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Vinification : comment conserver un vin rouge dans l’attente de sa malo ?

Arrivés à Noël, certains rouges n’ont toujours pas fait leur malo. Or les vins étant de moins en moins acides, ils sont plus sensibles aux déviations. Comment les conserver jusqu’au mois de mars, d’avril ou de mai ? Voici les recommandations des œnologues.

Pratiquer un soutirage permet d'éliminer les lies et/ou la mauvaise microbiologie du vin et de favoriser le départ de la malo.
Pratiquer un soutirage permet d'éliminer les lies et/ou la mauvaise microbiologie du vin et de favoriser le départ de la malo.
© J.-C. Gutner
 

Jennifer Leveque, œnologue consultante du groupe ICV, dans l’Hérault

« Il faut soutirer pour que les vins soient très propres »

« Tout dépend du cahier des charges du vigneron. S’il le peut, je recommande d’ensemencer en bactéries lactiques, surtout en bio et/ou si les conditions du milieu sont défavorables (pH bas, taux d’alcool élevé). Car la nature a horreur du vide. Si on n’ensemence pas, cela laisse la place à la mauvaise microbiologie du vin.

Jennifer Leveque, œnologue consultante du groupe ICV, dans l’Hérault
 

Si on ne veut pas – ou on ne peut pas – ensemencer, il faut veiller à avoir les barriques et cuves constamment pleines, pour limiter au maximum la surface de contact avec l’oxygène, afin d’éviter l’installation des bactéries acétiques. Il faut régulièrement vérifier le niveau durant l’hiver, en fonction des variations de température. Le vin doit monter jusque dans la cheminée. C’est encore mieux si le vigneron peut protéger sa cuve à l’azote.

 

Je préconise également d’augmenter le nombre de soutirages, notamment en biodynamie où les vignerons sont non-interventionnistes. Souvent, les vinificateurs pensent qu’il ne faut pas toucher au vin durant cette phase de latence, de peur d’éliminer les bactéries lactiques. Mais la plupart du temps, si la malo ne se lance pas, c’est que la population de bactéries lactiques est trop faible. Cela veut donc dire qu’on a une mauvaise microbiologie dans la cuve, ou trop de lies. Dans les deux cas, un soutirage permettra de mettre le vin au propre et de laisser de la place pour la bonne microbiologie. Je conseille de réaliser un soutirage en post-FA et un second avant Noël, avant que le vin ne soit trop froid, pour éviter une prise d’oxygène trop importante. Ensuite, si le vin est encore trouble, je recommande de soutirer une troisième fois en début d’année.

Par ailleurs, il est préconisé de déguster au minimum une fois par mois son vin, pour détecter d’éventuelles déviations, comme des goûts de souris par exemple, et de réaliser une analyse microbiologique (bactéries acétiques, bretts) toutes les six à huit semaines. L’objectif est de pouvoir agir en préventif et non en curatif : il est plus facile et moins cher d’éliminer des bretts que des éthyls phénols.

Enfin, souvent, sur les presses de rouge en sortie de vinification, je conseille de mettre 1 g de SO2, car il s’agit de la fraction du vin la plus oxydée. Les bactéries lactiques y sont certes très sensibles, mais 1 g nettoie juste un peu le vin. Au pire, ce sulfitage retardera de quinze jours la malo, mais cela ne l’empêchera pas. »

Pascal Hénot, œnologue, consultant et directeur du laboratoire d’œnologie Enosens de Cadillac, en Gironde

« Effectuer un léger sulfitage et déguster régulièrement en présence de sucres »

 

Pascal Hénot, œnologue, consultant et directeur du laboratoire d’œnologie Enosens de Cadillac, en Gironde

« Si la malo ne se fait pas spontanément, il y a deux cas de figure. Dans le cas d’un conditionnement de vin qui doit se faire précocement, comme pour du beaujolais nouveau par exemple, il faut ensemencer le vin en bactéries lactiques et le maintenir à température favorable (18-22 °C). Autrement, si on a le temps et que la malo ne s’est pas enclenchée avant Noël, elle ne se fera pas avant avril ou mai. Et ce n’est pas un problème. J’ai constaté que les malo tardives ont une incidence positive sur le vin. La couleur est plus soutenue, le fruité plus appuyé, le vin plus rond. Je pense que c’est dû à l’élevage sans SO2.

 

Car pour conserver le vin avant sa malo, et en absence de sucres, il ne faut pas le sulfiter. Il faut juste veiller à le laisser dans une cuve bien pleine et bien fermée. Il n’y a rien d’autre à faire, pas même des analyses à moins d’une inquiétude particulière. C’est une période où il fait froid, la volatile ne risque a priori pas de monter.

À l’inverse, s’il y a un peu de sucre, je préconise d’effectuer un léger sulfitage et de surveiller l’absence de déviations, notamment par le biais de la dégustation ou d’analyses de phénols volatils, moins chères et plus précises que les analyses de bretts.

Dans toutes les situations, il est intéressant d’essayer de comprendre pourquoi la fermentation malolactique ne s’est pas enclenchée, en se penchant sur les paramètres analytiques. Dans la plupart des cas, c’est dû à un degré alcoolique trop élevé – au-delà de 14 % vol., c’est compliqué –, à un SO2 total supérieur à 50 milligrammes par litre, à une acidité très basse ou encore à une trop faible présence d’éléments nutritifs. »

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