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Guillaume Cognat, éleveur charolais dans l’Ain : « un système facile à vivre et performant »

Dans l’Ain, tous les choix de Guillaume Cognat visent le confort de travail. Son système est extensif avec un troupeau charolais de haut niveau génétique donnant des carcasses lourdes. Il vend des broutards et les génisses sont valorisées dans la filière locale Viandes des pays de l’Ain.

Dans le Bugey, sur la commune de Montréal-la-Cluse, l’élevage charolais de Guillaume Cognat est à la fois en territoire périurbain et en montagne. En effet, le siège de l’exploitation, en fond de vallée, est ceinturé par une ligne TGV et des routes où la circulation est très dense sur certains horaires. Le parcellaire se présente sur un rayon de cinq kilomètres autour, mais en 65 îlots. « Nous arrivons maintenant à le stabiliser, mais pendant longtemps, il n’y avait pas d’années où on ne perdait pas de surfaces – entre 0,5 à 10 ha par an », explique Guillaume Cognat. Les éleveurs ont perdu leurs meilleures prairies. « En contrepartie, nous trouvons aussi des avantages à être « en ville » : nos fournisseurs sont tout proches, la vie sociale pour toute la famille est facilitée. Nous voyons aussi dans cette situation l’occasion de donner à nos voisins la meilleure image du métier d’éleveur. » Guillaume Cognat a la chance d’avoir ses cultures sur une autre commune non concernée par l’urbanisation. Il valorise aussi un alpage collectif à 1 100 m d’altitude, sur les pistes de ski de fond du plateau de Retord (voir encadré).

Si aujourd’hui Guillaume Cognat travaille seul avec un apprenti, c’est tout récent. Sa mère Maryse a pris sa retraite en septembre 2025, et son père quelques années plus tôt. « Le troupeau charolais a été créé par mes parents quand ils ont arrêté le lait en 1976. Je me suis installé en Gaec avec eux en 2007 et nous sommes montés par accroissement interne à 110 vêlages au maximum, en 2016. » Depuis, Guillaume anticipe l’arrêt d’activité de ses parents en revenant – progressivement pour raison fiscale – d’abord à 85 vaches. Maintenant, il vise 65 vêlages.

Petits veaux à la naissance, grosses carcasses à la vente

Pour autant, les fondamentaux de l’élevage Cognat sont toujours les mêmes. Les vêlages se concentrent du 15 septembre au 15 novembre, puis après un mois et demi tranquille autour de Noël, le dernier tiers des vêlages se déroule entre le 1er mars et le 15 mai. Le troupeau est conduit en IA depuis 1992 avec Gènes diffusion. « La docilité et les facilités de naissance sont travaillées depuis plus de trente ans ; les vaches sont à 106 d’IFNais de moyenne. Nous avons aussi beaucoup sélectionné sur l’aptitude au vêlage et, en troisième priorité, sur la production laitière », explique Guillaume Cognat. Les vêlages sont faciles sans aide dans 88 % des cas sur les dernières années, et une césarienne est faite tous les trois ou quatre ans.

Tous ses choix pour son système naisseur visent le confort de travail de façon qu’à la fois il honore ses responsabilités professionnelles – il est vice-président du GDS de l’Ain et trésorier de sa coop d’IA – et se libère autant qu’il le souhaite pour sa vie de famille et de sportif. En effet, Guillaume Cognat a pratiqué la lutte à haut niveau (champion de France junior dans sa catégorie en 2004) et il est, depuis 2006, un entraîneur très investi pour le club de sa commune, avec à la clé pour ses élèves pas moins de douze médailles en championnat de France entre 2020 et 2022. « Le soir, je distribue à 16 h 30 pour pouvoir ouvrir deux fois par semaine la salle d’entraînement à 19 heures. Et c’est le matin que les vaches reçoivent le concentré et le foin, car c’est plus rapide que de donner le repas d’enrubannage et ensilage de maïs. Cela me permet d’emmener mes enfants à l’école tous les jours sans non plus commencer très tôt. »

Génotypage et détecteurs de chaleurs

Côté sanitaire, Guillaume Cognat est partisan d’investir dans la vaccination. C’est un temps de travail choisi quand il fait les injections contre les diarrhées, maladies respiratoires, entérotoxémie, FCO et MHE.

Pour la reproduction, la conduite a été simplifiée. Guillaume Cognat se fie aux colliers de détection de chaleurs. Ils sont posés quand les vaches rentrent au 1er novembre, et enregistrent les données sur un mois. Toutes celles dont le cycle n’est pas rythmé sur 21 jours à ce stade sont échographiées avec Ain génétique service pour apporter, si besoin, un traitement. Les inséminations se déroulent de mi-décembre au 15 février. Pour le tri des génisses, Guillaume Cognat se base sur leur génotypage à l’âge d’un an. « Je teste les meilleures et les moyennes en phénotype. Je les trie à l’âge de 2 ans. J’ai eu de très bonnes surprises, et aussi il est arrivé qu’une bonne génisse à l’œil soit réformée, car elle avait un gros défaut dans son génotypage. »

