Betterave : rendement et prix en berne minent les revenus
Surproduction mondiale et mauvais rendements français se cumulent pour pénaliser le monde de la betterave et du sucre.
Surproduction mondiale et mauvais rendements français se cumulent pour pénaliser le monde de la betterave et du sucre.
Les betteraviers et le secteur sucrier souffrent. « Nous traversons une crise majeure, a décrit Éric Lainé, président de la CGB (Confédération des planteurs de betteraves) en conférence de presse le 11 décembre. Nous n’avons jamais eu des prix aussi bas. » Selon les prix fournis au niveau européen par Bruxelles, la tonne de sucre s’est négociée 307 euros dans la zone France en octobre 2018 contre 500 euros un an plus tôt et plus de 700 euros en octobre 2013. Avec la fin des quotas, le marché européen s’aligne sur les prix mondiaux, plombés par une forte production, dans le monde comme en Europe. Après deux années de stocks déficitaires (- 9 Mt en 2015/2016 et – 3 Mt en 2016/2017), le surplus mondial est monté à un peu plus de 6 millions de tonnes sur 2017/2018. Pour 2018/2019, il atteindrait 2 Mt selon l’Iso (organisation internationale du sucre).
La tonne de betterave payée moins de 22,9 euros en 2018
A la baisse des cours vient s'ajouter la chute des rendements. La moyenne sera à 83 t/ha contre 89 t/ha de moyenne quinquennale et 96 t/ha en 2017, qui était toutefois une année record. La récolte ne va atteindre que 5,3 Mt de sucre contre 6,5 Mt l’année précédente. Ces volumes seront complétés de 10 millions d’hectolitres d’éthanol (volume équivalent aux 9,25 millions d’hectolitres de 2017). « Pour la première fois, la betterave va dégrader le revenu de la ferme, et entraîner une moyenne de 400 à 500 €/ha de perte », a signalé le président du syndicat. Le prix moyen de la betterave hors pulpe pour 2018 sera inférieur aux 22,9 euros de 2017, c’est d’ores et déjà certain.
Contractualiser plus et mieux avec les fabricants
Fort de cette nouvelle réalité, la CGB veut faire de la filière française l’une des plus réactives aux signaux du marché et parvenir à réguler les exportations. « Si le marché mondial déprime, il faut se maintenir au niveau du marché européen, soit à 400 000 hectares de betterave et 100 jours de campagne, a expliqué Pierre Rayé, le directeur du syndicat. Si le marché est porteur, il faut pouvoir monter à 500 000 hectares et à 130 voire 140 jours de campagne. ». Pour le syndicat, cela ne peut passer que par davantage de contractualisation entre industriels et producteurs. Mais il faut que les fabricants respectent avec plus de rigueur les engagements imposés par Bruxelles. Cela signifie notifier clairement aux producteurs les prix d’achat avant les semis, au moment des engagements sur les surfaces. Et c'est aussi préciser le mécanisme de répartition de la valeur entre producteurs et industriels lorsque les prix de marché évoluent en cours de campagne. La CGB souhaite également la mise en place d’indicateurs de marché départ usine pour que le ratio de partage puisse s’établir. Mais les négociations au sein de l’interprofession sont difficiles. Pour l’instant, faute de mieux, le syndicat envoie aux planteurs une lettre hebdomadaire d’information sur les marchés.
La CGB favorable à la création d'organisations de producteurs
Pour faciliter le rééquilibrage du rapport de force entre producteurs et fabricants privés, la CGB compte également demander au ministère de l’Agriculture d’ouvrir la possibilité de créer des organisations de producteurs (OP). « L’OP permet une négociation quasiment à armes égales avec l’industriel », a décrit Eric Lainé. Autre point de négociation : la mise en place d’un ISR, instrument de stabilisation des revenus sectoriel. Cet outil de régulation permettrait selon le syndicat d’amortir les chutes brutales de revenus. Jusqu’à présent, les industriels ne se sont pas montrés favorables à cette logique.