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« Un réajustement de la distribution alimentaire est déjà engagé »

Le Covid-19 a un fort impact sur notre système agroalimentaire. Analyse du phénomène avec Marc Filser, professeur de marketing à l’université de Bourgogne (IAE de Dijon) et observateur des comportements des consommateurs et de la distribution alimentaire.

Marc Filser, professeur de marketing à l’université de Bourgogne (IAE de Dijon) © M. Filser
Marc Filser, professeur de marketing à l’université de Bourgogne (IAE de Dijon)
© M. Filser

Quelles forces et faiblesses de la chaîne agroalimentaire fait apparaître cette crise sanitaire ?

Marc Filser - Les distributeurs et les industriels ont globalement réussi à s’adapter. La principale faiblesse, c’est que depuis une cinquantaine d’années, ce système est organisé avec un seul objectif, celui de la minimisation des coûts. On a massifié à tous les niveaux. On travaille à flux tendu sans stocks intermédiaires, ceux-ci étant assumés par le producteur. S’ajoute le fait que les enseignes ont pris le pouvoir sur leurs fournisseurs, au point d’imposer leurs conditions et dans certaines filières de « tirer » les flux de production en fonction de leurs ventes, notamment des promotions. Cela explique pourquoi la distribution française est l’une des moins chères d’Europe. Mais, le revers de la médaille c’est l’exigence d’une continuité sans faille de cette chaîne.

Cette distribution massifiée et centralisée va-t-elle se réajuster après cette crise ?

M. F. - Le réajustement était déjà engagé, notamment à travers l’évolution du consommateur vers des formes alternatives de distribution. L’amont a aussi commencé à s’y adapter par des expériences d’intégration comme la création de drive fermier ou de collectifs de vente au détail. Un second phénomène va s’amplifier, c’est la remise en cause des achats massifiés une fois par semaine dans les hypermarchés. Les consommateurs se tournent vers les circuits courts, les circuits spécialisés comme Grand frais et le commerce de proximité qui connaît un fort regain. Cela pourrait rééquilibrer le rapport de force entre les producteurs et une grande distribution affaiblie. Mais cela pourrait aussi déstabiliser l’organisation logistique. Car l’approvisionnement des petits commerces de centre-ville est difficile avec des semi-remorques venant de plateformes. Il va falloir revoir ces flux, peut-être en mutualisant la logistique entre plusieurs enseignes.

Relocaliser l’approvisionnement est un autre enjeu évoqué ces temps-ci…

. F. - La motivation première d’acheter des produits importés est économique. Si le consommateur reste sur la logique du plus pour moins cher, la relocalisation sera difficile. Et s’il évolue vers le produit local, il faudra un certain temps pour mettre en place les moyens de production supplémentaires. Dans l’alimentaire, cette évolution qualitative a tout de même commencé. La crise peut être un accélérateur, mais il n’est pas exclu que l’on revienne aux « mauvaises » habitudes pour une raison économique, tous les consommateurs ne pouvant ou ne voulant pas payer plus cher leur alimentation.

Par ailleurs, cette question de la relocalisation pourrait aussi se poser dans les pays où nous exportons. C’est aussi une éventualité à envisager.

 

Pour consulter l'interview de Pascale Hébel, directrice du pôle consommation et entreprise au Credoc, sur les comportements de consommation pendant la crise du Covid-19, cliquez ici.

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