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Maraîchage : la technique du double sorgho permet de faire face aux nématodes à galles

Face au problème des nématodes à galle, la technique du double sorgho est facile à mettre en place. Ses résultats très satisfaisants pour l’ensemble des cultures à condition de consacrer du temps à sa mise en place.

En Provence, certaines pratiques culturales sur des cultures sensibles comme la tomate, le concombre, la courgette ou la salade ont favorisé le développement des nématodes à galles. Ces ravageurs du sol peuvent occasionner de très importants dégâts voire des abandons et renoncements de mise en culture. Afin de réduire l’infestation, la solarisation (désinfection solaire) des parcelles a été introduite en premier lieu. Son efficacité contre les nématodes était intéressante mais non suffisante, notamment en concombre. De plus, la solarisation appauvrit le sol en accélérant la minéralisation de la matière organique et en réduisant les populations de micro-organismes et macro-organismes (vers de terre, etc.).

L’effet plante-piège remarqué

« Le sorgho était déjà très utilisé en Provence sur un cycle long de deux mois pour créer de la matière organique carbonée en été et faire une rotation dans nos systèmes de culture sous abris », explique Laurent Camoin, ingénieur conseil en maraîchage à la Chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône. Suite aux résultats préliminaires des programmes dans lesquels il a été impliqué en lien avec des partenaires de la recherche et de l’expérimentation, l’ingénieur Réseau Dephy a très vite conseillé la mise en place du double sorgho court sur certaines exploitations, comme chez Magali Girard et Edouard Aymard en 2017 (voir encadré).

« L’objectif était de répondre à l'augmentation des nématodes à galles sur les cultures de printemps. Cette technique a donné des résultats proches de ceux de la solarisation dès la première année de test, nous avons vu l’effet plante-piège », précise-t-il. Ainsi, la technique consiste à semer du sorgho fourrager, quelle que soit la variété, à haute densité : minimum 100 kg de semences par hectare, sur un sol suffisamment travaillé en surface. De le laisser pousser trois semaines maximum en période estivale, en veillant à irriguer au besoin.

« Les racines doivent se développer au mieux pour avoir un effet piège à nématodes maximal », mentionne Laurent Camoin. Puis au bout de trois semaines, le sorgho est détruit complètement, feuillage et racines, avec un outil à disques, une herse rotative ou un outil à fraise (rotavator, enfouisseur de pierres). Il faut le laisser sécher quelques jours (deux à quatre jours) selon les températures, et s’assurer qu’aucune repousse ne reste. Ensuite, un nouveau sorgho est semé sur la même parcelle, au moins une fois, en répétant toutes les étapes précédentes.

Destruction du sorgho 21 jours après le semis

« La mise en œuvre de cette technique est possible de mi-avril à mi-septembre, sous abris en Provence », précise le spécialiste. Elle nécessite d’avoir une période de six à sept semaines minimum devant soi pour faire deux sorghos courts consécutifs. Les variétés utilisées sont celles habituellement disponibles chez les distributeurs comme Piper, Lussi, Sudal, Trudan8, Jumbo, etc. Le semis ne nécessite pas de travail de sol important, ni de fertilisation. Le sorgho doit être semé a minima à la densité de 100 kg de graines à l’hectare. Plus la densité de semis est élevée, plus le résultat attendu peut être important. L’irrigation par aspersion doit être suffisante et régulière.

La réussite de la technique dépend également de la date de destruction du sorgho. Celle-ci doit être réalisée 21 jours après le semis en été. En effet, le cycle complet des nématodes est de 24 jours à 25°C. Au-delà, les nématodes font leurs œufs et leur cycle continue. Le re-semis du sorgho a lieu deux à quatre jours après la destruction. Les résultats attendus sont la réduction puis le maintien à un niveau bas des populations de nématodes à galles. La méthode permet également d'augmenter de la fertilité du sol, d’améliorer le rendement des cultures et de pouvoir maintenir dans la rotation des cultures sensibles aux nématodes sans pertes de rendement (tomate, concombre, courgette, etc.).

