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Réglementation
CBD : que dit l’arrêté du 30 décembre sur la récolte de fleur et de feuille de chanvre

Le gouvernement vient d’autoriser la culture des fleurs et des feuilles de chanvre en France mais avec de nombreuses conditions restrictives. Un texte décevant pour le monde agricole.

feuille de cannabis
- L’arrêté restreint l’autorisation de cultiver des fleurs et des feuilles de chanvre aux agriculteurs actifs au sens de la réglementation européenne et nationale.
© Pixabay

Tant attendu par la filière chanvre, l’arrêté autorisant et encadrant l’utilisation industrielle et commerciale des extraits de chanvre, et en particulier du cannabidiol (CBD) a été publié au journal officiel du vendredi 31 décembre. Il abroge l’arrêté du 22 août 1990 portant application de l’article R.5132-86 du code de la santé publique pour le cannabis. Mais que prévoit exactement ce texte du ministère des solidarités et de la santé, signé par Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture ?

  • L’arrêté autorise la culture, l’importation, l’exportation et l’utilisation industrielle et commerciale des seules variétés de Cannabis sativa L. dont la teneur en delta-9-tétrahydrocannabinol n’est pas supérieure à 0,30% et qui sont inscrites au catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles ou au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées en France.
     
  • L’arrêté restreint l’autorisation de cultiver des fleurs et des feuilles de chanvre aux agriculteurs actifs au sens de la réglementation européenne et nationale.
     
  • Les fleurs et les feuilles doivent être produites à partir de plantes issues de semences certifiées.
     
  • La vente de plants et la pratique du bouturage sont interdites.
     
  • Si les fleurs et feuilles de chanvre peuvent être récoltées, importées ou utilisées pour la production industrielle d’extraits de chanvre, la vente aux consommateurs de fleurs ou de feuilles brutes sous toutes leurs formes, seules ou en mélange avec d’autres ingrédients demeure interdite, de même que leur détention par les consommateurs et leur consommation.
     
  • L’achat de fleurs et de feuilles de chanvre produites sur le territoire français fait l’objet d’un contrat écrit entre producteur et acheteur, avec des informations sur le volume et le prix des produits, ainsi que la qualité attendue des produits. Le contrat doit être conclu avant le début de la campagne de production.
     

Cet arrêté, notifié à la Commission européenne, fait suite à un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne de novembre 2020 et à un arrêt de la Cour de Cassation du 23 juin 2021.

 

Le feuilleton judiciaire n’est pas clos

Ludovic Rachou, président de l’Union des industriels pour la valorisation des extraits de chanvre (UIVEC) a salué dans un communiqué une « excellente nouvelle pour les acteurs économiques et industriels qui attendaient depuis de nombreuses années ». Un arrêté qui « ouvre la voie au développement de la filière des extraits de chanvre en France en 2022 », selon l’UIVEC. « Du cannabidiol, mais aussi d’autres cannabinoïdes non stupéfiants (CBG, CBC, etc) pourront être fabriqués en France », se réjouit l’organisation selon qui le marché français du cannabidiol est estimé à près de 700 millions d’euros dès 2022.

L’UIVEC regrette néanmoins que l’arrêté ne lève pas le flou juridique qui persiste sur certains points. « L’adoption du nouvel arrêté est une excellente nouvelle pour les acteurs économiques et industriels qui attendaient depuis de nombreuses années. Une nouvelle filière française d’excellence, celle des extraits de chanvre, va désormais pouvoir se structurer. Il s’agit maintenant de donner à nos entreprises la possibilité d’investir pleinement ces marchés d’avenir en clarifiant les réglementations applicables aux différents produits finis et en les alignant sur celles de nos homologues européens et anglais pour jouer à armes égales », commente Ludovic Rachou, président de l’UIVEC.

Un arrêté « largement insuffisant »

De son côté, le syndicat professionnel du chanvre, présidé par Aurélien Delecroix regrette que les fleurs et feuilles de chanvre ne puissent être commercialisées, brutes, en France. « Une interdiction totale et non proportionnée » qui ne se base sur « aucune preuve scientifique démontrant une problématique sanitaires », juge-t-il. Le syndicat entend déposer des référés visant la suspension de l’arrêté de même qu’un recours devant le Conseil d’Etat et ce après une décision attendue le 7 janvier du Conseil constitutionnel.

Défenseur de la culture du chanvre en France, le député LREM Jean-Baptiste Moreau estime de son côté que « cet arrêté est largement insuffisant face aux demandes des agriculteurs et des consommateurs ». Selon lui, l’arrêté risque « une nouvelle fois d’être rejeté par la Cour de Justice de l’Union européenne » et « continue d’empêcher l’essor d’une filière française de CBD en empêchant la vente de feuilles et de fleurs ». Il regrette que ses préconisations n’aient pas été suivies.

Une opinion partagée par Jouany Chatoux, agriculteur-éleveur dans la Creuse et pionnier de la culture de cannabis « light », qui estime dans Libération du 31 décembre que « ce nouvel arrêté vient enterrer tout projet de filière française ».

Ce ne sera pas rentable pour nous

« Au niveau agricole, nous allons être pieds et poings liés. Ce ne sera pas rentable pour nous. Nous n’aurons pas le choix des variétés, les bouturages seront interdits et pour acheter des graines nous serons obligés d’avoir un contrat avec un extracteur », déclare-t-il au quotidien. Il souligne que l’association française des producteurs de cannabinoïdes (AFPC) a déposé une question prioritaire de constitutionnalité.

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