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« Les vaches c’est passionnant, car compliqué à conduire »

Dans la Manche, Antoine Thomas, très motivé par les progrès techniques, les défis à relever… a pris la responsabilité de l’atelier lait du Gaec de la Bauquière.

Au départ, Antoine Thomas était plutôt parti pour s’installer en individuel. Puis, pour préserver sa vie de famille, éviter la surcharge de travail et l’excès d’investissement, il a finalement changé de cap pour se focaliser sur les opportunités d’installation en Gaec. Le jeune éleveur de 31 ans, souhaitait également trouver un élevage avec traite robotisée. « Mon père, mes cousins… sont producteurs laitiers. Je suis né dans ce milieu et j’aime vraiment ce métier. Mais je n’ai jamais touché une vache chez mes parents. À l’époque, je préférais les cultures. Le déclic pour le lait est venu grâce aux stages que j’ai réalisés dans le cadre de mes études. J’ai fait un BTS Acse en alternance. C’est une très bonne solution pour acquérir de l’expérience. J’ai fait de nombreux stages en exploitation. Après mon certificat de spécialisation Conduite de l’élevage laitier, j’ai travaillé six mois dans un élevage équipé d’un robot de traite. » Ce parcours riche en expériences ne modifiera pas pour autant son manque d’enthousiasme pour la traite. « C’est trop routinier. Une machine peut le faire, estime-t-il. Ce qui m’intéresse, ce sont les aspects techniques et économiques. Qu’est-ce que l’on peut mettre en place, comment, pourquoi… Il faut chercher à s’améliorer, aller de l’avant, comprendre pourquoi certaines choses ne marchent pas, mais surtout ne pas juste traire pour traire. Les vaches, c’est super compliqué à conduire et donc génial à travailler », affirme Antoine avec conviction.

"Les associés avaient bien préparé mon arrivée"

« En mars 2013, un conseiller du RDI (répertoire départ-installation) de la Manche m’a proposé deux exploitations dont le Gaec de la Bauquière qui était équipé d’un robot de traite. Les associés recherchaient quelqu’un pour remplacer le responsable de l’atelier lait qui partait à la retraite. »

Après six mois de contrat de parrainage, Antoine Thomas rejoint le Gaec en avril 2014. « Les trois associés avaient bien préparé mon arrivée. Ils avaient bien mûri leur projet, leurs attentes en termes d’organisation du travail… En deux visites, je savais combien je devais sortir de mon porte-monnaie pour rejoindre le Gaec. Il n’y a pas eu de tabou. Mais investir 160 000 euros à 2,5 % sur quinze ans, c’est compliqué surtout avec la crise. Ce sont les comptes associés qui prennent », admet Antoine Thomas. Pour lui, la crise était annoncée avec la fin des quotas, le renforcement de la mondialisation… Pas question pour autant de baisser les bras. « Les éleveurs de porcs savent mieux gérer les contextes de crise que nous. En lait, il y a parfois trop d’inertie au niveau de la réaction. Plutôt que d’acheter un nouveau tracteur dès que le prix du lait augmente, il vaut mieux mettre de l’argent de côté parce qu’on continuera à connaître des périodes de crises. »

Mettre l’accent sur les relations humaines

Son projet d’installation se basait sur un prix du lait à 315 euros/1 000 l. À l’époque, le droit à produire du Gaec était de 900 000 l dont 200 000 l attribués au jeune installé par Agrial. Avec une moyenne à 329,50 euros/1 000 l, la situation a été plus favorable que prévue en 2014-2015. En revanche, le scénario s’est fortement dégradé en 2015-2016 (284,49 euros/1 000 l). « Le lait représentait à peine 30 % de la marge totale en 2016 (1) contre 50 % pour les porcs et le reste pour les cultures et les aides. Mais au sein du Gaec, nous ne raisonnons pas par atelier mais globalement. »

L’ambiance au sein du Gaec semble très bonne pour plusieurs raisons. « La gestion des rapports humains, c’est très important. En cas de crise, si on se soutient, on peut rebondir plus rapidement. Nous préférons analyser ensemble la situation des différents ateliers pour voir ce qui ne marche pas plutôt que de critiquer directement le ou les responsables de l’atelier. » Les trois associés ont participé à des formations dédiées à la création d’une société proposées par la chambre d’agriculture et leur centre de gestion. « Cela nous a notamment permis de faire le point sur nos différences de caractères. »

« On est patron-salarié de notre entreprise »

Ils ont également mis en place des réunions systématiques tous les matins vers 8 h 30 dans le bureau du Gaec. « La notion de ponctualité est très importante. » Le fait d’avoir des associés de la même génération, avec des enfants et ayant été salariés avant de s’installer sont autant de points communs favorables à une bonne entente au sein du Gaec, estime Antoine Thomas. La capacité à séparer la vie privée de la vie professionnelle est également un gage de réussite. « Notre métier est très prenant, voire envahissant si l’on n’y prend pas garde. On est patron-salarié de notre entreprise. On recherche en effet à la fois une bonne rentabilité en tant que patron et de bonnes conditions de travail en tant que salarié. »

(1) Avant l’arrivée du quatrième associé avec 680 000 l de lait supplémentaires, qui a porté la référence à 1,6 million de litres de lait.

Le message d’Antoine Thomas

« Quand on s’installe, on engage sa vie de couple. Il faut absolument en tenir compte si l’on veut qu’elle dure plus longtemps que sa carrière professionnelle. L’avis de ma femme est très important pour moi. Au départ, j’avais un projet d’installation en individuel dans le Calvados. Mais elle n’était pas d’accord. Elle préférait que je m’installe en société. Je suis venu avec elle avant de prendre la décision de rejoindre le Gaec de la Bauquière. Nous nous plaisons beaucoup dans la Manche et notre maison d’habitation étant située à 5 km de la ferme, quand je suis chez moi, le travail, c’est fini. »
(((((« Il faut mettre la priorité sur sa famille »))))

Côté éco

Installé en avril 2014

• 160 000 euros investis

• 284,50 euros/1 000 l de prix du lait payé en 2016

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