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Le Gaec de la Garenne vise l’autonomie alimentaire pour ses chèvres

Dans la Vienne, le Gaec familial de la Garenne a pour objectif d’atteindre l’autonomie alimentaire en alliant grandes cultures et élevage caprin.

Au petit matin, les associés du Gaec de La Garenne, à Blanzay dans la Vienne, s’activent autour de la mélangeuse. Il faut distribuer la ration aux 650 chèvres de la ferme à la fin de la traite. Les chèvres ont la chance de consommer local sur 75 % de leur ration, concentrés compris, grâce à la stratégie d’autonomie alimentaire que se sont donnée pour cap Émilie Takacs, son frère Nicolas Cordeau et leurs parents. C’est Nicolas qui a doublé l’atelier caprin en 2012 lors de son installation, passant de 350 à 650 têtes. Émilie, elle, a rejoint le Gaec en 2018, après avoir été vétérinaire pendant 10 ans puis salariée à mi-temps sur la ferme un an avant de s’associer. Le Gaec de La Garenne repose sur deux ateliers : la production laitière d’une part, entièrement livrée à la coopérative Eurial (soit 521 000 litres produits en 2020). D’autre part, le Gaec compte 250 ha de grandes cultures de blé tendre, tournesol, maïs grain, pois, colza, avoine d’hiver et féverole dont une grande partie est autoconsommée par le troupeau. Seuls le blé, le colza et le tournesol sont produits pour la vente. Sur les 300 hectares de SAU totale que compte la ferme, une cinquantaine est dédiée à l’affouragement de l’atelier caprin. Ces surfaces fourragères se trouvent à proximité de la ferme tandis que la majeure partie des cultures de vente et des concentrés fermiers se trouvent à Pressac, soit à 35 kilomètres du site principal à Blanzay.

La ressource fourragère se compose de 30 hectares de luzerne, le reste étant en prairies naturelles pour récolter du foin de graminées. C’est dans une optique d’optimisation de la ration et de réduction des refus que Nicolas et ses parents ont rapidement investi dans une mélangeuse après l’arrivée sur l’exploitation du jeune éleveur. « La capacité d’ingestion de fourrage par les chèvres augmente, avec quasiment aucun refus, souligne Émilie Takacs. Avec une meilleure utilisation du fourrage, nous arrivons à diminuer la part de concentré dans la ration. Nous veillons à ce que la qualité nutritionnelle de la ration varie le moins possible à l’année. À nous de prévoir les stocks nécessaires. » L’atelier caprin représente la plus grosse activité de l’exploitation et le chiffre d’affaires le plus important. L’organisation du travail gravite donc autour des moments forts de l’élevage. Par ailleurs, la mélangeuse requiert à elle seule une heure et demie de travail par jour et représente donc une charge de travail importante. C’est Nicolas, le frère d’Émilie, qui en a la charge ainsi que le travail aux champs, avec son père.

De la longévité fonctionnelle et une bonne composition du lait

Émilie s’occupe de la conduite du troupeau avec sa mère. « Mon axe de travail, c’est de parvenir à dégager de la marge sans faire cracher du lait à nos chèvres. Elles sont des Formule 1 et de ce fait sont fragiles. Nous veillons donc à ne pas trop les pousser », explique-t-elle. En 2020, les chèvres ont produit en moyenne 826 litres de lait chacune. Les associés orientent l’amélioration génétique du troupeau sur de la longévité fonctionnelle et des bons taux et non uniquement la quantité. Ils ont recours à l’insémination artificielle de 108 chèvres et sont suivis par le contrôle laitier. « Nous voulons amortir au maximum le coût d’élevage des chevrettes, aussi nous ne réformons pas sur l’âge mais plutôt sur le niveau de production. »

Embauche, nouvel associé ou automatisation ?

