Pomme : dans le Tarn-et-Garonne, le virus de la granulose trouve sa place dans la lutte contre le carpocapse
Le virus de la granulose, utilisé dans la protection des pommiers contre le carpocapse, prend une place importante dans le groupe Dephy ferme arbo de Tarn-et-Garonne en bio comme en conventionnel. Combiné aux autres méthodes disponibles, il a contribué à une baisse des IFT.
Le virus de la granulose, utilisé dans la protection des pommiers contre le carpocapse, prend une place importante dans le groupe Dephy ferme arbo de Tarn-et-Garonne en bio comme en conventionnel. Combiné aux autres méthodes disponibles, il a contribué à une baisse des IFT.
La protection des vergers de pommiers contre le carpocapse repose sur une combinaison de méthodes pour avoir une efficacité suffisante, surtout en bio où il existe très peu de solutions disponibles. « Les deux principaux leviers alternatifs utilisés dans la lutte contre le carpocapse et les lépidoptères sont la confusion sexuelle et les filets Alt’Carpo, présente Julie Cadot, de la Chambre d’agriculture de Tarn-et-Garonne et animatrice du réseau Dephy ferme arbo. Ces deux leviers sont complétés, dans les systèmes conventionnels, par deux à trois interventions insecticides ciblant le carpocapse, mais aussi d’autres lépidoptères tels que la tordeuse orientale. Sur le réseau Dephy ferme, certains producteurs substituent ces insecticides par des applications de virus de la granulose. Et dans les systèmes en AB, les produits à base de Bacillus thuringiensis (Bt) et les virus de la granulose sont les seuls « bioinsecticides » utilisés en complément de la confusion et/ou des filets. » Le groupe Dephy ferme arbo du Tarn-et-Garonne est composé de douze arboriculteurs, dont onze depuis le début de sa formation en 2011. Parmi eux, onze ont un atelier bio. Ils sont tous essentiellement producteurs de pommes, avec parfois d’autres espèces comme le kiwi ou la prune, ou d’autres cultures diverses.
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Le virus de la granulose, mis au point dans les années 1980, présente l’intérêt d’être un agent pathogène à la fois naturel et spécifique, qui n’a pas d’effets sur les pollinisateurs, les auxiliaires ou encore les mammifères. Quand une larve de carpocapse ingère le virus, elle cesse de s’alimenter, prend un aspect blanchâtre, se liquéfie et meurt. Très répandue en production bio, l’utilisation du virus de la granulose se développe aussi en conventionnel. Quatre produits commerciaux sont aujourd’hui commercialisés, deux pour chacun des deux isolats de virus de la granulose identifiés jusqu’à présent. « Le virus a été identifié pour la première fois en 1964 par Y. Tanada, à partir de larves virosées provenant de vergers de pommes et de poires près de la vallée d’Allende au Mexique, explique Myriam Siegwart, de l’Inra d’Avignon, dans un article disponible sur le site de l’Inra. Il fut pour la première fois produit en masse et testé en plein champ en Californie de 1965 à 1972 et à partir de 1970 en Europe. L’isolat fut ensuite transmis à différents centres de recherche scientifique dont l’Inra en France dans les années 1980. » Dans les années 1990, l’Inra développe un partenariat avec la société Calliope et sa filiale Natural plant protection (NPP). A partir des isolats mexicains, les deux structures mettent au point le bioinsecticide carpovirusine qui reçoit une première AMM en 1998. Le produit est aujourd’hui commercialisé par Arysta Life Science, qui a racheté la gamme de produits de biocontrôle de NPP, sous le nom de carpovirusine 2000. Depuis, un autre produit à base de l’isolat mexicain est apparu sur le marché : Madex Twin d’Andermatt, qui a obtenu son AMM en 2015. Suite à des cas d’apparition de résistance signalés en 2005, des recherches ont été menées par un partenariat entre l’Inra, l’Ecole des Mines d’Alès, Natural plant protection et le Grab pour identifier une autre souche du virus. Ces travaux ont abouti à la découverte d’un nouvel isolat, qui a conduit à la production d’un nouveau produit par NPP, carpovirusine Evo 2, mis sur le marché en France en 2012. Andermatt commercialise également un bioinsecticide à base du nouvel isolat, Madex Pro. « Nous préconisons l’alternance dans l’utilisation des deux souches de virus pour éviter les cas de résistance », indique Julie Cadot.
Un développement en conventionnel
Si la lutte AB contre les lépidoptères et donc contre le carpo repose principalement sur des préparations à base de Bacillus thuringiensis (Bt), tous les ateliers bio du groupe Dephy ferme 82 utilisent aussi le virus de la granulose en plus de la confusion sexuelle dans leur stratégie de protection contre le carpocapse. Le nombre d’applications du virus en bio varie grandement au sein du groupe, de 1 à 13 selon les exploitations (6 en moyenne). En conventionnel, l’essentiel de la lutte se fait par confusion sexuelle et par des insecticides de synthèse. C’est le cas chez 11 arboriculteurs du groupe, avec une moyenne de deux traitements insecticides. Le virus de la granulose est quant à lui utilisé par 6 producteurs du groupe (en moyenne une application, jusqu’à trois). « L’utilisation du virus a contribué à l’augmentation de la part du biocontrôle dans les traitements. Celui-ci représentait 7 % des traitements en 2015 et 14 % deux ans plus tard, constate la conseillère arboriculture. L’IFT (Indice de fréquence de traitement) moyen du groupe Dephy ferme est passé de 33,5 en 2012 à 28 en 2017, en partie grâce au virus de la granulose mais également à l’utilisation des autres leviers. »
Une prophylaxie indispensable
Outre les trois principaux leviers alternatifs (confusion sexuelle, virus de la granulose/Bt et filets Alt’carpo), d’autres méthodes de protection contre le carpocapse peuvent être utiles. La prophylaxie est bien sûr indispensable. « On recommande de systématiquement détruire les fruits piqués repérés lors de l’éclaircissage ou de la récolte », insiste Julie Cadot. En cas de forte infestation, l’installation de bandes pièges cartonnées sur les troncs permet d’éliminer les larves qui préparent leur nymphose. « Les nématodes entomopathogènes peuvent être efficaces mais leur application nécessite des conditions très particulières », précise l’animatrice du groupe Dephy ferme.
Le Bt incontournable en bio
La lutte AB contre les lépidoptères repose principalement sur des préparations à base de Bacillus thuringiensis (Bt). Ce bioinsecticide est très répandu sur de nombreuses cultures. C’est un produit de contact, non systémique et agissant uniquement par ingestion. Les cristaux protéiques émis lors de la sporulation de Bt vont être ingérés et digérés dans l’intestin des chenilles, puis les cristaux vont libérer des substances toxiques qui perturbent le fonctionnement du tube digestif et provoquent un arrêt de l’alimentation, puis la mort des chenilles.