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Pénurie de lait
Vers une politique réactive de gestion des quotas

Pour relancer la production laitière, un assouplissement des mesures de gestion des quotas vient d'être validé par l'ensemble des acteurs de la filière.

A la surprise générale, la collecte laitière a décroché en mai, avec des livraisons en baisse de 3,5 % d'une année sur l'autre.
A la surprise générale, la collecte laitière a décroché en mai, avec des livraisons en baisse de 3,5 % d'une année sur l'autre.
© S. Leitenberger

L’ampleur de la sous-réalisation de la France sur la campagne 2006-2007 (660 000 tonnes) provoque de nombreuses interrogations, aussi bien au niveau national que communautaire. D’autant qu’à la surprise générale la collecte laitière a décroché en mai, avec des livraisons en baisse de 3,5 % d’une année sur l’autre, provoquant une pénurie de lait. Un manque de matière première alors même que les marchés des produits industriels connaissent actuellement une flambée impressionnante, et que ce contexte favorable conduit les entreprises à chercher du lait.

QUATRE MESURES RÉGLEMENTAIRES

Ce retournement de situation a conduit l’ensemble des acteurs de la filière à changer profondément d’attitude. Pour relancer la production française, le conseil spécialisé « filières laitières » de l’Office de l’élevage a validé le 12 juin dernier à l’unanimité des modifications substantielles dans les règles de gestion de la campagne laitière 2007/2008. L’ensemble de ces mesures techniques de gestion des quotas doit encore faire l’objet d’une validation formelle par le nouveau ministre en charge de l’Agriculture via la modification des arrêtés de campagne. La première mesure concerne le taux maximal d’allocations provisoires de fin de campagne accordé à un producteur par sa laiterie : il passe de 10 à 15 %. L’objectif clairement affiché de cette mesure est de pouvoir relancer une véritable dynamique laitière dans les zones traditionnellement sous-réalisatrices du Massif central, du Poitou-Charentes et du Sud-Ouest. La seconde mesure laisse aux producteurs la liberté de produire les 0,5 % de quota suplémentaire accordés au titre de la campagne 2007-2008, ce qui représente au total 121 000 tonnes de lait. Par ailleurs, les producteurs dont les laiteries accordent traditionnellement des faibles taux d’allocations provisoires pourront produire jusqu’à 4 % au-delà de leur quota sans pénalités (allocations provisoires comprises). Ainsi, un producteur disposant d’une référence de 300 000 litres, pourra produire, allocations provisoires comprises, jusqu’à 312 000 litres sans pénalités.

CHEPTEL EN RÉGRESSION

Enfin, la dernière mesure réglementaire concerne la situation des producteurs (dont la référence est inférieure à 100000 litres). Bénéficiant traditionnellement d’un remboursement de pénalités correspondant à 6 500 litres (allocations provisoires comprises) depuis quatre campagnes, les familles de l’interprofession ont fait part de leur voeu de revoir leur situation en fonction des disponibilités de fin de campagne 2007/2008 et ce dans un sens plus favorable. Il est important de donner un signal fort aux producteurs via une hausse significative des allocations provisoires et l’assouplissement des règles de gestion des quotas, souligne la FNPL. Il faut éviter d’accroître la déprise laitière au moment même où les industriels ont l’opportunité de gagner de l’argent sur les produits industriels, ce qui n’avait pas été le cas depuis de nombreuses années. On n’observe actuellement pas de reprise de la production, alors même que le cheptel laitier est en nette régression. Or, en ce moment, les producteurs de lait doivent arbitrer entre garder leurs génisses pleines dans leurs exploitations ou les vendre à l’extérieur dans un contexte plus favorable au secteur de la viande qu’au secteur laitier.

LES PREMIERS EFFETS DU DÉCOUPLAGE ?

