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[Fières d'ête éleveuses] Entre passion pour la salers et syndicalisme

Installée en Gaec père-fille en janvier 2011, Delphine Freyssinier est une inconditionnelle de la salers. Investie dans le syndicalisme agricole, son dynamisme et ses talents d’organisatrice ont été un atout lors du dernier congrès de la Fédération nationale bovine qui s’est déroulé dans de bonnes conditions.

[Fières d'ête éleveuses] Entre passion pour la salers et syndicalisme
© F. d'Alteroche

« J’ai toujours voulu m’installer, mais pas forcément à 20 ans », souligne Delphine Freyssinier éleveuse à Trizac, dans le nord Cantal. « Après un BTS productions animales au lycée agricole de Brioude-Bonnefont en Haute-Loire, le fait d’avoir été technicienne à Bovins croissance Cantal pendant sept ans jusqu’en décembre 2010 était une super expérience. J’ai énormément appris », explique celle qui a rejoint son père en janvier 2011.

Exploitation familiale qui jusque-là était conduite avec un double troupeau associant une trentaine de montbéliardes et pratiquement autant de salers, suivi dans la foulée d’une rapide reconversion vers le 100 % allaitant. « Mon père n’est pas à la retraite. À 64 ans, il me donne un sérieux coup de main, mais me délègue les prises de décision. Il me dit régulièrement : 'l’avenir c’est toi ! À toi de prendre les rênes'. »

Passion pour la « vache rouge »

Passionnée par ses salers, Delphine Freyssinier cite après son père trois personnes qui ont beaucoup compté pour conforter sa passion de l’élevage, améliorer ses connaissances techniques et faire éclore sa fibre syndicale. D’abord Fernand Fourtet, sélectionneur salers reconnu en Corrèze chez qui elle a fait une longue période de stage.

Puis Bernard Lafon, ancien directeur de Bovins croissance Cantal, apprécié pour ses compétences techniques, sa connaissance de l’élevage régional, sa rigueur et la bonne ambiance qu’il savait communiquer au sein de son équipe et enfin Joël Piganiol, président de la FDSEA15, lui aussi éleveur allaitant mais en Châtaigneraie dans le sud-ouest du Cantal.

Tout en contemplant ses vaches, ruminant paisiblement, Delphine évoque également son grand-père aujourd’hui décédé. « Il m’a transmis cette passion pour la 'vache rouge'. Le 26 novembre 2012, jour où mes animaux sont entrés pour la première fois dans la nouvelle stabulation dont j’ai conçu le plan en fonction de ce que j’avais vu sur le terrain quand j’étais salariée. J’en avais la larme à l’œil. J’aurai tant aimé qu’il soit là. Les voir toutes alignées au cornadis, c’était un mélange de joie et de fierté que seul un éleveur peut ressentir », souligne celle qui est aujourd’hui éleveuse là où son aïeul s’était installé en 1966.

Sa belle stabulation en bois avec caillebotis sur fosse, derrière les cornadis et aire paillée, abrite désormais l’essentiel des vaches suitées. « Mais l’hiver qui a suivi mon installation, toutes les vaches étaient à l’attache dans de vieilles étables. On faisait de bonnes journées. Dans ces conditions on peut manger tout ce que l’on veut, on est certain de ne pas grossir ! »

Réunions syndicales à Aurillac

L’engagement syndical est arrivé plus tard. « Mon père était adhérent aux JA puis à la Fédé. J’ai toujours entendu parler de syndicalisme à la maison. En 2013, il y a eu le renouvellement cantonal et des éleveurs du canton de Riom-es-Montagne m’ont incité à prendre la présidence. C’est comme cela que ça a commencé », souligne Delphine, désormais secrétaire générale de la FDSEA15.

Et de souligner que les réunions à Aurillac n’ont rien pour lui déplaire, si ce n’est la distance. « Quand le matin à 7 h 30, je laisse ma fille Hélène - bientôt trois ans - chez sa nounou pour partir en réunion toute la journée, c’est un peu dur. Elle me dit que je pars faire 'les réunions pour les vaches'. »

Dans le Cantal, les distances se calculent davantage en heures de trajet qu’en nombre de kilomètres parcourus. « Un aller-retour à Aurillac, c’est trois heures de voiture. Mais défendre l’élevage cantalien est capital. Il faut faire entendre notre voix. Dans le département, nous avons la chance d’avoir plusieurs responsables nationaux. Bruno Dufayet et Patrick Bénézit ont beaucoup compté pour le mettre le pied à l’étrier », souligne Delphine, connue pour avoir un certain caractère et une langue bien pendue.

