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Les connaissances sur les arômes du vin progressent

La treizième Journée scientifique de la vigne et du vin organisée à Montpellier était dédiée à la qualité des vins de demain. Voici les principales avancées concernant les arômes.

La conduite en bio des vignes semble avoir une influence sur la synthèse des précurseurs de thiols du gros manseng.
La conduite en bio des vignes semble avoir une influence sur la synthèse des précurseurs de thiols du gros manseng.
© Réussir

Attention, le bio peut avoir un impact sur les arômes thiolés

La première intervention scientifique de la journée a été consacrée aux travaux de l’Inrae et de l’IFV Pôle Sud-Ouest sur le colombard et le gros manseng. L’équipe de chercheurs a mis en évidence l’influence des pratiques bio sur la synthèse des précurseurs de thiols dans les raisins, notamment du gros manseng. Pour ce faire, 30 parcelles de vigne en côtes de gascogne ont été suivies durant la campagne 2019. Une partie a été conduite de manière conventionnelle (pas d’application de cuivre), l’autre n’étant traitée qu’avec du cuivre (modalité bio). À la récolte, les raisins des deux cépages contenaient du G3SH, précurseur du 3SH (arômes de pamplemousse), en grande quantité.

En revanche, les modes de conduite n’ont pas eu le même impact sur les deux variétés. La conduite bio de la vigne a amené à une diminution de 30 % du taux de G3SH dans les baies de gros manseng, soit une perte de l’ordre de 166 à 185 ng/l de 3SH dans le vin fini. À l’inverse, l’emploi de cuivre n’a pas significativement impacté les raisins de colombard, même si les teneurs en G3SH y étaient légèrement plus faibles.

Les thiols des variétés résistantes peu touchés par le stress hydrique

Les variétés résistantes pourraient être intéressantes dans le cadre du changement climatique. C’est du moins ce qui ressort des essais réalisés à Pech-Rouge en 2021. Ces derniers avaient pour objet de déterminer l’effet du déficit hydrique sur la concentration en précurseurs thiolés de six variétés résistantes : l’artaban, le 3176N et le G14 en rouge, et le floreal, le 3159B et le G5 en blanc.

Contrairement à la plupart des cépages « classiques » où une contrainte hydrique modérée peut avoir une influence bénéfique sur la synthèse de ces précurseurs, la plupart des variétés résistantes testées n’ont pas semblé réagir significativement au déficit hydrique. Les vins garderaient donc un profil aromatique similaire, quel que soit le niveau de contrainte hydrique à la vigne. « Mais cela peut être lié au fait que les plantes de notre dispositif avaient un potentiel hydrique en dessous de -0,4 MPa, ou à une réponse variétale, ou à des variations microclimatiques dans chaque région », a tenu à nuancer Luciana Wilhelm, de l’Inrae.

La supra extraction pour davantage de précurseurs thiolés du floreal

La supra extraction est une technique consistant à congeler lentement les raisins afin de former des aiguilles de glace à l’intérieur des baies, déstructurant les parois des cellules et facilitant l’extraction des composés lors du pressurage. Elle conduirait à un enrichissement de 70 % de la teneur en précurseurs thiolés des baies de floreal. C’est le principal enseignement des essais d’Alain Samson, de l’Inrae de Pech-Rouge. Avec son équipe, il a planché sur les itinéraires permettant une meilleure extraction des précurseurs thiolés de la variété, leur concentration dans les baies chutant au cours de la maturation. Bien que difficilement déclinable sur le terrain, la supra extraction est ressortie comme étant la technique la plus efficace.

De leur côté, la macération pelliculaire, la stabulation à froid et la pulvérisation d’azote foliaire à la véraison n’ont pas donné de résultats probants. Cette dernière technique a permis d’augmenter la concentration en G3SH en 2020, mais a donné les résultats inverses en 2019. « La pulvérisation foliaire n’est donc pas efficace à 100 % », regrette le chercheur.

Les non-Saccharomyces améliorent le profil aromatique du vin

Pour enrichir les profils aromatiques des vins, rien de tel que de colevurer avec des non-Saccharomyces. C’est ce qui apparaît à l’aune des travaux de Carole Camarasa, de l’Inrae de Montpellier. L’institut a en effet analysé l’impact des levures non-Saccharomyces sur la qualité sensorielle des vins. Il en ressort par exemple que Starmerella bacillaris produit de nombreux composés volatils, dont des terpènes et des benzaldéhydes. Elle génère des arômes de type géraniol, linalool. À l’inverse, cette levure ne synthétise que peu d’esters d’acétate.

