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Les taurillons d’herbe dévoilent leurs atouts à Jalogny

Pour mettre en marché du bétail maigre en fin de printemps, les taurillons d’herbe issus de vêlages de fin d’hiver tiennent la comparaison en termes de revenu avec des broutards lourds nés en début d’automne. Tel est le résultat d’une analyse comparative réalisée à la ferme de Jalogny en Saône-et-Loire. À côté des chiffres économiques, ces deux systèmes de production ont été passés à la loupe pour analyser leur impact environnemental sur la base de la méthodologie de l’outil CAP’2ER multicritère.

Pour mettre en marché du bétail maigre en fin de printemps, les taurillons d’herbe issus de vêlages de fin d’hiver tiennent la comparaison en termes de revenu avec des broutards lourds nés en début d’automne. Tel est le résultat d’une analyse comparative réalisée à la ferme de Jalogny en Saône-et-Loire.

 

 

Il ne faudrait pas jeter trop vite « aux orties » les vêlages de printemps et les taurillons d’herbe. C’est un système en tout point intéressant pour mettre en marché du maigre en fin de printemps à une période où l’offre est moins abondante. Cet itinéraire technique conserve un intérêt comparativement à une production de broutards commercialisés sur cette même période mais issus de vêlages de début d’automne. Telle est l’analyse que l’on peut faire d’une étude comparative menée entre 2012 et 2017 à la ferme expérimentale de Jalogny en Saône-et-Loire. Ses résultats ont été dévoilés par Julien Renon, son responsable technique, et Jérémy Douhay, en charge du suivi de ce travail pour l’Institut de l’élevage.

 

 

Dans les grandes exploitations herbagères de la zone charolaise, spécialisées au fil des ans dans la production de maigre, la tendance de ces trente dernières années a été à l’avancement des vêlages en cours d’automne. Cette stratégie permet de mettre en marché à compter de la fin du printemps des broutards de 8 à 9 mois vendus peu après le sevrage à un poids objectif approchant les 400 kg vif payables. Un « produit » en phase avec la demande italienne, laquelle souhaite s’approvisionner le plus régulièrement possible avec cette catégorie de maigre standardisée.

Lire aussi : Moins de taurillons d’herbe en Bourgogne

Cette part croissante des animaux issus de vêlages d’automne a pris de l’importance aux dépens des taurillons d’herbe maigres. Une gamme d’animaux dont le cycle de production, bien calé sur le cycle de l’herbe, permet également de combler le « creux » des disponibilités de fin de printemps avec des animaux souvent plus lourds mais surtout plus âgés puisque vendus entre 14 et 15 mois pour un poids objectif de 450 kg vif payables. Ils correspondent à des vêlages de fin d’hiver. Les veaux sont conduits la plupart du temps sans complémentation sous les mères. Sevrés en fin d’automne, ils sont hivernés en limitant les frais. Remis à l’herbe en fin d’hiver, ils réalisent alors des croissances compensatrices grâce à une bonne valorisation de la pousse explosive de l’herbe de printemps, souvent couplée à une légère complémentation.

Vêlages sur dix semaines

L’analyse comparative conduite à Jalogny sur ces deux systèmes de production a consisté à scinder en deux le cheptel charolais de cette ferme expérimentale avec deux troupeaux d’une cinquantaine de mères. L’un destiné à une production de taurillons maigres et l’autre à une production de broutards nés à l’automne en cherchant dans les deux cas de figure à en optimiser la conduite (voir graphique 1). « On a choisi dans les deux systèmes des périodes de reproduction courtes (deux mois et demi) avec un taux de premiers vêlages avoisinant 30 % pour avoir la possibilité de réformer sans hésitation toute femelle vide, avec une dominante d’IA en vêlages d’automne et 100 % de monte naturelle en vêlages de fin d’hiver », explique Julien Renon, responsable de cette ferme expérimentale.

Lire aussi : Des repères pour la complémentation hivernale des veaux d’automne

Globalisés sur six campagnes de production, les taux de gestation sont en faveur des vêlages de printemps (85,8 % contre 75,2 %). Le taux de gestation, nettement inférieur pour le troupeau en vêlages d’automne au cours des premières années d’expérimentation, a pu être ramené à des valeurs similaires à celles obtenues avec les vêlages de printemps grâce à la mise en place d’une complémentation avec une ration mélangée distribuée en fin de gestation. Elle a favorisé une bonne transition alimentaire avant la rentrée en stabulation, période coïncidant avec le début de la période de reproduction. Aucun des deux systèmes n’a en revanche permis de remédier à un taux de mortalité naissance-sevrage élevé. Il a avoisiné 11 % pour les deux périodes de vêlage retenues.

Moins de stocks en vêlage de fin d’hiver

Pour les vêlages d’automne, les rations hivernales reposaient sur trois fourrages (60 % d’ensilage d’herbe, 12 % d’enrubannage et 28 % de foin) avec un objectif visé et réalisé d’une consommation de 2,2 TMS/UGB hivernée et la nécessité d’avoir pour les vaches une ration suffisamment riche, car distribuée au pic de lactation et en pleine période de mise à la reproduction. Les volumes à prévoir devaient aussi être suffisants dans la mesure où la ration mélangée des vaches suitées commençait à être distribuée dès la mi-septembre. Dans les faits, ces quantités se sont souvent révélées juste suffisantes pour être en phase avec les besoins des animaux avec pratiquement aucun stock de report à la mise à l’herbe. Les veaux ont été complémentés dès la mi-novembre au moment de la rentrée en bâtiment et jusqu’au sevrage, qui correspond aussi à la date de vente des broutards.

