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1 300 litres par chèvre avec du pâturage six mois dans l’année

Installés depuis 1998, Claudine et Pascal Moreau ont fait le choix de conduire leurs chèvres au pâturage pour alléger leurs contraintes de travail.

Nous avions peur que notre bâtiment, petit et sans possibilité d’ouverture pour une aire d’exercice, ne soit pas en phase avec les évolutions des cahiers des charges des AOP de la région Centre. » Plutôt que de se retrouver coincés par la réglementation, en 2000, Pascal Moreau a fait le choix de conduire ses chèvres au pâturage dans son exploitation de Saint-Senoch en Indre-et-Loire. « Cela nous a permis de diminuer le travail d’astreinte et la pénibilité. Auparavant, l’affouragement en vert était un travail assez physique, avec six distributions par jour et deux passages aux champs. La plupart des tâches étaient effectuées à la main : je devais apporter la nourriture à l’auge à bout de bras. Avoir les chèvres en extérieur permet aussi de diminuer la fréquence de curage ou de parage des onglons ». L’éleveur estime ainsi avoir gagné une trentaine d’heures par mois. Si le volume horaire hebdomadaire reste conséquent, le pâturage modifie la nature des tâches à effectuer et diminue surtout la pénibilité du travail : « ce n’est pas désagréable d’aller chercher les chèvres au pâturage ».

Du pâturage au fil pour optimiser la ressource herbagère

Cette année, Pascal Moreau dispose de 9,5 ha pâturables autour de la ferme pour ses 120 chèvres. Il essaye pourtant de tendre chaque année vers 15 ha de pâture pour son troupeau. Si des parcelles adjacentes à la ferme avaient pu faire office de prairies, la pousse de l’herbe demeure tributaire de la météo. « Je ressème mes prairies tous les deux ou trois ans afin de garder un mélange homogène de luzerne et de trèfle violet. »

Les chèvres avancent graduellement dans la prairie grâce à un système de fil. Chaque chèvre bénéficie d’environ 10 m² d’herbe par jour. « Je prends garde à ne pas les laisser pâturer trop longtemps au même endroit pour éviter le parasitisme. J’avance chaque jour le fil pour l’équivalent des deux tiers de la surface à pâturer au matin et d’un tiers le soir. Les chèvres effectuent deux passages par parcelle, le premier lorsque l’herbe est à la hauteur des genoux, le second environ un mois et demi après le premier passage pour pâturer les repousses. J’effectue souvent un passage de broyeur après leur passage pour éliminer les tiges de luzerne et favoriser la repousse ». En période estivale, les chèvres sont exclusivement nourries au pâturage et reçoivent un complément en concentré durant la traite. Elles reçoivent 900 g de céréales, 150 g de tourteaux de soja achetés et 70 g de tournesol. « Elles ont toute la journée pour manger, mais elles concentrent généralement leur repas. Elles broutent environ une heure et demie le matin, et trois quarts d’heure le soir après la traite. D’après moi, concentrer les repas permet d’augmenter le temps de rumination, et donc la production laitière. »

Des chèvres en extérieur six à sept mois par an

Les chèvres passent six à sept mois en extérieur et rentrent généralement à la chèvrerie au mois d’octobre. Si le temps le permet, elles seront de retour au pâturage pour quelques semaines après la période des inséminations. Toute la reproduction se fait en insémination artificielle fraîche ou congelée, à l’exception des primipares qui sont mises au bouc. Les chèvres qui ne prennent pas sont maintenues en lactation longue.

Les chevrettes sont élevées en extérieur. Elles sont placées dès l’âge de quatre mois dans un parc d’un hectare et voient leur prairie s’agrandir au fur et à mesure qu’elles grandissent. Le troupeau s’est habitué au rythme et les déplacements ne posent pas de problème. « Je n’ai pas recours à un chien de conduite, je ne veux surtout pas que les chèvres courent. Tous les déplacements se font dans le calme », assure Pascal Moreau. Le soir comme le matin, les chèvres attendent leur éleveur qui vient les chercher en quad à la barrière et le suivent à la traite. « Avant, j’allais les chercher dans la parcelle, mais elles n’avaient pas toujours fini leur repas. J’ai eu des problèmes de météorisation dans le troupeau. Depuis, j’attends qu’elles viennent d’elles-mêmes et les problèmes ont disparu », détaille l’éleveur de 58 ans.

Une production moins régulière, mais qui s’équilibre à l’échelle d’une année

Pascal Moreau a su faire rimer pâturage et productivité. Ses chèvres produisent entre 1 200 et 1 450 litres de lait soit un volume annuel total d’environ 135 000 litres de lait. « Le plus difficile est de faire en sorte que le début de lactation se déroule bien, car si le démarrage n’est pas bon, la saison risque d’être difficile. Le pâturage peut rendre la production un peu plus irrégulière : s’il pleut les chèvres mangeront moins, il y aura donc moins de lait à la traite mais sur une année la production s’équilibre. » Le lait est intégralement transformé à la ferme en AOP sainte-maure-de-touraine ou en bûche fermière. Un tiers des chèvres est en lactation longue afin de permettre la transformation toute l’année. Pour un pâturage optimal, Pascal Moreau a fait le choix non pas de désaisonner mais de décaler d’un mois les mises bas afin d’avancer le pic de lactation pour le faire coïncider avec la période où l’herbe est la plus abondante en extérieur.

Le pâturage a ses désagréments. Les chèvres sont parfois victimes d’infections au papillomavirus, principalement dû au soleil, causant de petites tumeurs sur les mamelles et compliquant la traite. « Le papillomavirus est à l’origine de 5 à 10 % des réformes. Le parasitisme pose également problème même s’il est gérable. En cas de doute, j’effectue des coprologies et je traite en fonction des résultats. J’effectue un traitement chaque année à l’arrêt du pâturage pour avoir des chèvres propres au printemps. »

Si Pascal Moreau a fait le choix des Saanen pour leur calme, leur santé plus robuste et leur moindre propension à trier l’aliment, il se heurte davantage au problème des coups de soleil. Il enduit donc les mamelles de pommade, surtout les premiers jours de grand soleil.

Chiffres clés

120 chèvres Saanen
1 200 litres produits par chèvre
9,5 ha de prairies temporaires (objectif de 15 ha)
30 ha en surface fourragère (luzerne, trèfle violet)
49,5 ha de céréales (maïs, orge)

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