Vins effervescents : le tirage sous liège amène esters et notes camphrées
Liège ou capsule couronne, que vaut-il mieux employer au tirage ? Tout dépend du profil aromatique souhaité et du temps de vieillissement sur lattes.
Tirer sous liège amène-t-il réellement une différence dans les vins comme le constatent des vignerons ayant utilisé les deux méthodes ? Ces impressions sont-elles vérifiables analytiquement ? Deux études récentes vont dans ce sens.
En Afrique du Sud, en 2021, l’analyse de six paires de vins effervescents bouchés soit avec du liège, soit avec une capsule, a montré que les vins bouchés liège étaient plus riches en tanins (acides gallique, caftarique, caféique et p-coumarique). Une fois servis, les vins bouchés au liège avaient tendance à perdre du CO₂ plus lentement que leurs homologues bouchés à la capsule couronne. Ils présentaient des bulles plus fines et une finale plus longue.
Bouchage liège préféré sur des temps de vieillissement plus longs
La deuxième étude a été réalisée dans le cadre de la thèse de Sara Sofia Pinheiro à l’université de Lisbonne, sur deux vins effervescents tirés sous liège ou capsule et vieillis pendant dix ans. Des échantillons ont été prélevés régulièrement au cours de cette période. Les analyses ont quantifié 39 composés aromatiques susceptibles de décrire le profil des vins : ceux bouchés avec du liège contiennent plus de molécules connues pour leurs arômes camphrés et fruités. Les vins tirés sous capsule sont plus riches en notes florales et d'agrumes.
Ces différences analytiques ne sont toutefois pas toujours détectées lors de la dégustation. Lorsque des préférences significatives ont été mises en évidence, le bouchage liège a été préféré par les dégustateurs sur des vins avec des temps de vieillissement sur lattes plus longs (huit ou neuf ans). Tandis que la capsule a été préférée sur un vin avec un profil initial plutôt fruité et 24 mois sur lattes.
Dégorgement manuel obligatoire avec un bouchon
« Nous avons étudié depuis longtemps les différences entre le tirage liège et la capsule, indique Benoît Villedey, responsable du service ingénierie, process et innovations du Comité Champagne. Et pour nous, le critère le plus impactant entre les deux est la perméabilité à l’oxygène. Aussi, il est difficile de conclure si les écarts constatés dans les vins finaux proviennent de ces différences de micro-oxygénation ou de l’obturateur en lui-même. »
D'autres paramètres entrent en ligne de compte lors du choix de l'obturateur
Selon lui, le choix de l’élaborateur entre ces deux obturateurs doit tenir compte de plusieurs critères :
- le risque de déviation et d’hétérogénéité avec un bouchon,
- l’extraction obligatoirement manuelle au dégorgement (pour l’instant en tout cas),
- le vieillissement mécanique du bouchon qui risque de nécessiter un remplacement pour les vins destinés à un très long vieillissement alors que la capsule aura une durée de vie plus longue,
- et la perméabilité à l’oxygène. Sur ce dernier point, les capsules ont une perméabilité linéaire, tandis que les bouchons vont désorber beaucoup d’oxygène au départ, qui sera capté par les levures, puis les entrées d’oxygène seront quasi linéaires par la suite.
Une question d’oxygène
D’après les tests du Comité Champagne, les bouchons en LA2R (liège aggloméré 2 rondelles) présentent une perméabilité faible à modérée soit de 0,2 à 0,5 mg par bouteille et par an. Les bouchons microagglomérés se situent dans une fourchette de perméabilité modérée à élevée, soit 0,4 à 0,8 mg par bouteille et par an. Les capsules présentent une gamme de perméabilité de 0,2 à 1 mg par bouteille et par an. À noter la sortie l’an dernier de deux bouchons de tirage avec taux de transfert en oxygène homogène chez Diam bouchage.