Quel fumoir pour fumer ses fromages de chèvres ?
Le fumage permet de donner facilement un petit goût supplémentaire aux fromages de chèvre. Un fumoir est facile à mettre en œuvre mais il faut veiller à ne pas parfumer tout l’atelier. Conseil de Coline Sabik, conseillère technologique à Actalia – Centre de Carmejane.
Le fumage permet de donner facilement un petit goût supplémentaire aux fromages de chèvre. Un fumoir est facile à mettre en œuvre mais il faut veiller à ne pas parfumer tout l’atelier. Conseil de Coline Sabik, conseillère technologique à Actalia – Centre de Carmejane.
Fumer ses fromages permet d’élargir sa gamme fromagère de façon originale en transformant subtilement le goût de ses productions laitières. Le fumage n’implique pas forcément de chauffer le fromage puisqu’il est possible d’exposer les denrées fragiles et sensibles à une fumée froide, entre 20 et 25 °C. Pour ce faire, il faut un fumoir qui peut s’acheter ou se construire à moindres frais. Il se compose d’une source de production de fumée froide et d’une enceinte de fumage, une sorte de cocon pour retenir cette fumée qui a été produite.
Pour générer de la fumée froide, on peut utiliser une spirale ou un serpentin en grillage métallique que l’on remplit de sciure de bois. On allume l’extrémité avec un chalumeau, un allume sciure ou une bougie et la sciure se consume lentement, entre deux et quatre heures pour une petite spirale. Il faut compter de 30 à 50 euros pour ces spirales ou serpentins.
Transformer un vieux frigo en fumoir
On peut aussi utiliser un générateur électrique de fumée qui permet de bien réguler le débit de fumée. Vendu aux alentours de 150 euros, cet appareil régule la production de fumée en contrôlant le volume et la vitesse d’arrivée d’air et donc de combustion. On peut aussi utiliser la fumée d’un poêle à bois mais cela peut être contraignant car il faut refroidir la fumée en la faisant passer à travers la tuyauterie.
Une fois cette fumée produite, on va la contenir dans une enceinte de fumage. À Carmejane (Alpes-de-Haute-Provence), nous avons acquis un fumoir en inox dédié pour 2 500 euros. Mais on peut tout à fait bricoler soi-même une enceinte en bois ou en recyclant un réfrigérateur. Si on le fabrique soi-même en bois, il faudra juste éviter d’utiliser de la colle ou des produits chimiques.
Du bois de hêtre ou d’autres essences
Le fumoir doit donc être installé dans une pièce spécifique ou une pièce où les fromages sont déjà emballés pour ne pas donner ce goût fumé à tous les produits. Si on doit sortir les fromages de l’atelier, il faut être vigilant aux contaminations croisées et intégrer ce risque dans le plan de maîtrise sanitaire. On peut par exemple prévoir simplement de transporter les fromages dans une glacière fermée.
Traditionnellement, le fumage est réalisé au bois de hêtre mais on peut imaginer de brûler des copeaux ou de la sciure d’olivier, de pommier ou de cerisier. Les conifères sont déconseillés et les bois devront être exempts de peinture, vernis ou traitements. Des plantes aromatiques peuvent être additionnées pour la combustion afin d’aromatiser la fumée.
Une odeur transmise à toute la cave
L’épaisseur des morceaux de bois a une incidence sur la température de la fumée. Les morceaux les plus fins permettent d’avoir une fumée plus froide. Le stockage des copeaux et sciures se fera à l’abri de l’humidité car plus ils seront secs, plus la fumée sera de qualité.
Le fumage est à prévoir juste avant la vente car, une fois fumés, les fromages sont très odorants. Il est d’ailleurs préférable de ne pas les remettre en cave car ils risqueraient d’aromatiser les fromages non fumés. Il est aussi possible de filmer les fromages et de les conserver sous vide afin de faire pénétrer l’arôme à cœur.
Le fumage présente un risque de contamination chimique avec la concentration d’hydrocarbures polycycliques aromatiques (HAP). Cependant, les essais menés à Carmejane ont, tout le temps, montré des concentrations inférieures aux seuils de détection. Notons qu’il est également possible de donner le goût fumé par le trempage ou l’aspersion d’arôme de fumée mais cette technique n’intéresse généralement pas les fromagers fermiers.
Un fumage rapide pour les lactiques, plus long pour les tommes
Dans les Alpes-de-Haute-Provence, le centre fromager Actalia de Carmejane a testé différents temps de fumage dans son fumoir en inox. Une trentaine de types de fromages ont été fumés puis dégusté à l’aveugle par un jury expérimenté. Les petits fromages de chèvre lactiques jeunes prennent un goût de fumée équilibré au bout d’une à deux heures. Au-delà, les fromages se colorent et sèchent fortement. Surtout, ils prennent un goût trop marqué. En revanche, pour les fromages à pâtes pressées déjà affinés et avec une croûte, il faut plus de temps pour que l’arôme pénètre dans le produit. Ces recommandations de temps sont, bien sûr, à adapter en fonction de l’équipement, des fromages et du goût de chacun. Lors des essais à Carmejane, les taux de matière grasse et d’humidité ont été mesurés, mais aucune corrélation n’a pu être établie avec l’intensité du goût ou le temps de fumage recommandé. Les fromages très secs (séchons) ont été testés mais leur complexité aromatique est déjà forte et le fumage est déconseillé.