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Blé 2025 : la récolte française s’exporte bien

Malgré une offre mondiale abondante, la France tire cette année son épingle du jeu à l’export, grâce à une récolte 2025 quantitative et qualitative. Les blés français séduisent à nouveau les acheteurs du pourtour méditerranéen, restent incontournables dans l’UE, et commencent à percer en Asie.

Le blé français s’exporte bien, mais à quel prix ! Les céréaliers font face à des prix historiquement bas, conséquence d’une récolte 2025 exceptionnelle un peu partout dans le monde. « L’offre est excédentaire face à une demande qui est calme », explique Philippe Heusèle, président du comité relations internationales d’Intercéréales. Le marché actuel est donc compétitif sur les prix, c’est-à-dire qu’il favorise les prix les plus bas. » La récolte française, qui se distingue à la fois par son volume (33,3 millions de tonnes) et sa qualité, s’avère compétitive face aux origines de la mer Noire, qui inondent normalement le marché à cette période de l’année, indique Hector Pointeau, trader céréales chez Céréapro. « Nous allons tenir tant que nous restons les moins chers », énonce de son côté Arnaud Ponset fondateur et analyste grains chez Céréfi, qui précise que sur cette campagne, la France a été agressive dès le début sur les prix.

« Les blés ukrainiens, roumains, bulgares ou baltes affichent une qualité moindre, tout comme les blés russes de la mer Noire. Les exportateurs de ces régions retiennent leurs volumes en attendant une remontée des prix. » Il y a donc moins de disponibilité sur le marché et la France en profite. Le chiffre d’exportations de blé tendre à destination des pays tiers est estimé au 13 novembre par FranceAgriMer à 7,850 millions de tonnes (Mt) et vers l’Union européenne (UE) à 7,048 Mt.

Des exports dynamiques vers le sud de la Méditerranée

La récolte française correspond assez bien aux demandes des pays du sud de la Méditerranée, indique le président du comité relations internationales d’intercéréales. La perte du marché algérien est ainsi en partie compensée. « La France est à nouveau la base des achats marocains. Si nous restons compétitifs en termes de prix, nous pensons pouvoir répondre à leurs besoins. » Le Maroc consomme 5,5 à 6 Mt de blé, et prévoit d’en importer 5 Mt, car sa collecte nationale est très faible. « Si les deux tiers sont du blé français, nous pourrions dépasser les 3 Mt », énonce Philippe Heusèle. « La France a déjà expédié 980 000 tonnes de blé tendre vers cette destination », a précisé Habasse Diagouraga, chargé d’études marchés français des céréales chez FranceAgriMer, à la suite du conseil spécialisé du 13 novembre.

Au Maroc, les achats sont menés par des opérateurs privés, attentifs au prix et à la qualité. En Tunisie, les appels d’offres privilégient l’origine la moins chère, d’où un retour du blé français cette année. Philippe Heusèle indique que la France a également fait quelques bateaux en début de campagne sur l’Égypte, mais aussi sur la Libye, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique subsaharienne qui restent un client important.

Des exportations vers l’Union européenne à la hausse

45 % des exportations françaises de blé sont à destination des pays de l’UE. La France exporte principalement vers la Belgique, les Pays-Bas, et l’Espagne, et surtout lorsque les prix rendus restent compétitifs. Philippe Heusèle explique que l’accord d’association UE-Ukraine modernisé est entré en vigueur le 29 octobre dernier. La modernisation élargit les réductions tarifaires tout en protégeant certaines productions agricoles sensibles via des contingents. « L’accord limite les tonnages de blé en provenance d’Ukraine. Nous sommes repassés à 1,3 Mt de blé ukrainien sans droits d’entrée, contre 6 Mt précédemment. »

FranceAgriMer a revu à la hausse, mi-novembre, les exportations françaises de blé tendre vers l’UE, à 7,048 Mt, contre 6,809 Mt en 2024-2025. « Des problèmes de logistique sur les trains et camions en Europe centrale ont poussé les importateurs à substituer une partie des volumes issus de ces zones par du blé français, a expliqué Habasse Diagouraga. À cela s’ajoute la baisse des volumes importés depuis l’Ukraine.

