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Élever et engraisser du charolais à plus de 800 mètres d’altitude

Avec un cheptel de 100 vaches charolaises système naisseur engraisseur en zone d’altitude, le Gaec du Logis neuf dans le Puy-de-Dôme n’a de cesse d’innover pour valoriser au mieux surfaces et animaux. La vente directe est la dernière étape en date.

« La particularité de notre exploitation est d’être en permanence à la recherche de solutions novatrices adaptées à l’exercice de notre métier. Nous avons souvent été des précurseurs dans le département sur différents volets : Gaec mari-épouse, vêlage à 2 ans, génotypage, ensilage de méteil immature, blé meunerie haut de gamme… Nous réfléchissons toujours à des projets d’amélioration qui donnent de la valeur à notre exploitation », s’enthousiasme Denis Rigoulet, en Gaec avec son épouse Christelle à Condat-lès-Montboissier, dans le Puy-de-Dôme.

En plus de leur ferme, le couple s’investit dans la vie professionnelle et communale, Christelle au niveau syndical et Denis comme second adjoint à Condat-lès-Montboissier. Ils ont le goût du travail bien fait et partagé en équipe. Le Gaec compte 2,5 unités de main-d’œuvre dont 0,80 salarié : un apprenti et un recours régulier à un salarié de la Cuma. Un stagiaire vient systématiquement chaque année « faire ses classes » sur l’exploitation dont la configuration morcelée (70 îlots sur trois sites dont deux d’estive) nécessite un appel ponctuel au service de remplacement pour absorber le gros coup de travail printanier : refaire les clôtures. Très vite la solution du « salarié qui ne cotise pas à la MSA ! » : le chien de troupeau s’est imposé avec Houps et Mie, deux borders collies achetés dressés. Aujourd’hui ces animaux font partie intégrante de l’organisation du travail. « Cela amène de la sérénité dans les déplacements des animaux qui sont de ce fait particulièrement calmes », souligne Christelle. Mie est particulièrement dédiée au déplacement des veaux dans la stabulation. « Elle les pousse presque maternellement avec la patte pour les faire entrer dans leurs boxes ! »

Alimentation : menus terroir à la carte

97 % des fourrages sont produits sur l’exploitation et l’autonomie des rations est de 90 %. Leur utilisation est réfléchie par catégorie d’animaux, comme l’épeautre donné aux veaux encore en bâtiment pour leur développer la panse. Toutes les rations sont régulièrement recalculées à partir des analyses de fourrages et en fonction des stades physiologiques de chaque lot. Elles sont complétées et ajustées si besoin par des informations telles que les pesées des taurillons, réalisées mensuellement.

Pour le bien-être des bovins, il est fait appel à la paille pour la litière. Cela a un coût important à cette altitude. La solution retenue pour en minimiser l’impact est double. D’abord cultiver une douzaine d’hectares de blé meunerie haut de gamme qui apporte une partie de la paille nécessaire, puis consacrer les recettes de cette production pour acheter le complément. Ensuite économiser cette paille. Pour ce faire, les bâtiments ouvrent tous au sud où de véritables parcours par lot de stabulation ont été créés afin que les vaches et veaux puissent aller prendre l’air lors des belles journées d’hiver. C’est le principe des parcours pour les poulaillers. Cela permet d’utiliser moitié moins de paille qu’en système fermé tout l’hiver.

Génétique : du charolais… rustique

À plus de 800 mètres d’altitude, élever et surtout engraisser du charolais est une performance peu courante. L’analyse du BGTA (bilan génétique des troupeaux allaitants) montre un effet élevage négatif (-15,8 kg) qui s’explique par les conditions d’altitude et une conduite alimentaire raisonnée avant sevrage. Par contre, la sélection continue sur la valeur laitière des mères et la croissance des pères permet une incidence génétique attendue sur la production de + 5,6 kg ! Un bon argument de vente auprès des acheteurs de reproducteurs et une garantie de croissance à l’engraissement sur des rations essentiellement à base d’herbe (ensilage 2e coupe).

« Mon renouvellement se fait sur des critères objectifs de poids au sevrage, de pointage adulte des mères, de gène sans corne, du caractère et de plus en plus des résultats du génotypage. Quant aux réformes, si le critère d’âge est pris en compte, c’est le fait d’être vide, de ne plus donner suffisamment de lait ou d’avoir de grosses tétines, qui conditionne mon choix. Je n’hésite cependant pas à garder de vieilles vaches qui produisent bien comme ma donneuse d’embryons de 12 ans ! »

 

À la recherche d’une haute valeur environnementale

Pour répondre aux attentes des consommateurs et valoriser leur métier, Christelle et Denis se sont engagés dans la démarche Alterbiotique. Elle les accompagne dans la prévention des risques sanitaires et le soin aux animaux, leur propose des solutions alternatives aux antibiotiques et le respect des bonnes pratiques d’élevage, le tout pour aider à la juste rémunération des produits à la vente. Les résultats sur les quatre postes mesurés sont très encourageants et permettent d’avoir des arguments vis-à-vis des consommateurs et des détracteurs ignorant des réalités de l’élevage.

