Dégustation de vin, apprenez à vous connaître !
À l’occasion de ses 50 ans, le Diplôme universitaire d’aptitude à la dégustation (DUAD) de l’Institut des sciences de la vigne et du vin de Bordeaux (ISVV) organisait une dégustation. Une manière de découvrir cette formation.
« Qui ne sent rien dans le verre numéro 3 ? », a interpellé Axel Marchal, enseignant chercheur à l’ISVV et animateur de la dégustation. Au moins la moitié des dégustateurs ont levé la main. Et pourtant, un arôme de violette était très clairement identifiable pour le reste de l’assemblée. « La β-ionone a un seuil de perception de 0,09 μg/l, a décrypté l’animateur. Mais en fonction de leur sensibilité, certains ne la perçoivent pas, alors que d’autres la sentent de manière intense. » Par ailleurs, cette molécule provoque une fatigue olfactive assez rapide ; très vite, le dégustateur ne la sent plus. « Nous avons tous des molécules que nous ne détectons pas, a enseigné le chercheur. Le tout est de savoir lesquelles, afin de ne pas juger ou déguster les vins en contenant. Moi, par exemple, je ne suis pas sensible au SO2. Je ne vais le percevoir dans un vin qu’à un seuil très élevé. Je préfère que d’autres que moi jugent ce critère, car lorsque je le sens, c’est déjà trop tard. »
Un référentiel qui varie selon la culture
Autre enseignement, le goût du vin se construit dans le cerveau, par rapport à un référentiel culturel. Le nez des Européens que nous sommes a clairement identifié des notes de fraise, fraise mûre, dans le verre numéro 2. « Pensez à de l’ananas et remettez votre nez au-dessus du verre », a incité Axel Marchal. Et là, une bouffée de notes d’ananas nous a sauté au nez. « Il s’agit en fait de la même molécule, a poursuivi l’intervenant. Mais selon l’endroit d’où l’on vient, elle évoquera plutôt la fraise (Europe) ou l’ananas (Asie). » « Une association par l’expérience » selon Pierre-Marie Lledo, directeur du département des neurosciences de l’institut Pasteur, importante à prendre en compte lorsqu’on exporte son vin.
Les molécules aromatiques interagissent également entre elles, comme nous avons pu nous en rendre compte lors d’un petit exercice. Après avoir respiré trois solutions distinctes, aux arômes bien définis (vanille pour la vanilline, coco pour la whisky-lactone et clou de girofle pour l’eugénol), Axel Marchal nous a demandé d’assembler les trois solutions et de remettre le nez au-dessus du verre. Et là, surprise, ce n’est pas un mélange de ces trois notes que nous avons pu identifier, mais bel et bien une odeur de boisé !
Prendre son temps entre deux vins
Peu de temps après, les exercices olfactifs ont laissé place à la dégustation. « Comment qualifieriez-vous ces solutions ? » a interrogé Axel Marchal. « Elles sont astringentes », a, à juste titre, répliqué l’un des participants. « Laquelle des trois l’est le plus ? », a encore questionné le chercheur. « La dernière », a répondu l’assemblée à l’unanimité. « Et non, les trois solutions ont toutes la même concentration, a dévoilé l’animateur à la surprise de tous. Cela illustre le caractère cumulatif de l’astringence. » Attention donc à ne pas déguster trop rapidement à la suite des vins astringents, sous peine de trouver le dernier imbuvable. « Il faut vraiment prendre le temps entre deux vins », a-t-il insisté.
Autant d’enseignements importants que l’on soit œnologue, commercial en vin, journaliste ou encore sommelier et qui sont prodigués lors du DUAD, ce diplôme en quatre modules qui s’étale sur un total de 177,5 heures.
Des capacités du nez
Lors d’une intervention consacrée au goût du vin, Pierre-Marie Lledo, directeur du département des neurosciences de l’institut Pasteur, a exposé les particularités du sens olfactif. Nous disposons ainsi de 400 récepteurs olfactifs dans le nez, contre seulement 30 dans la bouche. À titre de comparaison, nous ne possédons que 3 récepteurs visuels. Un attirail qui nous permettrait de percevoir 1 000 milliards d’odeurs différentes. Pas mal pour un si petit organe !