Terminer la campagne avec des stocks faibles

« Nous avons de la disponibilité, il faut exporter 9 millions de tonnes vers les pays tiers, pour que les stocks au 30 juin s’allègent et que nous ayons des perspectives de prix plus intéressantes pour 2026 », estime Philippe Heusèle. Mais les blés argentins et australiens vont bientôt arriver sur les marchés avec des volumes très importants, tout comme les blés de l’Est russe annoncés quantitatifs et qualitatifs. Et il reste une inconnue majeure qui est la politique d’importation de la Chine. « En 2022 et 2023, la Chine a été un gros acheteur de blé français. En 2024, elle n’a rien acheté du fait de l’absence d’offre française. Que fera-t-elle en 2025 ? Leur récolte de blé est correcte, tout va dépendre de leur stratégie vis-à-vis de leurs stocks », indique Philippe Heusèle. L’Asie s’intéresse de plus en plus à la qualité française et il y a des marchés à prendre. La France a déjà expédié du blé vers le Bangladesh et réalisé de belles ventes en Thaïlande, ajoute Hector Pointeau. Intercéréales fonde aussi beaucoup d’espoir sur l’Indonésie.

Le challenge à l’export est de maintenir les niveaux de production et de qualité pour avoir des flux réguliers. « C’est un travail de long terme, la France travaille sur des accords sanitaires bilatéraux, comme elle l’a fait il y a longtemps avec la Chine », explique Philippe Heusèle. Mais aujourd’hui, cette garantie de régularité est remise en cause par les changements climatiques, avec des variations de production importantes d’une année sur l’autre, qui impactent fortement les prix. C’est la viabilité des exploitations céréalières qui est remise en cause. Philippe Heusèle rappelle qu’il existe toujours un prix d’intervention qui n’a jamais été réévalué depuis 2021. « À 101 euros la tonne, il est inopérant. S’il était réactualisé de l’inflation générale, il serait à 170 euros la tonne en euro constant, ce qui est le niveau du marché actuel et ne couvre pas les coûts de production pour les trois quarts des producteurs dans le monde en 2025, se désole le responsable. Cette situation n’est pas tenable. »

Protéines et qualité technologique au rendez-vous

Les analyses réalisées par FranceAgriMer et Arvalis sur la récolte de blé 2025 montrent des poids spécifiques (PS) atteignant en moyenne 78,6 kg/hl, avec 94 % des lots au-dessus de 76 kg/hl. Les indices de chute de Hagberg sont excellents : 92 % des échantillons dépassent 300 secondes, signe de grains sains et non germés. L’humidité moyenne, à 12,6 %, garantit une bonne conservation. La teneur moyenne en protéines est de 11,3 %, avec 69 % des blés dépassant les 11 %. Côté aptitudes technologiques, la force boulangère (W) atteint 178 en moyenne, les P/L (ténacité/extensibilité) s’établissent à 1,1, traduisant des pâtes résistantes et équilibrées. Les tests de panification confirment la qualité : 75 % de la collecte obtient une note supérieure à 250/300, avec de beaux volumes de pain et une bonne absorption d’eau. Selon la grille FranceAgriMer, 64 % des volumes entrent dans les classes Premium ou Supérieur, répondant aux attentes des marchés export.

Des investissements nécessaires dans les infrastructures

Face à des infrastructures de stockage vieillissantes, à des avaries fréquentes sur les canaux et des lignes ferroviaires vétustes, « un choc d’investissement est nécessaire », énonce Catherine Matt, directrice Métiers du grain à La Coopération agricole. L’organisme a élaboré un plan national Infrastrutures 2030, dont l’objectif est d’éviter que les infrastructures de stockage ne deviennent un goulot d’étranglement de la chaîne logistique. Le plan vise à concentrer les efforts sur les installations performantes, à limiter les transports, à adapter les infrastructures aux outils agricoles modernes et aux capacités accrues de transport fluvial et maritime. Il s’agit aussi de concevoir des infrastructures polyvalentes pour produire des lots variés à haute valeur ajoutée.

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