Mais pour la FNPL, la prudence reste de mise. Car la situation actuelle des marchés des produits industriels ne durera pas éternellement. Pour le syndicat, l’assouplissement des mesures de gestion des quotas est très clairement une mesure conjoncturelle : si les marchés venaient à se retourner lors de la prochaine campagne, le retour à plus de rigueur dans la gestion des volumes serait à nouveau sur le tapis… Comment expliquer la baisse de la production actuelle, que l’on observe aussi dans d’autres pays européens? La pression sur les prix payés aux producteurs a pu encourager la déprise. La France, comme un certain nombre de ses voisins, est en train de voir émerger les premiers effets larvés du découplage. La flambée des prix constatée sur les céréales, la bonne tenue des cours de la viande (même si cette situation est en train de se dégrader depuis peu), la montée en puissance des cultures non alimentaires peuvent conduire un certain nombre de producteurs de lait à s’interroger sur leur métier. De même que la lourdeur des investissements, le poids des contraintes environnementales, une augmentation forte du prix des aliments et de l’énergie…

PLUS DE 10 EUROS POUR 1 000 LITRES AU TROISIÈME TRIMESTRE

Gageons que la remontée du prix du lait, que l’on constate partout en Europe, est le meilleur signal pour remotiver les producteurs. On s’oriente aujourd’hui vers une augmentation supérieure à 10 euros pour 1000 litres pour la recommandation du troisième trimestre 2007. Cette situation quelque peu inédite, où à la fois les industriels et les producteurs s’accordent dans une démarche concertée de remontée de la production, démontre en tout cas la nécessité de maintenir des outils de gestion des volumes performants. Faute de quoi, l’on risque de se retrouver dans une instabilité à la fois sur les volumes et sur le prix où tout le monde sera perdant. Par ailleurs, un nouveau mode de gestion de l’instrument juridique qu’est le quota, plus dynamique et plus réactif, redonne un coup de jeune à l’édifice réglementaire complexe mis en oeuvre depuis plus de vingt-trois ans en Europe. Le dogme selon lequel la France ou même l’Europe sera excédentaire en matière de lait est peut être en train de tomber, et il n’est pas dit qu’une Europe sans régulation des volumes sera une Europe structurellement excédentaire en lait, bien au contraire… ¡ Etienne Fabrègue

LES MESURES

  • Le dégel des 0,5 % de quotas accordés au titre de la campagne 2007/2008 ;
  • L’augmentation du taux maximal d’allocations provisoires de fin de campagne qui passe de 10 à 15 %;
  • Le remboursement spécifique de fin de campagne garantissant aux producteurs la possibilité de produire jusqu’à 4% sans pénalités ;
  • La révision de la situation des petits producteurs (quota inférieur à 100 000 litres) en fonction de la situation de fin de campagne 2007/2008.

 

Quel sera l’impact du programme d’Aides à la cessation d’activité laitière 2007?

Dans ce contexte de baisse de la production, tout le monde va regarder attentivement ce qui va se passer au mois de juillet. En effet, le programme d’Acal (aides à la cessation d’activité laitière) peut contribuer à creuser la sous-réalisation française sur la seconde partie de la campagne, notamment si l’on constate une forte augmentation du nombre de demandeurs. Non pas parce que ce lait ne sera pas transféré à des repreneurs mais parce que la lenteur des procédures administratives peut conduire à mettre « entre parenthèses » des volumes de lait non négligeables. Pour illustrer cet effet mécanique, prenons l’hypothèse où 3000 producteurs demandent à bénéficier de l’Acal cette année. Sachant que le niveau moyen des cessations est d’environ 120 000 litres par demandeur et que ces producteurs vont diminuer de moitié leur production d’ici à la fin de la campagne 2007/2008, ce sont potentiellement près de 100 000 tonnes de lait qui peuvent s’ajouter à la sous-réalisation actuelle…

ACAL PROFESSIONNELLES : Une redistribution accélérée des volumes

Les organisations professionnelles ont demandé à l’État de faire le maximum pour que la redistribution des références laitières puisse se faire dans les meilleurs délais, de manière à ce que les producteurs puissent se mettre en capacité de produire le plus tôt possible ces volumes supplémentaires. Rappelons que la mise en oeuvre des Acal professionnelles (transferts de quotas sans terre) a conduit à bouger des volumes très importants entre producteurs. La notification tardive de ces volumes auprès des repreneurs contribue pour partie à la baisse de production constatée sur le début de la campagne, les repreneurs ne disposant pas forcément du cheptel correspondant…

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