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La montée à l’estive cultive l’image des races bovines rustiques

Interrompues en 2020 et 2021, les fêtes organisées à l’occasion des montées à l’estive ont enregistré leur habituel succès cette année. Un bon moyen de faire apprécier l’élevage et les produits qui en sont issus en confortant la notoriété de territoires préservés, appréciés des randonneurs.

Au col de Bonnecombe en Lozère, comme sur d'autres sites dans l'Aveyron ou le Cantal, les fêtes organisées à l'occasion des montées à l'estive sont aussi l'occasion de mettre en avant l'élevage allaitant et la viande bovine.
Au col de Bonnecombe en Lozère, comme sur d'autres sites dans l'Aveyron ou le Cantal, les fêtes organisées à l'occasion des montées à l'estive sont aussi l'occasion de mettre en avant l'élevage allaitant et la viande bovine.
© M. Crueyze

Qu’il pleuve, qu’il neige, ou — comme cette année — que le soleil brille de tous ses feux, autour de la Saint Urbain (le 25 mai) les troupeaux d’aubracs et de salers hivernés dans les fermes situées dans les zones basses du Massif central reprennent le chemin des prairies d’altitude. Pour leurs éleveurs, ces départs en direction des estives enfin reverdies et couvertes de fleurs marquent la véritable fin de l’hiver.

Cette « migration transitoire » correspond d’abord à une exigence fourragère. Elle permet de reconstituer les stocks dans les zones basses tandis que les troupeaux utiliseront des parcelles entre 1 100 et 1 500 mètres d’altitude où l’herbe pousse plus tard en saison. Cette pratique ancestrale, inscrite en France en 2020 au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, rythme donc le passage de l’hiver à l’été. Autrefois, cette montée à l’estive se faisait forcément à pied.

Elle est désormais largement mécanisée. La fin mai se traduit par une noria de camions et de bétaillères qui quinze jours durant sillonnent les routes du Massif central en direction des estives. Les distances sont parfois conséquentes. Bon nombre de troupeaux passent l’été à plus de 100 kilomètres de leur ferme d’origine.

Plusieurs fêtes de la transhumance

Mais tous ne montent pas forcément pour cela dans un véhicule. Une partie le fait à pattes tandis que leurs propriétaires les escortent à pied. Certains troupeaux réalisent cette migration saisonnière lors de fêtes de la transhumance. La plus ancienne a été initiée il y a quarante et un ans dans l’Aveyron et a rapidement fait des émules.

Depuis trente ans, une fête similaire est organisée au col de Bonnecombe, en Lozère, sur la bordure sud du plateau de l’Aubrac. Les éleveurs du Cantal ont embrayé sans tarder, en organisant eux aussi à partir de 1997 à Allanche au cœur du plateau du Cézallier une fête qui salue sur le même principe le retour des troupeaux sur les zones d’estive en la réservant alors à des troupeaux de salers. Pour être exhaustif, il convient également de citer la fête organisée à Saint-Geniez-d’Olt dans l’Aveyron ainsi qu’à Saint-Paul-de-Salers dans le Cantal.

Autant d’évènements qui ont comme un petit air de tour de France ! Mais à la différence de ce dernier, ce ne sont pas des cyclistes que la foule vient encourager et admirer, mais des vaches et leurs propriétaires. « C’est une respiration pour le pays. Cela attire du monde et fait connaître nos régions », souligne Marlène Crueyze, enseignante au lycée agricole Terre Nouvelle à Marvejols en Lozère et coprésidente de l’association Aubrac Sud-Lozère qui organise la transhumance au col de Bonnecombe.

Le côté le plus surprenant de ces fêtes est certainement leur capacité à attirer les foules pour un spectacle qui consiste d’abord au défilé de plusieurs troupeaux conduits par leurs propriétaires accompagnés de leurs familles et de leurs amis. Le nombre de visiteurs est difficile à quantifier. Il est forcément influencé par la météo mais chaque année plusieurs milliers de passionnés participent. Le nombre de camping-cars progresse d’année en année et le fait que les chambres d’hôtel et gîtes ruraux affichent tous complets à la date clé confirme un engouement qui ne faiblit pas. Bien au contraire !

Reconnaissance du patrimoine rural

« C’est un moment tout simple. Les vaches sont belles, bien préparées et les éleveurs légitimement fiers de montrer leur troupeau. Que ce soit à Aubrac, Bonnecombe ou Allanche, c’est une forme de reconnaissance de notre patrimoine rural. C’est aussi tout simplement l’occasion de passer une bonne journée dans de magnifiques paysages », estime Bernard Bastide, président du parc naturel de l’Aubrac, restaurateur et maire de Nasbinals, joli village situé au cœur du plateau.

Les organisateurs sont surtout unanimes pour saluer le rôle moteur de ces évènements pour faire connaître ces régions, leurs élevages et les produits qui en sont issus. C’est d’autant plus vrai que les bonnes retombées médiatiques à la suite de ces fêtes sont autant de caisses de résonance pour en conforter l’impact. Les réseaux sociaux et le bouche-à-oreille font le reste.

« Les gens viennent de partout. Certains de l’étranger. Une année à Bonnecombe, nous avions des voitures de soixante-sept départements. C’est réconfortant. On est content de rappeler le fonctionnement de nos élevages et l’importance des bovins pour maintenir les paysages ouverts. C’est l’occasion de communiquer sur notre métier, notre race et les produits qui en sont issus. On promeut à la fois nos paysages et nos traditions » , ajoute Marlène Crueyze.