Conscients de l’importance des aspects environnementaux, le Gaec est dans la démarche de l’obtention du logo HVE (Haute valeur environnementale) où ils sont en niveau 1 et dans l’attente de passer en niveau 3.

Désormais, les objectifs de ces deux quinquagénaires sont d’augmenter la part des animaux qu’ils commercialisent en vente directe en rajeunissant la gamme des animaux qu’ils commercialisent en l’étendant à des caissettes de veaux sous la mère et de jeunes génisses, trop légères pour être mises à la reproduction avec l’objectif d’un premier vêlage à 24 mois. Ils comptent également ne proposer que des mâles reproducteurs vendus autour de 18 mois et génotyper systématiquement toutes les velles. À plus long terme, c’est la transition « retraite » qui commence à interpeller le couple. Ils souhaitent transmettre une exploitation viable, dynamique, ouverte où il fait bon travailler. Ils sont à la recherche d’un jeune à parrainer pour faire la soudure avec leur départ progressif.

Résultats sur 4 points

- Bonnes pratiques : 100 % des pratiques d’élevage sont conformes à la charte des bonnes pratiques ;

- Bien-être animal : 7 des 9 items évalués par la grille Boviwell ont obtenu un score supérieur à 80 ;

- Substitution : 0,36 traitement antibiotique par animal et par an. C’est le score le plus bas enregistré, les calculs sur ce point ayant été faits à plusieurs reprises pour validation !

- Formation : Christelle a suivi un programme de formation au bien-être animal.

Commercialisation : virage vers la vente directe

Fervent coopérateur, à l’instar de Pierre Rigoulet, père de Denis, qui s’est engagé pendant plus de trois décennies comme président d’un important groupement de producteurs puydomois, le Gaec prend aujourd’hui ses distances pour retrouver l’essence originelle : le souci de la rémunération des productions des éleveurs. Aujourd’hui, jugeant la gouvernance trop éloignée des coopérateurs de base et insuffisamment valorisatrice des productions, Christelle et Denis se sont lancés en 2021 dans la vente directe d’une partie de leur production : essentiellement vaches et génisses. « Si la valorisation au juste prix de notre production est la raison principale de cette nouvelle aventure, le contact avec les consommateurs est devenu pour nous quelque chose de fondamental. »

Livraison à domicile

Comme dans toutes leurs entreprises, se lancer dans la vente directe a été mûrement réfléchi. Avec l’expérience de la vente des reproducteurs et donc un contact client régulier, le choix de livrer à domicile des caissettes de viande de 5 à 10 kg a été privilégié. Avec leur fille, Christelle et Denis Rigoulet ont réfléchi à leur politique marketing et ont monté un site internet (gaecdulogisneuf.com) dont le logo est une vache allongée sur un sofa, une marguerite à la bouche : tout un symbole !

Christelle insiste : « le bien-être de nos animaux est pour nous une priorité et économiquement des animaux bien traités sont plus rentables. Nous souhaitons faire partager cette vision avec nos clients : c’est pourquoi nous organisons fréquemment des visites à la ferme pour que le public non au fait de l’agriculture puisse découvrir notre métier, la façon dont nous l’exerçons et faire tomber un certain nombre d’a priori qui nuisent à l’image de l’élevage ».

Chiffres clés

160 ha de SAU situés à 800 m pour le siège de l’exploitation et deux estives à 900 et 1 000 m ;

7 ha de méteil valorisé en ensilage immature, 20 de céréales dont 2 d’épeautre, 5 d’orge et 13 de blé ;

130 ha de SFP dont 55 de prairies naturelles et 55 de prairies temporaires (trèfle violet, blanc, dactyle et fétuque) avec beaucoup de rotations du fait de la présence de rats taupiers.

100 vaches charolaises inscrites, vente taurillons finis, broutards repoussés et reproducteurs.

1,23 UGB/ha SFP

2,5 MO dont 0,80 salarié, apprenti et stagiaire.

Marine Berthon, conseillère élevage viande EDE Puy-de-Dôme : "Tous les outils génétiques sont utilisés"

Élever et engraisser du charolais à plus de 800 mètres d’altitude

« Ce qui est remarquable au Gaec du Logis neuf, c’est l’utilisation de tous les outils permettant de connaître, d’améliorer et de diffuser la génétique. C’est un des premiers élevages du Puy-de-Dôme à avoir adhéré à Bovins croissance et au herd-book. Adepte de l’insémination, il fait partie du noyau de sélection Ucatrc puis du noyau sans corne et gamme avenir de Charolais univers. Tous les accouplements sont raisonnés et la transplantation embryonnaire permet une valorisation génétique des meilleures vaches. L’appel au génotypage a été réalisé dès que cette méthode est apparue. Il a débuté par celui des mâles reproducteurs à vendre pour apporter plus d’informations aux clients. Déçu du manque d’enthousiasme de ces derniers, ce sont aujourd’hui toutes les génisses qui sont génotypées de façon à mieux sélectionner les élèves et d’avoir une connaissance exhaustive de la valeur du troupeau. »

 

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