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Clause miroir : une « taxe pesticides » imaginée par l’observatoire européen de la fiscalité

L’Observatoire européen de la fiscalité propose, dans une note publiée fin mars, de mettre en place une « taxe pesticides » aux frontières de l’Union européenne. Destinée aux produits agricoles importés, cette taxe aiderait l’UE à protéger sa production agricole, tout en réduisant son « empreinte phytosanitaire » selon le cercle de réflexion. 

Bateau d'importations de soja du Brésil dans le port de Saint-Nazaire.
En intégrant la consommation des pesticides des produits importés dans l’UE, l’institut de recherche indépendant a pu calculer l’« empreinte phytosanitaire » globale de la production agricole destinée à la consommation alimentaire des Vingt-sept.
© Pascal Le Douarin

À l’instar du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l’Union européenne (UE) adopté en 2023, l’Observatoire européen de la fiscalité propose une « taxe pesticides » sur les produits agricoles importés, dans une note publiée fin mars. L’idée du cercle de réflexion est d’intégrer des « mesures d'ajustement aux frontières » dans la politique commerciale de l’UE, en raisonnant par l’usage de pesticides. Cela permettrait à la fois de « préserver la compétitivité agricole de l'UE » face aux importations, et cela « sans compromettre son ambition environnementale », selon la note.

Les importations des pays tiers représentent 37,7 % de « l’empreinte glyphosate » de l’UE

Car si l’UE, via le Green Deal1, s’est fixée comme objectif de réduire son utilisation de pesticides, ce n’est pas forcément le cas des pays avec lesquels elle commerce.  En intégrant la consommation des pesticides des produits importés dans l’UE, l’institut de recherche indépendant a pu calculer l’« empreinte phytosanitaire » globale de la production agricole destinée à la consommation alimentaire des Vingt-sept. Et montre que 44 % de cette « empreinte phytosanitaire » provient des produits agricoles importés, alors qu’ils ne représentent que 16 % de la consommation alimentaire de l’Union. Pour le glyphosate en particulier, les importations non européennes représentent 37,7 % de « l’empreinte glyphosate » de l’UE, dont 24,6 % provenant des pays du Mercosur selon la note. 

Le Mercosur pèse pour 24,6% dans l’empreinte glyphosate de l’UE

Des réglementations européennes « plus strictes » sur les pesticides pourraient même entrainer la délocalisation de la production agricole vers des marchés moins réglementés, préviennent les auteurs. Car dans ces pays avec moins de normes environnementales, les agriculteurs peuvent produire à un prix plus bas que dans l’UE. « Cela crée un risque que les consommateurs de l'UE se tournent vers des importations moins chères produites avec une utilisation plus intensive des pesticides, externalisant ainsi les dommages environnementaux plutôt que de les réduire », souligne la note. 

Lire aussi : Green Deal : la réduction des pesticides “est en bonne voie”, selon une étude européenne

Deux scénarios de « taxes pesticides » aux frontières de l’UE

Pour éviter cette délocalisation de l’usage des pesticides, appelée « fuite phytosanitaires » dans la note à l’instar du phénomène des « fuites de carbone », les auteurs ont testé deux solutions de tarification aux frontières de l’UE. 

Un mécanisme d’ajustement aux frontières contre la concurrence déloyale

Dans un premier scénario, ils proposent la mise en place d’un « mécanisme d'ajustement aux frontières pour les fuites » (LBAM), qui vise à « maintenir les parts de marché domestiques des producteurs de l'UE ». En pratique, les importations agricoles seraient taxées « en fonction du désavantage de coût auquel sont confrontés les producteurs de l'UE », en lien avec les réglementations plus strictes. 

Un mécanisme d’ajustement phytosanitaire sur la teneur en pesticides

Le second scénario correspond à un « mécanisme d'ajustement phytosanitaire aux frontières (PBAM) », où les produits importés sont taxés en fonction de leur teneur en pesticides. Ce qui permet de garantir « une concurrence équitable entre les producteurs de l'UE et ceux hors UE », soutiennent les auteurs. Mais ces derniers préviennent que la mise en œuvre de ces mesures « pose des défis, notamment pour suivre la teneur en pesticides ». 

Des solutions pratiques aux objectifs de la « Vision pour l’agriculture et l’alimentation » de Bruxelles

Jusqu’ici, les réglementations européennes sur les pesticides « se concentrent principalement sur les résidus plutôt que sur l'utilisation pendant la production », via les limites maximales de résidus, rappelle la note. 

La note salue les mesures présente dans la « Vision pour l'agriculture et l'alimentation » présentée en février 2025 par la Commission européenne. Celle-ci affirme vouloir « renforcer l'alignement des normes de production appliquées aux produits importés » en matière de pesticides. Et s'engage à ce que « les pesticides les plus dangereux interdits dans l’UE pour des raisons de santé et d’environnement ne puissent pas être réintroduits dans l’UE par le biais de produits importés ». Avec sa note, l’Observatoire européen de la fiscalité dit présenter des solutions concrètes pour atteindre les objectifs de la « Vision », et « combler le fossé entre la réglementation environnementale, la politique commerciale et la compétitivité ».

Lire aussi : Que prévoit la Commission européenne dans sa « Vision sur l’agriculture et l’alimentation » ?

1Dans la stratégie « De la ferme à la table », les Vingt-sept avaient intégré l’objectif de réduire de 50% l’usage des pesticides dans l’Union européenne d’ici à 2030 (directive SUR). Même si la mesure a été finalement rejetée fin 2023, l’Observatoire européen de la fiscalité a estimé qu’un tel objectif entraînerait une augmentation de la part des importations européennes de 8,3 % pour le maïs, 1,9 % pour le soja et 30,2 % pour le blé. 

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