La répartition du travail est un défi pour les années à venir, avec le départ en retraite des deux parents d’ici trois à quatre ans. Aujourd’hui, en plus des associés, le Gaec compte un salarié et un apprenti qui viennent en renfort sur la conduite du troupeau, la traite et le nettoyage. À l’avenir, Émilie et son frère s’interrogent : vont-ils embaucher un salarié supplémentaire, recruter un nouvel associé ou automatiser davantage le bâtiment d’élevage pour dégager plus de temps disponible ? « Notre système est aujourd’hui bien rodé et il est cohérent autant au niveau de la taille du troupeau et des surfaces agricoles, soutient Émilie Takacs. Le devenir de la main-d’œuvre est notre plus forte interrogation quant à l’avenir de l’exploitation. » Pour l’éleveuse, la complémentarité entre élevage et grandes cultures est intéressante, au niveau de l’approvisionnement en paille notamment et l’amendement des terres par le fumier. Avec les cultures de protéagineux dédiés à la consommation du troupeau, les assolements sont plus longs avec plus de variétés de plantes, donc cela apporte un cortège d’avantages agronomiques pour les sols.

Par contre, les chèvres étant désaisonnées, la période de mises bas se trouve aux alentours du 20 octobre ce qui coïncide avec une période de forte activité sur les cultures. « C’est le moment où nous réalisons les semis de blé. Nous devons alors embaucher un saisonnier pour pouvoir passer convenablement la surcharge de travail. »

Les coûts de production de l’atelier caprin

 

 
Coût de production de l'atelier caprin © Inosys-Réseaux d'élevage
Coût de production de l'atelier caprin © Inosys-Réseaux d'élevage

 

Avec une stratégie d’exploitation tournée vers l’autonomie alimentaire du troupeau caprin, le Gaec de la Garenne parvient à maîtriser les coûts de la ration à hauteur de 176 euros pour 1 000 litres de lait produits. En prévision d’une diminution de la main-d’œuvre associée, les éleveurs du Gaec de La Garenne ont dû trouver des arrangements pour réorganiser la charge de travail et sont en cours de conversion vers une agriculture de conservation des sols, donc avec moins un itinéraire technique allégé.

À la recherche de l’autonomie alimentaire maximale

 

 
Autonomie alimentaire du Gaec de la Garenne © Inosys-Réseaux d'élevage
Autonomie alimentaire du Gaec de la Garenne © Inosys-Réseaux d'élevage

 

Émilie Takacs et ses associés du Gaec de La Garenne ont développé une stratégie de complémentarité entre élevage caprin et atelier grandes cultures pour atteindre une autonomie alimentaire maximale. Cet objectif est en passe d’être atteint pour la partie fourrage, dont l’autonomie énergétique et protéique est respectivement de 96 et 97 %. C’est au niveau des concentrés que la marge de progression reste la plus importante avec 40 % d’autonomie protéique et 26 % pour l’apport énergétique. Les chevrettes reçoivent un aliment du commerce, ainsi que les chèvres au pic de lactation. Les associés achètent également du tourteau de soja à hauteur de 80 grammes par chèvre et par jour. « En 2020, nous avons dû aller jusqu’à 120 grammes de tourteau par chèvre pour compenser la qualité plus faible de nos fourrages », développe l’éleveuse. Au total, la ration distribuée aux chèvres est constituée des produits de l’exploitation pour 71 % de sa masse et de son apport énergétique et à hauteur de 59 % pour la protéine.

La ration mélangée se compose de 700 grammes de foin de luzerne 3e coupe, 1,3 kg d’ensilage de luzerne de première coupe, 2,4 à 2,6 kg d’ensilage de maïs. À cela s’ajoute du maïs grain pour ajuster la ration, 100 g de féverole. Les chèvres reçoivent par ailleurs 180 g par jour d’avoine en salle de traite, ainsi que 600 g d’aliment chèvre laitière du commerce et ainsi que du tourteau de soja. Les concentrés issus de l’exploitation peuvent varier d’une année à l’autre selon les stocks réalisés et les réussites de semis. L’autonomie protéique de l’exploitation est en constante amélioration et, en 2021, les chèvres ont reçu, en plus de la féverole, 200 g de pois concassés au lamineur.

Pour maintenir ce cap et sécuriser la ration face aux aléas climatiques, les associés du Gaec de La Garenne ont mis en place un partenariat avec deux agriculteurs voisins des deux sites de production. Ils échangent avec eux de la paille contre du fumier. De plus, ils achètent du maïs ensilage irrigué sur pied à un agriculteur voisin afin d’en avoir à disposition sur six mois de l’année.

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