Le Gaec Limouzin implique les salariés pour des sainte-maures de qualité
Le Gaec Limouzin vend pour prêt d’un million d’euros de fromage chaque année. La réussite repose sur une organisation collaborative où les salariés sont au cœur de la qualité des fromages.
Le Gaec Limouzin vend pour prêt d’un million d’euros de fromage chaque année. La réussite repose sur une organisation collaborative où les salariés sont au cœur de la qualité des fromages.







Dans ce Gaec familial d’Indre-et-Loire, les salariés sont une force vive pour élever 480 chèvres, produire 432 000 litres de lait et les transformer en sainte-maure de Touraine AOP et en d’autres fromages. Pour aider les associés Benoît, Anne-Marie, Charles et Mathis Limouzin, pas moins de huit salariés s’affairent sur la ferme de 343 hectares.
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« Sans nos salariés, nous ne sommes rien, explique Benoît Limouzin, 54 ans. C’est pour cela que nous leur faisons confiance et que nous les intégrons dans nos décisions. Par exemple, lors de l’agrandissement de la chèvrerie en 2019 ou encore pendant l’épisode de Stec de 2023, nous avons toujours partagé les projets et les difficultés et discuté des solutions ensemble. »
De salarié à associé
Cette transparence semble payer, puisque plusieurs salariés, comme Véronique Besnard (employée depuis 1998), restent fidèles à l’exploitation depuis des décennies. La chevrière est devenue au fil du temps la cheville ouvrière de l’élevage. Polyvalente, elle est capable de remplacer tout le monde, que ce soit à la traite, à la gestion des papiers, à l’élevage des jeunes ou même à la fromagerie. « Elle maîtrise tous les aspects de l’élevage et de la production, apprécie Benoît. Au plus près du troupeau, c’est elle qui prend en charge l’enregistrement des naissances et l’identification. Elle s’occupe de l’entretien du matériel et c’est elle qui commande les manchons à changer pour la salle de traite. Elle a toute notre confiance, et cela se passe très bien. »
Un fromage de qualité, fruit d’un travail collectif où chaque main compte et chaque voix est entendue
Quentin, 25 ans, est lui salarié de la ferme depuis cinq ans. À l’aise pour les travaux des champs, il assume le rôle de chef de culture et pourrait devenir à l’avenir un des associées du Gaec. L’équipe des salariés compte aussi Yvan, Valentin, Luc et les jumelles Marpessa et Vanessa.
De la liberté dans l’organisation
Salariée depuis près de vingt ans sur le Gaec, Delphine avait suivi une formation à la gestion d’une crise sanitaire. C’est donc elle qui était le plus en lien avec la DDPP quand il y a eu un épisode de Stec en 2023. « Lorsqu’il y a des concours de fromages, ce sont nos salariés qui prennent l’initiative de s’inscrire et d’y participer, indique Benoît. Nous les soutenons en retour avec des primes en cas de succès, mais c’est leur démarche avant tout. »
Cette confiance témoigne de l’approche collaborative du Gaec, qui valorise ses salariés sur le long terme. Au Gaec Limouzin, l’organisation est pensée pour durer. Chaque salarié a des tâches clairement définies mais reste polyvalent, notamment en fromagerie. « J’ai remarqué que ça passe un peu mieux quand on présente une idée d’organisation en disant : voilà ce qu’on aimerait faire, comment on peut y arriver ? » Les salariés restent aussi informés de la vie de l’entreprise, « quand ça va bien mais aussi quand ça va moins bien ».
On ne parle pas de travail à table
Le salaire net s’élève à environ 2 000 euros par mois pour des semaines de 39 heures, un niveau volontairement supérieur au minimum, justifié par l’exigence du travail et la volonté de fidéliser. Certains salariés effectuent aussi des week-ends, qui sont majorés et planifiés à l’avance. L’organisation est structurée autour de plannings annuels, avec un jour de repos fixe par semaine, et des congés payés répartis sur l’année.
Les horaires sont également pensés pour préserver un équilibre vie pro/vie perso, avec une embauche matinale mais une pause petit-déjeuner fournie sur place, dans un espace convivial où on ne parle jamais de travail, une règle tacite pour préserver les moments informels. Le quotidien au Gaec Limouzin est également ponctué de moments conviviaux comme des repas en commun plusieurs fois dans l’année ou les anniversaires et les succès qui sont fêtés en équipe dans la maison du Gaec, au cœur de l’exploitation. « On se connaît ainsi mieux et cela crée un lien fort entre nous », apprécie Benoît.
Échanges informels
En fromagerie, les postes sont tournants pour répartir les tâches physiques, comme le salage ou le démoulage, et préserver la santé des salariés. L’équipe bénéficie aussi de temps d’échange informels hebdomadaires avec les associés, en particulier Benoît, qui prend soin de voir chaque salarié individuellement plusieurs fois dans la semaine. Il n’y a pas d’entretien annuel formalisé ni de fiche de poste, mais des discussions régulières, dans un esprit d’écoute et d’ajustement continu. L’humain reste au cœur du fonctionnement du Gaec.
Damien Hardy