Aller au contenu principal

Pomme-Ecophyto 2018
L’expérience d’un groupe en arboriculture bio

En Maine-et-Loire, dix exploitations arboricoles bio ont décidé de former un groupe référent DEPHY Ecophyto pour échanger, évoluer et communiquer sur leurs pratiques. Premier bilan.

Parmi la batterie d’outils proposés pour répondre au défi de réduire si possible de 50 % la quantité de pesticides utilisés par les agriculteurs, 140 fermes de référence DEPHY Ecophyto ont été instaurées en 2011. Cette année, 200 groupes vont y participer. Ce dispositif – qui a pour objet de mutualiser les bonnes pratiques et acquérir des références – a mobilisé dix groupes spécialisés en arboriculture dont un en agriculture biologique, celui de GabbAnjou en Maine-et-Loire. En 2012, vingt et un groupes seront constitués, dont un groupe supplémentaire en biologie avec celui d’Adabio en Rhône-Alpes. « Des débats ont eu lieu à GabbAnjou pour savoir si l’agriculture bio qui n’utilise pas de pesticides avait sa place dans Ecophyto 2018, se rappelle Coralie Pireyre, animatrice du groupe et salariée de GabbAnjou. Finalement les arguments en faveur de l’adhésion ont primé. Cette démarche est l’occasion d’apporter des références chiffrées, d’échanger sur les pratiques et de servir de démonstration pour les autres arboriculteurs. » Mais le débat existe toujours selon l’animatrice : « Les bio craignent que leur mode de culture soit dévalorisé par une fausse interprétation des résultats puisqu’aujourd’hui un seul critère est retenu dans les comparaisons, à savoir l’IFT, l’indice de fréquence de traitements phytos. » Le calcul de l’IFT devrait être revu en 2012 pour tenir compte de l’utilisation des produits de biocontrôle (cf. fld hebdo du 24 janvier).

De l’intérêt d’un groupe hétérogène
Le groupe des dix arboriculteurs a été constitué en mars 2011. « Les exploitations sont très différentes les unes des autres, relève Coralie Pireyre. Ce que je croyais au départ un handicap est devenu finalement un avantage. Les échanges sont plus fructueux. » Ainsi, les modes de culture varient largement en raison du type de commercialisation et de l’importance du verger dans l’exploitation puisque la moitié des exploitations a une activité annexe. Six exploitations dont celle de Patrick Gautier (cf. encadré ci-dessous) commercialisent leurs produits en circuit long via la coopérative Bio Loire Océan, le groupe Côteaux Nantais ou des chaînes spécialisées comme Biocoop. Elles vendent toutes aussi en circuit court soit directement à la ferme, sur les marchés, en Amap ou en magasins spécialisés. Les autres exploitations restent sur des circuits courts, uniquement la vente à la ferme comme l’Abbaye de Bellefontaine. Les surfaces cumulées du groupe représentent près de 120 ha, le plus grand verger totalise 35 ha quand le plus petit atteint seulement 300 arbres, soit moins de 1 ha. Le Lycée de Pouillé, qui adhère à la démarche, débute sa conversion de même que l’Abbaye de Bellefontaine y réfléchit et Anne Monnier la termine.