De leur côté, Lachancea thermotolerans et Hanseniaspora osmophila conduisent à la production d’esters d’acétate.

Enfin, si l’ajout de Klyuveromyces marxianus PG + n’a que peu de répercussions sur le profil sensoriel des vins, la levure a un impact proche de celui d’un ajout de pectinase sans en avoir les inconvénients. Elle conduit en effet à une hausse en acide polygalacturonique et ainsi à une baisse de la turbidité des vins.

Une structure glycosidique provoque les ACF

Si le lien entre les arômes de champignon frais (ACF) et les maladies fongiques de la vigne a été établi il y a plusieurs années déjà, le processus conduisant à l’apparition de ce défaut est quant à lui mal connu. Il l’est désormais un peu moins grâce aux travaux menés par Moët et Chandon. Pour mémoire, les ACF sont dus à la présence de Crustomyces subabruptus, un champignon de décomposition du bois assez fréquent et endophyte de la vigne (présent dans les ceps de manière latente).

Lorsque les conditions sont favorables, il se développe à l’intérieur des grappes atteintes de botrytis et conduit à la présence de molécules responsables des ACF, dans les vins. Le principal problème est que ce défaut est à l’heure actuelle indétectable sur moût, et apparaît en fin de vinification. Léa Delcros, thésarde chez Moët et Chandon, a donc tenté d’identifier les molécules entrant en jeu dans cette déviation. Pour ce faire, elle a cherché des précurseurs glycosidiques des composés en C8 et évalué l’influence de l’oïdium et du botrytis sur les proportions des fractions glycosidiques de la 1-octène-3-one, du 1-octène-3-ol et du 3-octanol. Elle a constaté une diminution des glycosides de la 1-octène-3-one dans les moûts touchés par la pourriture grise, tandis que les glycosides du 1-octène-3-ol y augmentaient. « Cela tend à montrer que Botrytis cinerea possède le matériel enzymatique nécessaire pour cliver les précurseurs naturellement produits par la vigne », analyse la jeune femme.

L’acétaldéhyde interagit sûrement avec d’autres composés volatils

 

 
L'Inrae de Montpellier a établi par dégustation olfactive que l'acétaldéhyde n'a pas les mêmes répercussions aromatiques selon la matrice, et notamment selon son IPT.
L'Inrae de Montpellier a établi par dégustation olfactive que l'acétaldéhyde n'a pas les mêmes répercussions aromatiques selon la matrice, et notamment selon son IPT. © Réussir SA
L’acétaldéhyde est une molécule volatile responsable des notes allant de la pomme verte, à faible concentration, à la pomme blète et pourrie à plus haute dose. Soline Caillé, et son équipe à l’Inrae de Montpellier, ont étudié son impact sur la perception olfactive des vins rouges de syrah. « La concentration en acétaldéhyde fait varier la description du vin, résume-t-elle. Il y a un vrai changement des caractéristiques du vin dès une faible concentration. » La chercheuse a constaté une différence de comportement selon les matrices, qui proviendrait sûrement de l’IPT, l’acétaldéhyde se combinant avec divers éléments du vin (SO2, polyphénols et sûrement des molécules aromatiques).

 

Rosés, les cépages n’ont pas tous le même potentiel de couleur

Cécile Deborgne, doctorante au Centre du rosé et à l’Inrae de Montpellier, est pour sa part venue présenter ses travaux portant sur les facteurs déterminants de la couleur des rosés. Après étude de vins et de moûts issus de syrah, cinsault et grenache, elle a mis en évidence que la composition phénolique a un réel impact sur la couleur. L’extraction des composés phénoliques augmente avec la durée de macération et l’intensité du pressurage, mais dépend également du cépage : l’extraction des composés phénoliques est beaucoup plus rapide pour la syrah que pour le grenache ou le cinsault.

Par ailleurs, l’oxydation joue un rôle important. « Au stade moût, cela se traduit par la formation de pigments polymères qui s’adsorbent sur les lies et sont éliminés des vins finis, précise-t-elle. Au stade vin, l’oxydation conduit à l’accumulation d’acétaldéhyde qui réagit avec les anthocyanes et les flavonols pour former de nouveaux pigments qui contribuent au brunissement. »

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