En vêlage de printemps, choix a été fait de se contenter de deux modes de récolte pour l’herbe (foin et enrubannage) avec des stocks à peu près équitablement répartis entre ces deux fourrages d’une année à l’autre. L’objectif visé de 1,6 TMS/UGB hivernée a pu être atteint sans trop de difficultés avec de ce fait la constitution de stocks de report parfois conséquents d’une année sur l’autre, donc susceptibles d’être distribués pour pallier un déficit d’herbe estival. Mais que ce soit pour le système en vêlage d’automne ou de fin d’hiver, les quantités de concentrés utilisées sont restées inférieures aux chiffres constatés pour les exploitations du réseau d’élevage charolais dont les objectifs de production sont similaires. Et quelle que soit l’année prise en compte, ces quantités ont toujours été plus modestes pour le troupeau « taurillons maigres » avec 396 kg/UGB contre 527 kg/UGB pour le troupeau « vêlage d’automne ».

Davantage de kilos vendus avec les taurillons maigres

Côté commercial, les animaux des deux protocoles ont tous été vendus maigres quels que soient leur sexe et leur âge (voir graphique 2). Le nombre d’animaux vendus est similaire dans les deux protocoles, mais ramené à l’animal, le poids moyen par tête est supérieur pour le système printemps. Le poids moyen de vente des taurillons d’herbe a été de 426 kg sur les six campagnes de commercialisation contre 350 kg pour les broutards dessaisonnés avec un prix unitaire moyen de 1 116 euros pour les premiers contre 1 009 pour les seconds. Le système « printemps » a donc permis de produire davantage de kilos vendus (26 008 contre 24 740) mais il a aussi utilisé davantage de surfaces. « Nous n’avons pas eu de difficultés particulières à vendre les taurillons d’herbe, précise Julien Renon. Mais leur poids et leur âge étaient aussi en phase avec l’évolution des attentes du marché avec des taurillons vendus suffisamment jeunes (14 à 15 mois) et pas trop lourds : objectif de 450 kg payables. »

Au final, calculée sur la moyenne des six années de cette expérimentation et dans la conjoncture constatée pour le maigre ces mêmes années, la marge brute penche clairement en faveur des taurillons d’herbe et du vêlage de fin d’hiver (voir tableau ci-contre). Certes le produit brut est moins important, mais il est compensé par un niveau de charges inférieur. Chiffres d’ailleurs en cohérence avec ce qui est constaté sur le terrain dans les fermes de référence du réseau d’élevage charolais. « Les écarts de prix au kilo qui étaient de 13 centimes d’euro en début de période expérimentale en faveur du système 'broutards' se sont réduits à 7 centimes les trois dernières années », précise Julien Renon. Avec également un alourdissement des broutards en fin de période qui a contribué à réduire l’écart de prix moyen entre les deux catégories. « Un autre intérêt de la production de taurillons d’herbe maigres découle également de la date de vente. Elle permet de 'décharger' les surfaces en herbe juste avant l’arrivée de l’été », souligne Thierry Lahémade, en charge du suivi du réseau des fermes de référence en Saône-et-Loire. C’est un « plus » à ne pas négliger alors même que les sécheresses estivales deviennent récurrentes. En revanche, aucune analyse n’a pu être réalisée sur le temps de travail pour ces deux systèmes de production en particulier pour les périodes clés que sont la période hivernale et celle de la récolte des fourrages. « Les salariés de la ferme expérimentale ont cependant été unanimes pour saluer la plus grande facilité et le meilleur confort de travail pour surveiller des vêlages de fin d’été », ajoute Julien Renon.

Moins d’azote minéral et de paille en vêlage de printemps

Côté fertilisation, l’apport d’azote minéral a été légèrement plus important pour le système en vêlage d’automne et s’explique par la part de l’ensilage d’herbe et donc de fauches précoces dans les stocks. Les animaux ont été hivernés dans des stabulations paillées.

La quantité de paille utilisée a été détaillée. Elle est sensiblement plus importante pour le troupeau en vêlage d’automne dans la mesure où la durée de l’hivernage est plus longue : 145 jours contre 126. Soit une économie annuelle de 15 tonnes de paille par hiver correspondant à un gain de 1 200 euros avec de la paille comptabilisée à l’époque 79 euros la tonne.

Le taurillon d’herbe produit plus longtemps des GES

À côté des chiffres économiques, ces deux systèmes de production ont été passés à la loupe pour analyser leur impact environnemental sur la base de la méthodologie de l’outil CAP’2ER multicritère.

Il a été pris en compte l’impact en termes d’émission de gaz à effet de serre (GES), la qualité de l’eau via le bilan apparent de l’azote et la consommation d’énergie tant directe (électricité et carburant) qu’indirecte, à savoir celle liée à la fabrication et au transport d’intrants tels que les engrais et l’aliment du bétail. Même si la différence est minime, le bilan penche en faveur du système en vêlage d’automne avec 440 tonnes équivalent CO2/an contre 469 pour les vêlages de printemps.

 

 

Ce résultat peut sembler curieux dans la mesure où les vêlages d’automne sont plus gourmands en énergies fossiles (engrais, carburant) conséquences d’un niveau de fertilisation légèrement plus important et d’une durée d’hivernage plus longue. Mais vendre les mâles nettement plus jeunes (8,8 mois contre 14,9 en système taurillon d’herbe) permet également de réduire leur temps de présence donc la période au cours de laquelle ils vont émettre du méthane en flatulant et surtout en éructant. Toutefois, il s’agit dans les deux cas de modes de production plutôt vertueux sur le plan environnemental compte tenu de l’importance des surfaces en herbe. Le stockage de carbone dans les haies et prairies compense une bonne partie des émissions et la très forte proportion d’herbe dans la SAU limite les risques de lessivage.

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