Deux fois moins de traitements en bio
L’arboriculteur bio a recours à des produits autorisés AB non chimiques pour limiter principalement le développement des maladies et des ravageurs. C’est la raison pour laquelle il est possible de calculer l’IFT, comme pour les conventionnels. Seulement et c’est là un handicap pour la bio, le degré de toxicité n’est pas pris en compte dans cet indice. Et contrairement aux grandes cultures et à l’élevage, il n’existe pas d’IFT de référence régionale sur lequel peuvent s’appuyer les producteurs pour l’arboriculture et le maraîchage en raison du plus faible nombre de fermes dans le réseau. Néanmoins l’IFT traduit bien les différences de pratique. En 2010, l’indice a varié de 0,66 à 23,27 selon les exploitations. Or plus l’indice est élevé, plus l’agriculteur a eu recours aux produits phytos bio. Le taux le plus bas revient logiquement à Claire Billaux qui pratique une arboriculture (prune, abricot, pêche de vigne, figues) très extensive. « Cette exploitation pratique l’agroforesterie, c’est-à-dire que ses arbres fruitiers sont plantés au milieu de ses champs de céréales et d’oléagineux, remarque Coralie Pireyre. L’agricultrice ne récolte pas forcément tous les ans et base ses revenus sur ses autres activités comme les grandes cultures. Son IFT n’est donc pas comparable aux autres systèmes. En revanche, son expérience peut servir d’exemple. »
Pour les exploitations qui ont opté pour le circuit long, où les exigences de qualité des fruits sont plus importantes, l’indice est forcément plus élevé. Les taux varient aussi et de façon importante, de 14,82 à 23,27. Plus l’arboriculteur est spécialisé, plus il doit assurer sa production, surtout en circuit long. Il a donc recours a plus de traitements bio.
Les résultats sont toutefois sans commune mesure avec ceux obtenus en conventionnel. Les données compilées pour la pomme des groupes de référence indiquent des IFT supérieurs à 40, voire 50 pour les pratiques standards. Les IFT inférieurs à 30 – mais dont les objectifs de rendements sont supérieurs à 50 t/ha – correspondent à des conduites et/ou des marchés spécifiques comme le choix de variétés tolérantes à la tavelure ou des produits pour bébés.
Quant à l’agriculture bio, le potentiel ne dépasse pas les 45 t/ha, les plus faibles étant à 15 t/ha et les IFT oscillent entre 15 et 25. Ces résultats signifient que des marges de manœuvre existent notamment pour les conventionnels. En bio, la problématique est différente. « Le travail en réseau doit pouvoir nous aider à développer un meilleur raisonnement des traitements, fiabiliser les alternatives à la lutte chimique, utiliser les variétés résistantes et diminuer la pression des bio agresseurs par des systèmes de production moins favorables à leur développement », argumente l’animatrice angevine qui, contrairement à ses collègues des autres groupes du réseau, ne joue pas le rôle de conseiller technique.
Cette feuille de route se traduit cette année pour le groupe angevin par un partage des techniques pour développer la biodiversité. Le choix variétal et la diversité des espèces dans une même parcelle, la nature des haies autour et dans le verger, le type d’enherbement et les nichoirs à oiseaux sont les thèmes qui ont été retenus. Il est prévu des journées de formation comme celle qui, prochainement, se fera chez Bertrand Godebout sur les purins. L’année 2012 portera sans doute sur les marges économiques pour tous les groupes.
Régulièrement, c’est-à-dire quatre à cinq fois dans l’année, les ingénieurs réseau comme Coralie Pireyre se réunissent pour échanger, se former à diverses méthodes sous la responsabilité de la cellule d’animation nationale qui regroupe les instances publiques, l’Apca (Assemblée permanente des chambres d’agricultures), des instituts de recherche comme l’Inra (Institut national de la recherche agronomique), le réseau des instituts techniques des filières végétales et animales (Acta), les Civam (Fédération nationale des centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural) et le président du comité d’expert d’Ecophyto aujourd’hui Jean Boiffin, chercheur Inra.
Après quelques mois de fonctionnement, le bilan de ces fermes de références en arboriculture montre que les marges de manœuvre pour réduire les pesticides existent mais qu’elles sont limitées. Contrairement aux grandes cultures, les modes de cultures intermédiaires entre le conventionnel et le bio ne sont guère possibles.
Mais passer du conventionnel au bio permet d’atteindre les objectifs de réduction des pesticides avec un impact sur la santé et l’environnement avec toutefois une contrainte de moindre productivité.

Les plus lus

Parsada : ouverture ce 12 avril d'un appel à projets porté par FranceAgriMer

Initié au printemps 2023, le Plan stratégique pour mieux anticiper le potentiel retrait européen des substances actives et le…

Fraises hors sol cultivées en France
Fraise française : un bon début pour la commercialisation... à poursuivre

En retard par rapport à l’an dernier, la saison de la fraise française a bien commencé d’autant que la fraise espagnole est…

Prix des fraises françaises : il n'est « pas lié aux faibles quantités espagnoles », revendique l’AOPn

Les fraises espagnoles sont pour le moment quasi absentes de nos étals français. Pourtant, ce n’est pas cette absence ou cette…

PNR BARONNIES PROVENCALES
L’IGP Abricot des Baronnies sur la rampe de lancement

L’abricot des Baronnies, qui attendait ce printemps la toute dernière validation de son IGP, est d’ores-et-déjà en ordre de…

production de chou-fleur en Bretagne
Sica Saint-Pol de Léon : un chiffre d'affaires en hausse malgré les intempéries et la baisse des volumes

L’année 2023 a été très compliquée au niveau climatique, entraînant une baisse des volumes, mais avec un chiffre d’affaires de…

La production sous grands abris, anecdotique en termes de volumes, permet de former les nouveaux cueilleurs.
« Je n’ai jamais perdu d’argent avec l’asperge »

Dans le Maine-et-Loire, Guillaume Thomas produit de l’asperge sur 16 ha. Le producteur, adhérent à Fleuron d’Anjou, apprécie…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 354€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site filière Fruits & Légumes
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière fruits & légumes
Consultez les revues Réussir Fruits & Légumes et FLD au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière fruits & légumes