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« Je suis confiant dans l’avenir du chevreau »

Pandémie en 2020, flambée des charges en 2022, la filière chevreau a traversé deux crises successives. Si les volumes commercialisés ont été « sauvés », le prix du petit chevreau a pâti de ces difficultés. Entretien avec Matthieu Loeul, président du directoire d’Alliance Loeul & Piriot Multilap.

Avec 70 % des volumes de chevreaux entre janvier et juin, la demande de fin d'année ne peut être satisfaite.
Avec 70 % des volumes de chevreaux entre janvier et juin, la demande de fin d'année ne peut être satisfaite.
© C. Boyer

Quel volume de chevreau travaille Loeul & Piriot chaque année ?

Matthieu Loeul, président du directoire d’Alliance Loeul et Piriot Multilap (ALPM). © Loeul & Piriot
Matthieu Loeul - Le groupe Alliance Loeul & Piriot Multilap (ALPM) est spécialiste des viandes de lapin et chevreau. Notre activité se fait sur notre site de Thouars dans les Deux-Sèvres qui abat un peu plus de 300 000 chevreaux par an en moyenne. Les volumes se concentrent à 70 % sur trois mois de l’année, de fin janvier à mi-juin. Nos débouchés sont à 65 % à l’export, 20-25 % en supermarchés et 10-15 % des grossistes. Il n’y a quasiment pas de ventes à la restauration collective. Pour les fêtes de fin d’année, nous traitons environ 5 à 6 % des volumes annuels. Contrairement à d’autres filières, nous sommes sur des flux poussés et sur de très courtes périodes. Et cette saisonnalité s’accentue. Nous avons de moins en moins de chevreaux à Noël alors que la demande est là, avec un report des volumes au printemps.

Quelles sont les solutions pour augmenter la consommation intérieure ?

M. L. - La plus grosse difficulté en viande caprine est d’avoir une offre toute l’année, ce que l’on appelle la présence en fond de rayon, en complément des événements autour des temps forts de Noël et Pâques, et des promotions.

Pour développer de nouveaux marchés, nous avons testé lors de la pandémie de Covid-19 des produits désossés, avec peu de succès. Nous ne parvenons pas à obtenir un produit fini parfait sans poils avec nos procédés actuels. Sur les 3 tonnes travaillées, nous en avons vendu 2. Entre le coût de la main-d’œuvre et la baisse du rendement carcasse, l’impact sur le prix est très important et un frein à l’achat. Ces deux éléments expliquent aussi la faible présence de la viande de chevreau en restauration hors domicile qui demande principalement des produits sans os, à faible prix.

Mais avant d’aller sur du désossé, on peut travailler les découpes. Nous le faisons pour répondre à la demande de plus petits foyers. Nous finalisons un produit pour la rentrée de septembre avec de plus petits morceaux que les demi ou quart de chevreaux habituels, et un prix portions réduit.

Comment se sont déroulées les dernières négociations commerciales annuelles ?

M. L. - Nous avons réussi à répercuter une bonne partie de nos coûts de production. Ces hausses sont notamment liées à la flambée de la poudre de lait qui a crû de 30 à 40 % depuis 2022 et a fait augmenter le prix du chevreau sorti engraissement de 20 %. L’électricité, les salaires, les emballages… nos charges ont fortement augmenté.

Nous sommes dépendants de l’export et du consentement à payer des consommateurs. Notre principal concurrent est le chevreau grec, dont la viande est moins blanche, mais son coût de production est inférieur à celui du chevreau français. En Italie et au Portugal par exemple, les consommateurs sont touchés par l’inflation, et nous commençons à avoir des difficultés sur les prix.

Vous avez lancé une démarche bien-être animal en lapin, qu’en est-il du chevreau ?

M. L. - Je suis convaincu qu’il faut avancer sur la question du bien-être animal. Mais il faut le faire à condition d’avoir des clauses miroirs qui s’appliquent aux produits importés. Si on continue à avancer en Europe sans cette réciprocité des exigences réglementaires, ce sera la fin de l’élevage chez nous. En chevreau, la priorité est l’utilisation de la charte des bonnes pratiques. L’objectif est de réduire les pathologies des chevreaux et l’utilisation d’antibiotiques.

Le projet de directive transport est une source d’inquiétude pour nous, avec pour conséquence un besoin accru en camions et chauffeurs et un surcoût à répercuter au consommateur.

Les relations dans la filière sont souvent difficiles, comment peuvent-elles s’apaiser ?

M. L. - Les élevages ont un rôle primordial dans notre filière, et il est difficile de valoriser le petit chevreau au bon prix. Pour apaiser nos relations, il faut que tous les acteurs soient autour de la table. Nous avons besoin les uns des autres. Pour cela, il faut discuter, trouver des consensus entre les trois parties et encourager les initiatives. L’engraissement à la ferme se développe, c’est un autre métier que le nôtre, avec des carcasses plus lourdes que nous ne pouvons pas traiter. Notre métier est celui de la valorisation des chevreaux légers en grandes et moyennes surfaces et à l’export, ainsi qu’en boucheries traditionnelles.

Pour la filière chevreau, je vois un avenir plus positif qu’en 2020, en pleine pandémie. Nous avons réussi à passer deux crises majeures et je suis plutôt confiant. Le chevreau est une viande festive ; nous devons maintenir cet aspect pour soutenir la consommation.

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