Il n’y a presque pas d’écornage à faire avec les trois quarts des veaux qui naissent sans cornes, et ne donne pas de complémentation sous la mère et très peu après sevrage « non pas par calcul, mais pour ne pas avoir ce travail de distribution d’aliment à faire. Les broutards sont vendus à 410 kg de poids vif moyen à un âge entre 10 et 12 mois. En engraissement, ils seront très performants au bénéfice de leur acheteur. »

L’éleveur garde 25 tonnes de son triticale (potentiel de rendement 50 q/ha). Il achète à une céréalière voisine chaque année 4 tonnes de tourteaux gras fermiers de tournesol à un prix fixe de 200 euros la tonne. Il les a complétées cette année avec 2 à 3 tonnes de tourteau de soja « parce que c’est la protéine la mieux positionnée sur le marché en ce moment ». Celui-ci est mélangé à hauteur d’un tiers avec les tourteaux gras pour atteindre 32 à 33 % de protéines.

résultats économiques élevage

Pour construire ses rations, il se base uniquement sur le résultat de l’analyse des fourrages. Les ray-grass avant maïs et quelques prairies naturelles sont enrubannés très précocement pour viser au-delà de 15 % de MAT. Les regains sont aussi enrubannés. Du foin est récolté sur au total 80 hectares. Si l’année de pâturage ne se présente pas bien, il sème un hectare de sorgho multicoupe au centre de paddocks et le fait pâturer au fil.

Depuis quatre ans, les génisses finies à 30 mois sont vendues à Viandes des pays de l’Ain. « Elles sont contractualisées et payées au coût de production. On était au début à 1 euro au-dessus du prix du marché. Nous sommes en consultation pour maintenir cette filière en faisant un mix entre coût de production et prix de marché. » Trois cents bêtes par an environ sont commercialisées pour une trentaine d’éleveurs dans cette filière gérée par Bovi-Coop. « J’aime bien les poids carcasse », relève l’éleveur qui vend des vaches de réforme à sa coopérative à un poids moyen de près de 500 kgC.

Docilité et facilités de naissance depuis 30 ans

Fiche élevage

197 ha de SAU dont 169 ha de prairies, 8 ha de maïs ensilage, 20 ha d’orge et triticale

76 vêlages de charolaises, vente de broutards et de génisses et vaches finies

0,7 UGB/ha SFT de chargement apparent

39 516 kg de production brute de viande vive

1 UMO exploitant et 0,5 UMO de stagiaires et aide familiale

Jacky Duverger, conseiller Bovins croissance dans l’Ain : « Des carcasses lourdes en système extensif de petite montagne »

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Jacky Duverger, bovins croissance de l'Ain

« Le troupeau de Guillaume Cognat a un bon niveau génétique qui pourrait s’exprimer bien davantage au sevrage. À 2 ans, les poids des génisses sont bons. Les poids de carcasse des vaches sont élevés. Les marges brutes sont bonnes dans ce système extensif de petite montagne, simple et efficace. Guillaume assume ses choix qui conduisent à des frais d‘élevage élevés, car il privilégie le confort de travail et l’économie de main-d’œuvre. »

Un alpage collectif pour les génisses de 18 mois

Toutes les génisses de 18 mois, et parfois quelques génisses de 2 ans vides, y pâturent du 1er juin au 1er octobre. « Nous avons constitué un groupement pastoral à seize éleveurs, pour environ 400 animaux », présente celui qui a été responsable « montagne » pour JA au niveau national. « On loue l’alpage et la maison à un GFA. Un berger est salarié. Nous avons aussi six installations de contention fixe, qui ont été précieuses notamment pour vacciner contre la DNC l’été dernier. » Pour l’eau d’abreuvement, sept géomembranes ont été posées et clôturées sur des creux naturels pour retenir l’eau de la neige. D’environ 700 m3 chacune, elles alimentent par gravité des bacs à eau. « Le groupement pastoral a des charges et des amortissements, mais sur cette période, les génisses ne me coûtent pratiquement rien. On a des DPB rattachés à ces surfaces, une MAE et des aides Natura 2000. »

Un troupeau bovins viande producteur net de protéines

Guillaume Cognat participe au projet Proscror, qui étudie l’utilisation des ressources par les systèmes bovins lait et bovins viande de la zone transfrontalière franco-suisse. « L’indicateur 'efficience protéique nette' de l’élevage est supérieur à 1. Cela signifie qu’il produit davantage de protéines valorisables en alimentation humaine qu’il n’en consomme pas », explique Baptiste Genin de l’Institut de l’élevage. En 2023, pour produire 1 kg de protéines animales, le troupeau a consommé autour de 900 grammes de protéines végétales consommables par l’Homme.

« Le système de Guillaume obtient ce résultat, car il valorise bien les fourrages prairiaux, ne complémente pas les broutards et sort des carcasses lourdes », explique Baptiste Genin. La moyenne du groupe des éleveurs bovins viande dans ce projet se situe à 0,89 d’efficience protéique nette, ce qui en fait des consommateurs nets de protéines. « Chez Guillaume Cognat, l’efficience protéique pourrait être encore améliorée en choisissant des tourteaux de colza plutôt que de soja, et en réduisant l’assolement en maïs et céréales à condition de maintenir un certain niveau de production de viande. »

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