

Dans l’élaboration du rendement, des variétés montrent une forte capacité de remplissage des grains pour atteindre un PMG élevé. D’autres bâtissent plutôt leur rendement sur le nombre de grains par épis. « Pour les premières, les conditions d’alimentation hydrique de fin de cycle sont très importantes, à réserver aux sols à bonne réserve utile et aux conditions d’irrigation non limitantes, souligne Justine Sourisseau. Dans notre secteur, nous préférons des variétés équilibrées entre PMG et nombre de grains par épi, qui tiendront mieux la route selon les conditions. »

Tolérances à la fusariose et à l’helminthosporiose

« En France, 80 % des maïs vont à l’alimentation animale, sauf en Alsace où c’est l’alimentation humaine qui prend cette part dans les débouchés pour fournir deux importantes amidonneries (Syral et Roquette), précise Didier Lasserre, ingénieur régional Arvalis dans cette région. Il faut donc que les maïs soient irréprochables sur la présence de mycotoxines dans les grains. La tolérance à la fusariose est mise en avant dans la présentation des variétés tous les ans, même si la maladie est peu présente ces dernières années. »

Pour Jean-Louis Moynier, les données de tolérance variétale ne sont fiables que si elles ont été obtenues sur la durée, compte tenu de la difficulté à créer des situations de forte contamination en fusariose pour tester les variétés. « Les maïs très sensibles sont retirés de la gamme, alors qu’ils sont parfois très intéressants en rendement. Les aspects sanitaires conditionnent le marché du grain, ajoute Emmanuel Hédon. Une variété comme P0937 était une catastrophe sur pied en termes de fusariose. Elle a été exclue. »

L’helminthosporiose a bien été éradiquée en Alsace grâce à des variétés résistantes. La maladie concerne plutôt la façade maritime désormais, Bretagne et Sud-Ouest notamment. « La résistance à l’helminthosporiose est importante dans de nombreuses situations, voire obligatoire dans les sols de vallée chaude des Pyrénées-Atlantiques et des Landes », souligne Arvalis. De nombreuses variétés présentent dorénavant ce caractère. « Des variétés ont été supprimées de nos préconisations à cause de leur sensibilité à l’helminthosporiose, rapporte Justine Sourisseau. Sur la façade atlantique, les nuits assez humides en août favorisent cette maladie, qui peut être précoce en situation de non-labour. Nous vérifions la tolérance à cette maladie sur notre territoire car nous ne sommes pas sûrs d’avoir les mêmes souches de pathogène que dans d’autres régions à risque comme la Bretagne. »

 

 
De nombreuses variétés présentent une résistance à l'helminthosporiose.
De nombreuses variétés présentent une résistance à l'helminthosporiose. © Watier visuel

 

Une dessication rapide pour réduire les frais de séchage

« La vitesse de dessication est un point important en Alsace, observe Didier Lasserre. Dans les essais, nous présentons des récoltes par variété à 22 %, 26 % et 30 % d’humidité où l’on voit bien les différences variétales sur la vitesse de dessication. Des hybrides perdent plus facilement que d’autres l’eau du grain en fin de cycle. » Les charges de séchage augmentent de manière significative, d’où une recherche de variétés au grain pas trop humide à la récolte. « Une variété tardive comme P0937 surprend sur sa fin de cycle avec une dessication rapide des grains et une humidité à la récolte meilleure que certaines variétés plus précoces, précise Justine Sourisseau. A contrario, DKC5812, d’indice 570, montre un super potentiel mais malheureusement avec 2 à 3 points de plus en humidité. » Cette variété sera suivie malgré tout pour voir si ce défaut perdure.

Les indices très tardifs (560-570) qui peuvent être cultivés dans le Sud-Ouest offrent certes de hauts potentiels, mais certaines variétés plus précoces (520) n’ont pas à rougir de leur rendement, avec des vitesses de dessication permettant de gagner 1 point d’humidité à la récolte à dates égales. Ce type de variété permet de récolter plus tôt et donc à prendre moins de risque par rapport à l’humidité des grains. De son côté, Emmanuel Hédon remarque que certaines variétés tardives d’indice 600 se caractérisent par une fin de cycle rapide avec un bon desséchement. « C’est un caractère intéressant sur ce créneau de précocité en particulier. »

La faible tenue de tige, un critère d’exclusion

La tenue de tige intéressera les secteurs avec des conditions venteuses fréquentes (bordures maritimes), beaucoup moins l’intérieur des terres. Un pourcentage de tige creuse dépassant les 20 % dans la caractérisation des variétés est rédhibitoire pour ces situations à risques. « C’est un critère d’exclusion. Mais la tenue de tige s’est considérablement améliorée et beaucoup de variétés répondent de façon satisfaisante à la tolérance à la verse », remarque Jean-Louis Moynier, Arvalis.

Les variétés avec une fragilité de tige ne restent pas dans les gammes de maïs proposées localement. Mais pour Justine Sourisseau, GRCeta SFA, il est important de regarder la résilience d’une variété après une casse des tiges. « En 2018, après un orage violent survenu à floraison au 1er juillet, des maïs ont produit 110 quintaux par hectare quand d’autres ont atteint 145 quintaux par hectare parmi les variétés couchées. »

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