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Viande bovine en circuits courts : accompagner la multicompétence des éleveurs

Consacré à la transformation et la commercialisation des viandes en circuits courts, le projet Victor s’achève. Il livre des informations sur les pratiques actuelles et les besoins d’accompagnement des éleveurs en circuits courts.

<em class="placeholder">Deux bouchers decoupant une carcasse de boeuf Charolais dans un atelier de decoupe bovin dans les Ardennes.</em>
Les résultats de l’enquête menée sur une trentaine d’ateliers sont globalement satisfaisants en matière de maîtrise de la qualité sanitaire.
© Gutner

Transporter, faire abattre, transformer ou faire transformer, conserver, commercialiser, communiquer, gérer des équipes… Lorsqu’un éleveur se lance dans la vente directe ou les circuits courts, il ne fait pas « que rajouter une simple activité » à l’élevage : il devient responsable de toute la chaîne qui va de l’animal au consommateur et de plusieurs nouveaux métiers.

La diversification vers les circuits courts est une tendance durable. « Toutefois, une fois cette diversification mise en place, on constate que les éleveurs ont peu d’outils pour les accompagner et assurer la durabilité de leur activité », décrit Clémence Bièche-Terrier, du service qualité des carcasses et des viandes de l’Institut de l’élevage.

Fournir ces outils aux éleveurs, c’est l’objectif de Victor, projet d’envergure qui s’intéressait aux viandes bovines et porcines en circuits courts et qui a mobilisé douze partenaires, depuis début 2022, avec un financement Casdar innovation et partenariat. Le séminaire final du projet s’est tenu en ligne le 6 octobre dernier.

Plusieurs circuits et plusieurs produits

L’état des lieux réalisé auprès de 114 fermes, dont 52 en viande bovine et 35 en multiespèces, montre qu’ « il n’existe pas deux situations identiques », analyse Clémence Bièche-Terrier. Tous différents, ces élevages ont cependant des points communs : 84 % ont choisi cette activité pour des raisons économiques (revenu complémentaire, indépendance, contrôle des prix…). « Le lien avec les consommateurs et la maîtrise des produits de leurs animaux sont aussi des motivations fortes. »

Sur leurs pratiques aussi, on retrouve des traits communs : les trois quarts d’entre eux ont entre deux et quatre circuits de distribution, et 10 % en ont même plus de cinq : vente à la ferme, Amap, magasin de producteurs, drive, RHD, vente en ligne…

Presque tous les éleveurs proposent une « gamme » de produits et cette tendance est nouvelle en viande bovine. « Ils ne font plus seulement de la viande fraîche, mais également des produits hachés, des plats cuisinés frais et des conserves. Cet élargissement de la gamme leur permet de valoriser l’entièreté de la carcasse », explique Françoise Morizot-Braud directrice du Centre d’étude et de recherche sur la diversification.

Qualité plutôt bien maîtrisée

Dans le cadre du projet, des enquêtes techniques ont été menées auprès d’une trentaine d’éleveurs possédant un atelier de transformation, à titre individuel ou partagé, sur la maîtrise de la qualité. Les résultats, issus d’évaluations avec double notation, éleveur et enquêteur, montrent qu’elle est plutôt bien maîtrisée : « Ça ne bricole pas », résume Arnaud Bozec, de l’Ifip. « Les ateliers sont dans l’ensemble bien conçus, beaucoup d’éleveurs sont allés voir ailleurs avant de construire leur outil. »

« Sur le plan des techniques, il y a un bon niveau de maîtrise, car soit les éleveurs se sont formés, soit ils font appel à des spécialistes en découpe et transformation, salariés ou prestataires. » En matière d’hygiène, il existe quelques points de vigilance, comme les vestiaires, la transmission des bonnes pratiques aux équipes, ou la bonne compréhension des analyses de suivi sanitaire.

Travail et rentabilité : ça se corse

Certains élevages (9 en porc, 6 en bovins, 11 multiespèces) ont fait l’objet d’analyses de leur temps de travail et de leur rentabilité. Les bilans de travail annualisés montrent que les éleveurs « sous-estiment le temps passé à l’activité ». « La vente directe, c’est chronophage », commente Christèle Pineau, cheffe de projet économie des exploitations bovins viande à Idele.

Globalement, les temps de travail rapportés au kilo de carcasse vont de 8 à 13 minutes (soit de 52 à 86 heures pour un bovin de 400 kg de carcasse). Ces temps varient selon la taille de la gamme – plus elle est large, plus le temps est élevé –, selon le recours à des prestataires, selon les distances à parcourir entre ferme, abattoir, atelier… À noter que lorsqu’une ferme internalise la découpe-transformation, au moins deux-tiers de son temps de travail sont liés aux circuits courts.

Sur le plan de la valorisation économique, les écarts se creusent encore entre les fermes, avec une valorisation allant de 7,73 à 13,66 €/kg de carcasse (comptabilité 2022). Les calculs de rentabilité, intégrant toutes les charges, dont la cession des animaux au prix de la filière longue, montrent que dans les ateliers bovins étudiés, un tiers est bénéficiaire, un tiers est à l’équilibre et un tiers est déficitaire. Pour comparaison, en porc, 80 % des ateliers sont bénéficiaires.

Les facteurs discriminant les ateliers rentables des autres sont l’amortissement des équipements, l’organisation et le temps de travail, et la stratégie commerciale, dont, bien sûr, le niveau des prix.

De 4 à 200 tonnes équivalent carcasse commercialisées par an

Les élevages qui ont servi de base aux enquêtes ont été recrutés par les partenaires dans quatre régions. Tous réalisent la majeure partie, voire la totalité, de leur chiffre d’affaires en circuit court (pas plus d’un intermédiaire). Ils sont de tailles très différentes, de 4 à 200 tec commercialisées par an, avec une médiane à 22 tec par an. La plupart ont leur propre atelier, mais l’échantillon comprend tous les niveaux d’internalisation de la transformation.

Des outils pour répondre aux besoins d’accompagnement

Dans le cadre du projet Victor, plusieurs outils ont été développés et seront disponibles gratuitement sous des formats « attractifs » : visite virtuelle d’un atelier, parcours de connaissances sur la réglementation et sur la technologie des viandes, outil illustré de dialogue avec les consommateurs.

Les deux outils les plus complets sont Opti’découpe et Renta’viande directe. Le premier, développé sur Excel, permet d’optimiser le rendement de découpe d’une carcasse ; le second est un calculateur en ligne, qui mesure la rentabilité de l’activité circuits courts viandes.

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