« Dans le Cantal, les éleveurs installés comme moi à plus de 1 000 mètres d’altitude ont la réputation d’être coriaces. Mais mon but c’est la réussite du collectif et la défense du métier. » Et de se remémorer la manifestation organisée à Clermont-Ferrand le 25 mars 2021 avec plus de 500 tracteurs réunis dans le centre de la capitale auvergnate.

« Il fallait marquer les esprits. L’enjeu était le mode d’attribution des aides dans le cadre de la nouvelle PAC. C’est un enjeu clé. Mais quand tout se passe bien et que notre action a un impact sur les décisionnaires, organiser une manifestation ce n’est que du bonheur. » Et de se remémorer aussi des discussions conflictuelles avec les principaux exportateurs du département au moment de la plongée des cours du maigre à l’automne 2020.

Organiser avec la menace du coronavirus

« À la Fédé, notre dernier défi a été le congrès de la FNB début février à Aurillac. On l’a organisé en quelques mois pour ne pas dire quelques semaines avec le couperet du coronavirus qui faisait peser la menace d’une annulation au dernier moment. On m’a chargé de l’organisation. Ça m’a d’abord paru tendu comme délai mais j’aime bien les défis. Et puis à la FDSEA on a une super équipe. Mon portable a 'chauffé' dans les semaines et les jours qui ont précédé, mais je pense que cela a été un bon congrès. »

À 36 ans, Delphine compare volontiers son équilibre à celui d’un tabouret à trois pieds qui pourrait immanquablement tomber si l’un d’eux venait à se briser. « Le premier, c’est ma famille ; le second, mon exploitation et le troisième, le syndicalisme." Et d’évoquer également ses craintes pour le renouvellement des générations d’éleveurs. « À Trizac où je réside, nous avions 39 exploitations quand je me suis installée. Cette année, il n’y en avait plus que 26 et dans les dix ans à venir, il y aura une dizaine de départs en retraite. C’est préoccupant. »

107 hectares tout en herbe

Le Gaec de la Grange Neuve se compose de 107 hectares situés autour de 1 000 mètres d’altitude, exclusivement consacrés à l’herbe avec un cheptel de 95 vaches salers pour moitié conduites en croisement. La quasi-totalité des vêlages se déroulent de mi-décembre à mi-mars avec vente de broutards autour de 400 kg en cours d’automne. « Je fais du croisement charolais mais vraiment à contrecœur. Côté génétique ça ne me fait pas rêver. Dans l’idéal, j’aimerais ne pas avoir à faire de croisement ou simplement à la marge. » Le cheptel est en contrôle de performance depuis 2006 et inscrit au herd-book depuis 2011. Entre la conjoncture, les aléas climatiques et les pullulations de rats taupiers, Delphine n’a jamais connu depuis son installation d’année véritablement favorable. « Au printemps dernier je pensais être largement autonome côté fourrages, mais sur Trizac on a eu un orage de grêle terrible qui a couché tout le foin prêt à être fauché. Si depuis 2012 j’avais pu garder pour moi l’argent investi pour pallier les déficits fourragers générés par les sécheresses ou les rats taupiers cela irait déjà nettement mieux ! » Le côté sécurisant, c’est le salaire de Pierre-Alexandre Guibert, son compagnon, qui travaille au service de remplacement et lui donne un coup de main appréciable pour les gros travaux.

La fièvre du grand ring

« Le fait de participer deux années consécutives au Salon de Paris a été l’accomplissement d’un rêve d’enfant. La première fois, c’était en 2014 avec Gibbs un taureau de 3 ans. Le jour où j’ai appris qu’il avait été retenu par la commission de sélection, j’en ai pleuré de joie en pensant à mon grand-père qui aurait tant aimé vivre ce moment avec moi. Gibbs n’a pas été premier de sa section mais ces 10 jours à Paris avaient à eux seuls un petit goût de victoire. » L’année suivante, Delphine y est retournée avec Habby une vache suitée de 3 ans, née chez elle. « Entrer dans le grand ring en tenant son propre animal est un moment très fort dans une vie d’éleveur. C’est inoubliable. J’espère le revivre un jour pour promouvoir la salers et plus globalement l’élevage allaitant. »

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