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Décuvage : un aspirateur à marc qui sécurise les vinificateurs

En partenariat avec MBO Vision, Cefinox développe un aspirateur à marc qui sera officiellement lancé au Sitevi. Nous nous sommes rendus sur place lors d’un essai, afin de le juger en action.

La partie du ML Transfer contenant la pompe doit être suspendu au-dessus du pressoir via un chariot élévateur ou une potence.

Qui n’a un jour rêvé qu’un automate décuve à sa place ? Si ce n’est pas encore possible, Cefinox travaille sur un prototype d’aspirateur à marc, en partenariat avec MBO Vision. En ce matin du 5 octobre, il est testé chez Benjamin Banton, à Castillon-la-Bataille en Gironde. L’équipe du domaine souhaite décuver deux cuves, en débutant par celle du fond, équipée d’une trappe à mi-hauteur. Une configuration pas idéale, qui ne permet pas de tirer tous les bénéfices espérés de l’aspirateur.

Suspendre l’aspirateur au-dessus du pressoir

Mais avant de commencer, place à la préparation de l’aspirateur à marc, répondant au petit nom de ML Transfer. Un premier opérateur charge la partie « aspiration » sur un chariot élévateur, à l’aide de deux collègues. Une opération rapide, qui nécessite juste de serrer deux écrous. Pour les domaines ne possédant pas de chariot élévateur, l’aspirateur peut par exemple être suspendu sur une potence.

 

 
L'aspirateur à marc fonctionne avec un compresseur débitant 200 m3/h et une cuve tampon.
L'aspirateur à marc fonctionne avec un compresseur débitant 200 m3/h et une cuve tampon. © C. de Nadaillac

Cette partie du ML Transfer se compose de plusieurs modules. Celui du haut comprend une pompe à vide, alimentée par un compresseur qui doit fournir 200 m3/h. Juste dessous, on trouve une chambre sous vide d’environ 40 litres, qui stocke le marc. Puis un couloir qui sécurise le mouvement du clapet. Une minuterie à réglage manuel complète l’ensemble, afin de choisir le temps d’aspiration et d’ouvrir le clapet à intervalles réguliers. Ce dernier décharge de manière gravitaire le marc dans le pressoir.

Une fois que l’opérateur a chargé la partie aspiration sur le chariot, il la dispose au-dessus du pressoir et connecte les tuyaux du compresseur (tuyau alimentaire) et de l’embout d’aspiration près de la cuve. Ce dernier diffère des tuyaux à marc habituellement utilisés. En diamètre 76 mm, il est beaucoup moins rigide que les traditionnels tuyaux et beaucoup plus léger. « On pourrait partir sur des tuyaux plus petits, note Paul Guyard, comanager de Cefinox. Cela accélérerait la vitesse du marc dans le tuyau mais ne modifierait pas le débit. »

Pas de vis sans fin et moins de trituration du marc

Une fois cette partie mise en place, l’équipe dispose une trémie, fournie par Cefinox et reliée au tuyau d’aspiration, dans un grand bac de décuvage et positionne le tout sur des palettes sous la porte de la cuve. Le décuvage peut démarrer. Le caviste lance le compresseur et ouvre la porte. À l’aide d’un croc à vendange, il dégage la porte et réalise un trou. Il jette le marc dans la trémie. Ce dernier est aspiré à intervalles réguliers et convoyé jusqu’au pressoir. Puis un caviste rentre dans la cuve, muni d’une pelle et déverse ses pelletées dans la trémie, comme il le ferait dans la pompe à marc.

 

 
L'aspirateur à marc ML Transfer de Céfinox comprend notamment une pompe à vide, actionnée par un compresseur.
L'aspirateur à marc ML Transfer de Céfinox comprend notamment une pompe à vide, actionnée par un compresseur. © Céfinox

Un travail aussi physique et fastidieux, mais moins dangereux qu’avec une pompe à marc, l’aspiration dans la trémie ne risquant pas de blesser les opérateurs, contrairement à la vis sans fin de la pompe. « Un autre atout est le respect du marc, souligne Paul Guyard. Il est beaucoup moins trituré. » De même, le débit de chantier est similaire à celui de la pompe à marc. « En une heure, on charge un pressoir de 22 hectolitres », témoigne-t-il.

Des outils pour le moment plus adaptés aux cuves avec porte basse

Quelques heures plus tard, l’équipe se lance à l’assaut de la seconde cuve. Celle-ci est munie d’une porte en partie basse, plus adaptée au matériel développé à ce jour par Cefinox. L’opérateur commence là aussi par dégager la porte et par creuser un trou dans le marc au croc. Puis il saisit un embout formé par un tube en aluminium d’environ un mètre de long et connecté au tuyau menant à la pompe. Il le glisse sur le sol de la cuve et aspire peu à peu le marc. Une opération longue mais bien moins fatigante que le maniement de la pelle. L’embout est léger, se manipule facilement. Néanmoins, il ne permet pas d’atteindre le fond de la cuve, qui doit donc être vidée de l’intérieur.

