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Les f & l ont-ils raté la vague “veggie” ?

Alors que la tendance pour la baisse de la consommation de protéines animales est réelle, celle de f&l en Europe n’augmente pas. Freshfel insiste sur la nécessité de communiquer. En France, Interfel a une position radicalement différente.

Les f&l, tendance ? C’est ce qu’on pourrait croire à première vue, lorsqu’on constate le succès des modes “veggie”. Après tout, qui dit végétarien dit légumes, non ? La réalité n’est en fait pas aussi facile. Comme l’a souligné Daphne van Doorn de Freshfel lors d’une conférence à Fruit Logistica, les consommateurs sont en train de changer : vieillissement de la population, génération Y, évolution des modes de vie, engagement social et environnemental… La baisse de la consommation de protéines animales est une tendance réelle (lire ci-après). S’il n’y a pas de chiffres clairs, les végétariens et autres vegans seraient 1 milliard sur la planète (dont une majorité située en Inde). Selon une étude de la Vegan Society (Royaume-Uni) en 2015, 1,5 million de Britanniques (3 % de la population) seraient végétariens, dont 0,5 million vegan. En Allemagne, la German Vegetarian Association déclare que chaque jour 2 000 personnes deviennent végétariennes et 200 vegan, qu’il y a de plus en plus de labels et de produits vegan (le marché des substituts de viande et tartinables est de 200 M€ en 2014 contre 150 M€ en 2011). La même tendance touche les restaurants : 616 restaurants végétariens en 2016 (+94 %) et 161 vegan (+17 %).

En Belgique, McDonald’s vient de lancer, fin février, “Make it veggie”, une gamme de produits avec des substituts à la viande, 100 % végétarienne. « Notre nouveau pavé Veggie permet d’offrir une vraie alternative aux protéines animales. Nous ne voulions pas que les végétariens, les flexitariens ou simplement ceux qui font le choix de manger moins de viande – et ils sont de plus en plus nombreux – se voient confinés à prendre une salade ou un burger spécifique aux légumes », explique Kristel Muls, chargée de communication pour McDonald’s Belgique. Les industriels innovent autour de la protéine végétale. Les start-up aussi. Le Village by CA Nord de France, pépinière de start-up du Crédit agricole, a ouvert, le 27 février au Sia, le premier appel à candidatures européen pour « innover autour de la protéine végétale au service de l’alimentation humaine ». L’opération vise les start-up de moins de trois ans et porteurs de projets innovants, qui doivent permettre de « lever des freins à la consommation, notamment nutritionnels, gustatifs ou culturels », a expliqué le directeur Thierry Lebrun. Elle est menée avec des partenaires comme Bonduelle, Sodexo, les pôles Eurasanté, NSL (Nutrition Santé Longévité), avec le soutien d’IAR, pôle de la bioéconomie.

Alors que la consommation de viande baisse vraiment, celle de f&l n’augmente pas

En parallèle, la consommation de f&l en Europe stagne (en baisse depuis 2004 puis en légère hausse depuis deux-trois ans). Aujourd’hui, la moyenne européenne s’établit à 353 g/personne/jour, encore loin des 400 g conseillés par l’OMS. « L’accent semble être mis principalement sur la réduction de la consommation de viande ou la recherche de substituts et moins sur l’augmentation de la consommation de f&l », regrette Daphne van Doorn. Les f&l auraient-ils loupé la tendance ? « Sur Google, lorsque j’ai tapé “alimentation végétarienne”, je n’ai eu que des résultats pour de la viande végétarienne, des produits à base de protéines végétales, des fromages et plats préparés vegan…, illustre Eliane Steinmeyer, directrice du marché de gros de Hambourg, lors de cette même conférence. Du point de vue marketing, c’est réussi et ça se vend à des prix exorbitants. Mais pas de f&l... »

Snacking et RHD, des opportunités pour les f&l

Des opportunités existent. Le snacking pour commencer (investir les vending machines), mais aussi la RHD. « En restauration, il y a une attention croissante pour les légumes, même sans être vegan, souligne Daphne van Doorn. Au Japon, Chine, Italie, Brésil, le canal RHD représente entre 30 et 43 % du volume des légumes vendus. Au Royaume-Uni, c’est 21 %, en Allemagne 15 %. En France, ce n’est que 7 %. » Une marge de progression certaine. Le message autour des f&l est positif (“manger plus” et non “ne pas manger”), même si des allégations santé ou nutritionnelles sont très difficiles à obtenir (cf. FLD Mag du 18 mai 2016). En parallèle, d’autres tendances ont émergé, sur lesquelles les f&l peuvent surfer : local, de saison, bio, équitable, les labels de qualité. « Sur les 1 383 AOP-IGP enregistrées en UE, 376 concernent les f&l et céréales (frais et transformés) mais quelle valeur pour le consommateur ? Les études montrent que malheureusement le consommateur n’a pas assez de connaissance, il ne comprend pas, avertit Daphne van Doorn. Et la bonne image des f&l est utilisée par d’autres produits [packaging sur des produits transformés non f&l, NDLR]»

Communiquer… ou pas

Une piste ? Jouer sur la communication. Les f&l sont des produits colorés, bons pour l’environnement, amusants et polyvalents. « Il y a deux marchés de Noël végétaliens à Hambourg : on a proposé des gelées de pommes, des clémentines pour faire de la promotion, illustre Eliane Steinmeyer. Le “veggi” est une aubaine mais il faut se positionner. Il faut qu’on nous voie. On a des arguments. Surtout que ces consommateurs sont prêts à dépenser plus. On n’a pas suffisamment travaillé sur une mise en scène positive de nos produits. »

En France, l’interprofession f&l a un autre point de vue. S’il est vrai que la tendance au flexitarisme est réelle (selon le dernier baromètre de confiance des f&l, un tiers des sondés déclarait avoir réduit sa consommation de viande), Valérie Sené, directrice Marketing & communication à Interfel, explique : « Est-ce que les f&l frais ont raté la mode du vegan ? Non. On ne communique pas sur ce sujet volontairement. Nous, nous promouvons une alimentation équilibrée, et non être dans les excès avec la mode des régimes “sans”. L’homme est foncièrement omnivore. Et lorsque la communication touche à la santé humaine, il faut faire attention. Oui, il y a une tendance favorable au végétal. Oui, nos produits y répondent. Mais une communication ne doit pas se faire au détriment de la santé. »

Quelques définitions

Flexitarisme : consiste en une consommation variable et réduite en viandes et en produits carnés, sans les exclure totalement. L’objectif : consommer moins de viande mais de meilleure qualité.

Végétarisme : exclure de son alimentation les viandes, poissons et fruits de mer, mais pas le lait et les œufs.

Végétalisme et veganisme : déclinaisons du végétarisme. Le végétalien ne consomme que des aliments issus du monde végétal. Le vegan choisit un mode de vie basé sur le refus de tout produit issu de l’exploitation animale, ce qui peut dépasser le champ de l’alimentation (vêtements par exemple).

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