« Pour rendre plus efficace la technique, un double sorgho peut se transformer en triple sorgho. Plus la technique sera répétée, plus elle donnera satisfaction », propose le technicien. La gestion des nématodes doit également se combiner à une reconception globale du système avec notamment une réflexion sur les espèces en rotation, le travail du sol après les pratiques assainissantes, l’apport d’amendements organiques massifs en surface, la solarisation occasionnelle, l’usage de produits de biocontrôle, etc. Les engrais verts, comme le sorgho, permettent également une meilleure structuration biologique du sol et donc peuvent servir à limiter son travail mécanique.

Tiré de la fiche sur la technique du double sorgho court réalisée par la Chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône dans le cadre du Réseau Ferme Dephy maraîchage.

 

En bref

 
En été, le sorgho doit être détruit impérativement 21 jours après son semis. © L.Camoin
Coût de la pratique : 0,04 € HT/m² (= coût de la semence) hors main-d’œuvre et charges de mécanisation.

 

Rendement : gain de fertilité de sol et de rendement grâce à la baisse des galles de nématodes.

Efficacité : très bon résultats, à combiner avec d’autres pratiques pour rendre durable l’efficacité.

Contraintes : période disponible de sept semaines a minima.

Temps de mise en place de la pratique : 13h/ha pour les deux semis et la destruction.

Travail du sol : sous soleuse et rouleau puis semis à l’épandeur à engrais.

Destruction : outil à disques ou à fraise

Carburant : 240 l/ha pour un tracteur d’une puissance 85 CV [LC1].

Témoignage de producteurs

Magali Girard et Edouard Aymard, EARL Bioval, Bouches-du-Rhône

« Il faut savoir faire des choix stratégiques »

 

 
Magali Girard et Edouard Aymard, EARL Bioval, Bouches-du-Rhône © L.Camoin
«Si vraiment on est embêté par les nématodes, je conseille le double sorgho court, c’est évident ! Jusqu’à la mise en place de la pratique du double sorgho, la quantité de galles de nématodes sur les racines de nos cultures ne faisait qu’augmenter malgré la solarisation. Depuis, nous avons observé une chute rapide de ces galles. En plus du double sorgho court que nous avons pratiqué deux années de suite, nous avons travaillé avec notre conseiller pour mettre toutes les chances de notre côté. Pour cela, nous avons été très vigilants au cycle du sorgho court : pas plus de 21 jours ! Nous avons répété le cycle trois fois de suite la première année. Au bout d’un moment, il faut savoir faire des choix stratégiques et libérer l’espace pour pouvoir continuer à produire les années suivantes. Aussi, il est important de combiner plusieurs méthodes pour arriver à observer une forte baisse des nématodes : cultures non-hôtes, non-travail du sol, amendement organique massif, solarisation… Nous avons observé très peu de galles de nématodes sur nos courgettes arrachées début juin 2021 ! La technique est facile et plus rapide à mettre en place en comparaison avec une solarisation, et le sol est bien plus souple après, il est simple à travailler. Le sol est aussi stimulé et plus vivant, nous voyons plus de vers de terre. Le coût de cette pratique est largement supportable surtout que ça joue en faveur des cultures qui produisent mieux et plus. Nous continuons tout de même la solarisation un an sur deux parce que nous faisons de la courgette et que ça nous permet de contrôler la fusariose. Si nous arrêtions la courgette, nous ne ferions que du double sorgho court entre les cultures pour améliorer notre sol.»

 

Les plus

Forte baisse des galles de nématodes sur les cultures

Pratique simple à mettre en place

Coût faible de la pratique : +/-0,04 €/m²

Pas de destruction de la fertilité du sol, ni des micro-organismes du sol

Pratique qui permet de mettre en culture rapidement ensuite

Les moins

Durée minimale de 2 fois 3 semaines + 1 semaine a minima de séchage au total (2 fois 3 jours) avant remise en culture

Créneau libre à prévoir sous abris en période estivale

Technique à combiner avec d’autres : moindre travail du sol, solarisation, apports de matières organiques fermentescibles, cultures non-hôtes

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