 

 
Par le biais d'un embout en aluminium, l'opérateur aspire le marc dans le fond de la cuve.
Par le biais d'un embout en aluminium, l'opérateur aspire le marc dans le fond de la cuve. © C. de Nadaillac

Autre bémol, à l’extérieur de la cuve, les vapeurs de CO2 et d’alcool sont censées être moindres et l’utilisateur préservé. Dans la pratique, après avoir effectué 5 minutes de décuvage, on est déjà irrité par ces gaz qui sortent par l'ouverture de la porte. Enfin, l’ensemble est un peu bruyant. Même disposé en retrait, le compresseur crée un bruit de fond, auquel s’ajoutent le vrombissement de la pompe à vide et le bruit du clapet. « Nous devons encore travailler sur cet aspect sonore », reconnaît Paul Guyard.

Plusieurs autres modes opératoires devaient être testés durant cette campagne de décuvage, notamment le fait de passer par la cheminée, d’installer un compensateur de poids, d’aspirer le haut du chapeau de marc avant même de débuter l’écoulage, d’aspirer un mélange de marc et de jus. Et différents contenants devaient être décuvés, comme des amphores ou des barriques. Par ailleurs, l’aspirateur pourrait évoluer. « Nous réfléchissons à lancer un appareil avec un flux continu, afin d’éviter les coups de bélier », confirme Paul Guyard. Un capteur de niveau pourrait également être ajouté. Mais quoi qu’il en soit, cet appareil ne pourra pas fonctionner avec de la rafle et ne pourra donc pas aider à décuver des cuves de vinification en grappes entières.

Cet appareil devrait être lancé au Sitevi, au prix de 25 000 euros sans les accessoires.

témoignage : David Harte, œnologue pour Banton & Lauret

« L’une des innovations les plus intéressantes que j’ai eues à tester »

 

 
David Harte, œnologue pour Banton & Lauret, juge que cette innovation a de l'avenir.
David Harte, œnologue pour Banton & Lauret, juge que cette innovation a de l'avenir. © C. de Nadaillac

« Nous avons voulu tester cet aspirateur à marc car nous cherchons toujours à améliorer nos pratiques et à changer la façon de travailler. Il est de plus en plus ardu de recruter pour les travaux difficiles et peu valorisants. Cet appareil est intéressant dans ce cadre, le décuvage engendrant des risques d’intoxication par le CO2, des risques de coupures, de TMS, etc. Or l’aspiration permet de supprimer les vis sans fin des pompes à marc. C’est plus sécuritaire et ça évite d’avoir à entrer dans la cuve.

L’aspiration fonctionne très bien, c’est comme un aspirateur Dyson. Les presses sont de meilleure qualité qu’avec une pompe à marc car on peut mieux répartir le marc dans le pressoir, notamment en levant un peu l’aspirateur. Il n’y a pas besoin d’électricité. L’appareil est facile à prendre en main et à utiliser. Son nettoyage est simple et rapide, les équipes apprécient. Avec deux bastes de 70 litres d’eau, l’ensemble est propre, ce qui permet en outre de réaliser des économies d’eau. Le débit de chantier, avec cet appareil, est le même qu’avec une pompe à marc. En revanche, son utilisation nécessite d’avoir un compresseur et une cuve tampon. Par ailleurs, il faudrait pouvoir aspirer sans avoir à rentrer dans la cuve, et disposer d’une canne plus au point.

Nous allons continuer à tester différents modes opératoires. J’aimerais par exemple laisser 4 à 5 hectolitres de vin et le brasser avec le marc pour que ce soit plus facile à aspirer. J’aimerais aussi tester cet aspirateur pour vider le marc du pressoir. L’appareil est encore au stade de la recherche, avec quelques détails à régler, mais c’est l’une des innovations les plus intéressantes que j’ai eues à tester. »

fiche technique

ML Transfer de Cefinox

Dimensions 1,80 m de haut, 52,5 cm de large

Poids 70 kg

Raccords tuyaux en 76 mm

Alimentation 200 m3/h d’air comprimé

Prix 25 000 euros, plus le prix des embouts et accessoires comme une trémie

On a aimé

La capacité d’aspiration

L’aspect sécuritaire

La légèreté de l’accessoire muni de l’embout

La polyvalence de l’appareil qui peut aussi bien décuver des cuves de vinification classiques que des amphores ou des barriques en vinification intégrale, ou encore encuver du raisin après une table de tri

On a moins aimé

L’aspiration par à-coups

Le débit un peu trop lent

Les accessoires pas encore au point et ne permettant pas de rester tout le temps à l’extérieur de la cuve

Le prix

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