Faire connaître la viande locale

La viande locale est forcément largement mise en avant. « La transhumance a contribué à faire connaître le label rouge Bœuf fermier aubrac. Les gens voient nos animaux et le contexte dans lequel ils sont élevés. On a invité à plusieurs reprises des responsables boucherie de chaînes de supermarché à participer », ajoute Christian Bonal, éleveur et président de l’association Tradition en Aubrac qui organise la fête au hameau d’Aubrac.

Et ce dernier de souligner l’importance du travail des bénévoles. « Nous avons huit associations partenaires. Il n’y a qu’une demi-douzaine de personnes qui résident dans Aubrac toute l’année. Or côté logistique, il faut monter les chapiteaux, amener tables et chaises et être certain que tout ce qui est nécessaire sera là au bon moment. Sans les bénévoles qui montent puis démontent et rangent les infrastructures, cette fête ne pourrait pas avoir lieu. »

Lire aussi : Les boeufs gras de Bazas : 740 ans de tradition

L’impact est évident pour le développement du tourisme avec la randonnée pédestre comme activité phare. « Les gens qui viennent sur l’Aubrac sont d’abord des amoureux de la nature et de nos grands espaces préservés. Et la nature y est belle parce qu’elle est entretenue par les bovins. Les gens veulent marcher et se ressourcer dans nos paysages où ils veulent voir de beaux troupeaux », ajoute Bernard Bastide.

Ce dernier de préciser : « ces fêtes ont de beaux jours devant elles. Je suis totalement serein par rapport à cela. On peut aller vers davantage de modernisme, mais ce n’est pas pour autant qu’il faut laisser nos traditions. C’est une des meilleures publicités que l’on puisse avoir pour promouvoir notre territoire. »

 

Trois questions à Christian Bonal, président tradition en Aubrac

On promeut notre belle région

Comment expliquer le succès des fêtes organisées à l’occasion des montées à l’estive ?

Ce sont des évènements authentiques, en lien avec le territoire, nos traditions d’élevage, nos races rustiques et ceux qui les élèvent. Il y a un peu plus de 40 ans quand a été organisée à Aubrac la première édition, ses initiateurs avaient parfois été dénigrés comme les promoteurs d’un « folklore local » relevant d’un passé révolu. Leurs détracteurs ne voyaient pas l’intérêt de mettre en avant ces montées à l’estive à pied derrière les animaux. Les années qui ont suivi leur ont donné tort avec une manifestation qui est rapidement montée en puissance et un succès qui depuis ne se dément pas.

D’ailleurs, un peu à l’image de ce qui a été initié à Aubrac, d’autres fêtes de la transhumance sont désormais organisées dans d’autres départements du Massif central, dans les Vosges et les Pyrénées.

L’afflux de visiteurs est-il un bon moyen pour faire connaître tant la race que la viande qui en est issue ?

Les gens qui viennent voient le contexte dans lequel sont élevés nos animaux. Les éleveurs, leur famille et les amis qui les accompagnent prennent le temps de discuter avec les visiteurs. Les questions sont un peu toujours les mêmes. Elles tournent essentiellement autour de la conduite d’élevage (alimentation, mises à la reproduction, périodes de vêlage…). On n’oublie pas de rappeler à la fois la finalité de nos troupeaux et les deux démarches qualité (label rouge Bœuf fermier aubrac et IGP Fleur d’Aubrac) dans lesquelles une partie de nos animaux sont valorisés. On rappelle évidemment l’importance de nos bovins pour entretenir la beauté, mais également la biodiversité présente sur ces estives. En matière de viande, le mot Aubrac est porteur. À côté de la race, il est associé à une identité géographique forte et à son cadre préservé. Derrière la viande, on fait la promotion de notre belle région.

Cela se traduit-il par des retombées pour l’ensemble des acteurs de l’économie de cette région ?

Les journalistes qui nous aident à faire connaître l’Aubrac en tant que race et entité géographique sont souvent venus pour la première fois chez nous à l’occasion de ces transhumances. Par la suite cela les incite généralement à revenir pour mieux découvrir et faire connaître d’autres facettes de notre territoire et plus globalement sur tous les différents acteurs qui contribuent à l’économie de notre région. Nos paysages, nos chemins de randonnée, notre gastronomie sont de mieux en mieux connus. Cela se ressent nettement quand on est au Salon de l’Agriculture où aujourd’hui la plupart des visiteurs savent situer l’Aubrac. C’était loin d’être le cas il y a trente ans.

Les différents reportages ont également permis à des éleveurs situés dans d’autres départements ou pays de découvrir notre race. Après mûres réflexions cela a parfois été le premier facteur qui les a incités à mettre en place des troupeaux sur des territoires parfois bien éloignés de l’Aveyron, du Cantal ou de la Lozère.

 

Marlène Cruyeze, enseignante au lycée agricole Terre Nouvelle en Lozère et coprésidente de l’association Aubrac-Sud Bonnecombe

Une ambiance simple et festive

« La réussite de ces évènements tient pour moi à l’association de plusieurs données clés. C’est d’abord, bien évidemment ces troupeaux joliment décorés qui font la fierté de leurs éleveurs. C’est ensuite, le calme et la beauté des paysages grandioses traversés par ces troupeaux. C’est aussi, l’ambiance simple et festive autour de laquelle les visiteurs aiment à se retrouver et enfin, pour être complet, la possibilité de manger sur place les produits locaux et en particulier l’aligot et la viande d’aubrac. C’est l’alchimie de cet ensemble qui fait que la sauce a pris et que ces évènements plaisent. Les réseaux sociaux sont extrêmement efficaces pour les promouvoir. De plus en plus de gens apprécient notre territoire et ses paysages sont restés intacts, propres et préservés. Le formidable développement du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle en est une belle démonstration. Il a su séduire de nombreux randonneurs avec une affluence qui ne se dément pas d’année en année. »

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