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Gaec Honnoré-Quenton, dans le Tarn
« Nous produisons moins de lait mais nous faisons plus de marge »

Les éleveurs font évoluer leur assolement pour renforcer l’autonomie alimentaire, quitte à baisser la production laitière. La volonté est aussi d’aller vers un système plus vivable.

Le Gaec Honnoré-Quenton, à Cadalen, dans le Tarn, fait partie des élevages engagés dans le projet d’amélioration de l’autonomie fourragère GO PEI CapGo. Les deux associés, Marion Quenton et Lucas Honnoré, installés hors cadre familial en 2015, ont déjà engagé et vont poursuivre une forte réorientation de leur système fourrager vers une plus grande autonomie. Quand ils ont acheté (en GFA) la ferme céréalière de 60 hectares dans les coteaux tarnais et la bergerie désaffectée, ils ont maintenu la moitié de la surface en céréales de vente et monté un cheptel de 230 chèvres Saanen avec un haut niveau de production. Mais, au prix de beaucoup d’achats de fourrages et concentrés. « Depuis deux ans, nous avons changé notre fusil d’épaule, expliquent-ils. Nous produisons moins de lait (780 l/chèvre) mais nous faisons 200 €/1 000 l de marge supplémentaire avec moins de pénibilité. » L’assolement a été complètement revu. Il compte désormais 40 ha d’herbe et 20 ha de méteil grain et d’orge à destination des animaux. Des prairies multiespèces à base de mélanges suisses, mieux adaptées au climat et capables de fournir du fourrage équilibré en UF et MAT, remplacent les dactyles/fétuques. Les mélanges sont élaborés pour chaque parcelle selon le type de sol et son comportement à l’égard de la sécheresse. Ils comportent de 10 à 12 espèces et variétés, dont au moins deux trèfles et une luzerne. L’installation de ces mélanges est longue sur ces sols hétérogènes, tantôt battants tantôt argileux, et les aléas climatiques ne facilitent pas leur implantation.

Des fourrages de qualité pour limiter les concentrés

Les premières coupes sont récoltées tôt (fin avril) pour privilégier la qualité du fourrage. Des prairies de fauche sont déprimées afin de les décaler sur une période plus longue. La Fromagerie Le Pic, à laquelle est livré le lait, n’autorise ni les aliments OGM ni les fourrages humides. En contrepartie, elle valorise le lait au-dessus du prix du marché et accorde une plus-value pour le pâturage (+ 300 €/1 000 l) et le désaisonnement. « Nous avons besoin d’une première coupe de qualité, d’autant plus que nous allons vers des années où les trois quarts des stocks se joueront sur cette première fauche. Mieux vaut acheter du concentré que du fourrage », poursuivent-ils. Ils achètent du maïs grain, du correcteur azoté et de l’aliment chèvre laitière. Ce dernier est remplacé par le méteil grain quand le taux de MAT est suffisant. Mais, ce taux est assez irrégulier (de 11 à 20 % ces 3 dernières années). Les éleveurs expérimentent aussi des couverts d’hiver (féverole, phacélie, radis) pâturés par les chèvres et des couverts d’été implantés dans les 24 à 48 heures après la moisson pour profiter de l’humidité résiduelle après la récolte.

Des clôtures fixes pour gagner du temps

Les mises bas ont lieu du 15 janvier à début mars. Les chèvres commencent à sortir à la pâture dès la mi-février après deux vagues de mises bas. La pâture se poursuit jusqu’en décembre, à raison de six heures par jour en moyenne et jusqu’à huit heures au printemps. « L’herbe de printemps remplace l’aliment chèvre laitière et on fait plus de lait », précisent les éleveurs. La durée de pâturage baisse ensuite en partie pour une question de temps de travail. La gestion du pâturage était jusqu’ici très chronophage - une heure d’astreinte par jour - car il était organisé avec des clôtures mobiles. Quand le couple s’est installé, rien n’était clôturé. N’ayant pas encore pris tous leurs repères, ils ont préféré démarrer avec des clôtures mobiles. Cet hiver, ils prévoient de poser des clôtures fixes électrifiées pour les tours de parcelles et leur découpage qui se fera au minimum à l’année. Les clôtures mobiles ne seront plus utilisées que pour délimiter des parcs de 1,2 ha pour trois jours. « Nous gagnerons un mois de travail et les chèvres pourront pâturer plus longtemps, se réjouit d’avance Marion. Nous travaillons beaucoup et nous n’avons pas d’aide bénévole. Il faut baisser la charge de travail pour que ce soit plus vivable. » Les travaux extérieurs et l’épandage du fumier sont délégués à une entreprise afin de pouvoir se concentrer sur les animaux et la fenaison. Et, désormais sur la transformation et la vente directe de viande de chèvres et de chevreaux.

Chèvres de réformes et chevreaux valorisés en vente directe

Le Gaec développe la vente directe de viande caprine et de produits transformés qui répondent à une forte demande.

Le Gaec développe depuis deux ans la transformation de viande caprine. En 2019, le couple a valorisé 35 chèvres de réforme (sur 50 à 60) en viande (côtelettes, gigot tranché, colis) et en produits transformés : plats cuisinés, saucisson, merguez, pâtés. « Une chèvre laisse de 50 à 200 € de marge selon la façon de la préparer. Ça vaut le coup mais, cela représente beaucoup de travail », explique Marion Quenton. La préparation est effectuée dans un atelier de découpe en Cuma proche de l’exploitation. Des bouchers font le désossage et éventuellement la préparation des produits. L’éleveur peut aussi louer la cuisine et la faire. Il faut compter une journée pour préparer 150 kg de produits finis. Les chevreaux sont valorisés de plusieurs manières. Ils sont élevés au lait de vache yaourt préparé chez un éleveur proche. Il est distribué chaud les trois premières semaines puis froid. Un mode d’alimentation qui réduit fortement les problèmes sanitaires. Sur un potentiel de 200 chevreaux, la majorité est vendue en chevreaux gras (10 kg vif) à un engraisseur à 4-5 semaines d’âge. Les 30 plus beaux (des croisés Anglo-nubiens) sont castrés et engraissés jusqu’à 6-8 mois (20-24 kg de carcasse) pour faire des plats cuisinés. De 20 à 30 chevreaux sont vendus en colis à Pâques après élevage sous la mère. Âgés de 2 à 3 mois, ils pèsent de 15 à 25 kg vif. « En dessous, ça ne vaut pas la peine. Il n’y a pas assez de viande. Ils doivent ressembler à un agneau. » Pour ces derniers, la marge est de l’ordre de 50 à 60 euros par chevreau. La vente de viande et produits transformés est effectuée à la ferme et dans des magasins du département. La demande est forte.

Chiffres clés

60 ha de SAU
230 chèvres de races Saanen et Anglo-nubiennes
172 000 l de lait produit
780 l/chèvre
763 €/1 000 l de prix de vente du lait
425 €/1 000 l de coût alimentaire

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